Né à Lyon, paroisse Sainte-Croix, le 5 septembre 1729, fils de François Prost (1702-1776) – avocat en parlement et ès cours de Lyon, juge général et voyer des terres du comté et de l’archevêché de Lyon, échevin en 1752 et 1753 – et de Françoise Rocher (1696-1788). Parrain : Antoine Prost, procureur au bailliage de Mâcon ; marraine Françoise Chaney, épouse de Claude Verdelet, procureur ès cours de Lyon. François Prost a ajouté à son nom celui de Royer à la suite de l’acquisition le 24 janvier 1752, de Claude Barthelot de Rambuteau, de cette terre située près de Tournus ; Antoine François adopte ce nom, ce qui le distingue d’un autre Antoine Prost, également avocat et procureur général de la ville.
Il termine ses études juridiques à Paris, où il est l’élève de Cochin, Normant et Aubri, et s’installe comme avocat rue Saint-Jean à Lyon, en face du palais de justice. Il possèdera par ailleurs une maison de campagne sur le rocher de la Sana. Comme avocat, il est désigné pour prononcer le 21 décembre 1749 la traditionnelle oraison doctorale de la Saint-Thomas, avec comme thème Le gouvernement monarchique. Dubreuil a parfaitement rapporté son caractère affirmé et son souci de l’indépendance : le 30 juin 1763, l’archevêque de Lyon Mgr Malvin de Montazet fait paraître une lettre pastorale condamnant le prêt à intérêt, que l’Église et les parlements assimilaient à l’usure. Le 1er août 1763, Prost de Royer, désirant défendre les pratiques des négociants, répond par un opuscule de 93 pages, Lettre à Mgr. l’archevêque de Lyon, dans laquelle on traite du Prêt à intérêt à Lyon, imprimé à Avignon (puis une parution à Genève en 1770), signé PR, contestant cette doctrine. La sénéchaussée, dans une sentence du 2 août 1763, ordonne que le livre soit brûlé. L’auteur envoya un exemplaire à Voltaire qui le félicita dans une lettre du 1er octobre 1763 (Œuvres de Voltaire ; 51-52, 54-70. Correspondance. t. 61, p. 171, Paris : Didot frères, 1830-1834). L’opuscule parut dans Choses utiles et agréables, et dans les Nouveaux Mélanges, t. IX (Genève : Cramer, 1770). Voltaire se montra furieux de la maladresse de son éditeur pour cette dernière édition. Prost de Royer publie en 1765 une brochure non signée intitulée : De l’Administration municipale, ou Lettre d’un citoyen de Lyon sur l’administration de cette ville. La sénéchaussée, dans une sentence du 1er avril 1765, ordonne sa destruction, mais elle reparaît plus tard à Londres, en 1769, sous le titre : Idées sur l’Administration municipale des villes.
Prost de Royer est recteur de l’hôpital la Charité et de l’Aumône générale de 1769 à 1773. En 1768, acquérant en Saône-et-Loire la seigneurie d’Étrigny dont dépendaient Brancion, Mancey, Martailly et la Chapelle, il devient ainsi écuyer et se fait appeler seigneur de Brancion, titre que portera plus tard son neveu Denis Salomon de Narboud, acquéreur de la terre le 11 août 1784 pour la somme de 25 000 livres, et plus tard de la terre de Royer à sa veuve le 31 mai 1787. Les almanachs donnent Prost de Royer juge général de la juridiction laïque de l’archevêché. Conseiller de ville en 1771, élu bâtonnier, il ne peut le rester car le Consulat l’avait nommé la même année, sur la recommandation du duc de Villeroy, lieutenant général de police, fonction dans laquelle il est installé le 11 septembre 1772 pour trois ans. En outre, cette année-là, il est nommé juge au tribunal de la Conservation des privilèges royaux des foires de Lyon. Il doit écourter son mandat de lieutenant général de police, car il devient le 21 décembre 1772 échevin du quartier de Fourvière, chargé en outre de l’instruction publique et de la surveillance des écoles. Son échevinat est renouvelé le 21 décembre 1773. Sa célébrité est renforcée par ses rencontres à Lyon en 1777 avec le souverain du Saint-Empire, Joseph II, voyageant sous le nom de comte de Falkenstein, puis avec Henri de Prusse (1726-1802), frère de Frédéric II, qui lui avait été recommandé par leur ami commun, l’abbé Raynal. Henri de Prusse, selon l’abbé Duret, l’aurait fait chambellan et lui aurait vainement proposé de se charger de l’un de ses fils. Puis, Prost de Royer tombe brutalement en disgrâce auprès des Lyonnais, perdant toutes ses fonctions en 1780. Par arrêt du 14 mars 1781, le gouvernement le nomme conseiller général provincial subsidiaire des monnaies au département de Lyon ; la Cour des monnaies de Lyon avait été supprimée et réunie à celle de Paris par un édit d’août 1771.
Il meurt le 21 septembre 1784, à l’âge de 54 ans, paroisse Saint-Nizier, dans le plus grand dénuement, dit-on, mais en pleine gloire : son acte de décès porte trente-et-une signatures de témoins ! Sa veuve reçut une pension de 1 200 livres « en considération des services de feu son mari, ancien lieutenant général de police, à Lyon » (Suite de l’état des pensions sur le trésor royal quatrième classe, t. 2, p. 427, Paris : impr. nationale, 1790). Son éloge funèbre (L’année littéraire 1785, n° 12, et Gazette des Tribunaux 1785, p. 414) a été prononcé à la rentrée de la sénéchaussée et du présidial, le 30 novembre 1784, par son confrère à l’Académie, Pierre Antoine Barou du Soleil*, alors procureur du roi en la sénéchaussée de Lyon, qui fit le même jour celui de Benoît Goy*. Ernest Niepce prononça à la rentrée de la Conférence du stage le 17 novembre 1873 un discours sur la vie de Prost de Royer, imprimé sous le titre : Prost de Royer, sa vie, son œuvre, Lyon: Vingtrinier, 1874. Le conseiller à la cour Ennemond Fayard publia un opuscule intitulé : Prost de Royer, sa vie, son œuvre, séance de l’Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Lyon, 9 déc. 1884 (Lyon : Henri Georg, 1885, 31 p.). De même : Damour, Prost de Royer, Discours de rentrée, audience solennelle de la cour d’appel en 1937 (Lyon : Noirclerc et Fénétrier, 1937, 14 p.).
En 1784, lors d’une scène de fantasmagorie exécutée dans la loge de la Sagesse triomphante, située aux Brotteaux, Cagliostro fit apparaître devant les Lyonnais ébahis l’ombre de Prost de Royer, qui avait été vénérable de la loge de La Parfaite Réunion. Une rue de Lyon portait son nom, dans le quartier Saint-Sébastien (Bréghot, 1838). Il faut cependant noter que le chapitre de Saint-Nizier refusa que les maçons érigent un mausolée à son souvenir.
Comme échevin, il bénéficia de la distribution de jetons (en argent et en cuivre) à ses armes (de gueules au rencontre de taureau d’or accompagné de huit flammes du même) datés de 1773 (Tricou, p. 92 et pl. IX ; Morin-Pons, p. 98 et pl. XIII). Il avait épousé à Montanay le 11 septembre 1764 Marie Elisabeth Valfray de Salornay, fille de Pierre Valfray (1715-1784), sieur de la Tour de Salornay, et d’Elisabeth Quatrefage de la Roquette. Il en eut une fille, qu’il appela Marie Alix Lyon. Parrain : la ville de Lyon, représentée par le prévôt des marchands et les échevins de la ville (c’était une coutume pour les consuls en exercice) ; marraine : Marie Alix Millanois, marquise de Bellescize , épouse de M. le prévôt des marchands (AM Lyon. BB. 341 1772 Actes consulaires : décision portant que le Corps consulaire servira de parrain à l’enfant dont Mme Prost, femme du lieutenant général de police, [doit] bientôt accoucher). La ville de Lyon paye en 1773 2 301 livres 4 sols, pour régler les frais d’église et l’achat de deux robes pour la mère et la marraine. L’enfant se voit servir une pension viagère de 800 livres. Finalement les frais d’église et les robes, avec des coffrets de confiture, atteignent 3 775 livres 18 sols (AM Lyon, BB. 341 f° 116 et 121). Curieusement tous les titres nobiliaires de son acte de décès déposé aux archives municipales ont été rayés, probablement par vengeance, sous la Révolution. L’un des fils de la marraine fut d’ailleurs guillotiné en 1793.
Il est un des personnages du roman d’Éric Marchal, La part de l’Aube, Paris : Anne Carrière, 2003.
Prost de Royer est admis à l’Académie en 1773, remplaçant l’abbé Pernetti*, dans la classe des lettres. Son discours de réception est intitulé : Discours contre le préjugé qui éloigna longtemps des sociétés littéraires le magistrat et le jurisconsulte. En 1778, il donne un Mémoire sur la conservation des enfants, traitant du problème des nourrices. En 1779, comme directeur, il fait l’analyse des travaux de la compagnie. En 1782, il donne une communication, plutôt progressiste, intitulée Mémoire sur l’administration des femmes (et non pas des fermes comme l’écrit le Larousse du xixe siècle !). En 1781 il commence, avec l’aide de Riolz*, et à partir de la jurisprudence réunie par son père, la rédaction d’un Dictionnaire des Arrêts ou Jurisprudence des Parlements de France, & autres Tribunaux, contenant par ordre alphabétique, les matières bénéficielles, civiles, criminelles ; les Maximes du droit Ecclésiastiques, du Droit romain, du Droit public, des Coutumes, Ordonnances, Edits, Déclarations ; par feu Pierre Brillon, nouvelle édit. augmentée de ce qui a paru , depuis 1725, sur la Jurisprudence, & des matières de police, d’Agriculture, de Commerce, de Manufacture, de Finance, de Marine, de Guerre, dans le rapport qu’elles ont avec l’administration de la Justice, vendu par souscription chez la veuve Giroud, imprimeur-libraire, au Palais à Grenoble. Cinq sur les « 18 à 20 volumes » prévus, parurent avant sa mort en 1784 (lire l’opinion élogieuse de Coqueley de Chauffepierre dans Le Journal des savants en mai 1783) sous le titre un peu plus simple de Dictionnaire de Jurisprudence & des Arrêts, ou, nouvelle Edition du Dictionnaire de Brillon, etc., imprimés finalement à Lyon chez Aymé de la Roche. Une lettre d’envoi du 27 janvier 1782 à l’Académie de son dictionnaire par Prost de Royer est conservée à l’Académie, Ac.Ms268-IV f°196. Riolz poursuivit cette œuvre en partie seulement, avec deux volumes. On connaît de Prost de Royer deux autres manuscrits qui semblent égarés : Analyse de l’ouvrage de l’abbé Berthelot sur le pavé de Lyon, et Lettres sur la boulangerie de Lyon. Sont classés à la BML différents mémoires, ordonnances de police de Prost de Royer, une lettre à Lenoir (1777), une lettre sur l’administration de la Ville de Lyon (1765), sur le prêt à intérêt (93 p.), sur les hôpitaux de Lyon, sur l’ascension de Montgolfier et Pilâtre de Rozier (23 janvier 1784), sur la conservation des enfants, sur l’administration des femmes, sur des problèmes de préséance, etc.
Michaud. – Dumas. – Bonnel. – A. Dubreuil, Les anciens bâtonniers de l’ordre des avocats de Lyon, p. 51, Lyon : Rey, 1914. – Abbé Duret, Les Nouvelles générales et particulières de Lyon, ou Chroniques, BM Lyon, Ms.5423 [étudiés par Paul Feuga*, qui a relevé 51 notes de Duret sur Prost de Royer et ses relations avec l’Académie et l’abbé Raynal]. – Stéphane Nivet, Prost de Royer (1729-1784), Mémoire de maîtrise, 2002, dir. Bernard Hours, Université Jean-Moulin Lyon-3. – Pierre Antoine Barou du Soleil, Éloge de M. Prost de Royer, ancien échevin et lieutenant général de police de la Ville de Lyon prononcé à la séance d’ouverture des audiences de la Sénéchaussée de Lyon, le 30 novembre 1784, Lyon : 1785, 68 p. – Alexis Mage, « Antoine-François Prost de Royer (1729-1784) : un exemple lyonnais de rationalisme juridique », Mélanges en l’honneur de Nicole Dockès-Lallement, La mémoire du Droit, à paraître.
Le graveur de l’Académie, Charles Ange Boily (1738-1813), fit son portrait. – Michel Philibert Genod* l’a peint sur un des médaillons de la salle d’audience du tribunal de commerce qui représentaient les magistrats du tribunal de la Conservation.