Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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La recherche est faite par sous chaîne, insensible à la casse et aux accents.

MOREL Pierre, dit MOREL l’aîné (1724-1812)

par Michel Le Guern.

 Pierre Morel est né à Lyon, paroisse Sainte-Croix, le 6 février 1724, fils de Pierre Morel, procureur, et de Françoise Ozinda ; il est baptisé le 8 février dans l’église Sainte-Croix. Il est l’aîné de huit enfants. De 1750 à 1765 environ, il séjourne à Paris chez son frère Jean Marie*, architecte de jardins, intendant général des bâtiments du prince de Conti. Il refuse une place de juge que son frère Jean Marie avait obtenue du prince de Conti, et se contente de fréquenter les salons, en exerçant à l’occasion des fonctions de précepteur. Il revient à Lyon en 1770 comme procureur en l’élection, grenier à sel, traites et foraines. Il habite alors place du Change chez son frère Bonaventure, syndic des procureurs en l’élection, puis à la Croix-Rousse, rue de l’Enfance (act. rue Henri-Gorjus), chez ce même frère devenu juge au tribunal d’appel. En 1790, l’Assemblée nationale supprimera l’office de procureur ; Pierre Morel, dans une lettre du 2 novembre 1790 à l’abbé Grégoire, se plaint de cette décision qui l’a ruiné.

 En 1777, Pierre Morel publie à Genève un Traité de la concordance du participe prétérit avec le participe présent et le supin, qui sera réédité en 1804, à la suite de l’Essai sur les voix de la langue françoise, sous le titre Traité de la concordance du participe prétérit, ou distinction entre le participe prétérit et le supin.

 De 1784 à 1787, il collabore au Journal de la langue française soit exacte, soit ornée, d’Urbain Domergue, publié à Lyon, puis à Paris. C’est Domergue qui fera entrer Morel à l’Institut de France. Dans les Solutions grammaticales qu’il publie en 1808, il insère deux articles de Morel, « Abandon, abandonnement », et « Verbes propres au jeu des instruments de musique », qui avaient paru dans le Journal de la langue française en 1785. Alors que les positions grammaticales d’Urbain Domergue sont progressistes, les contributions de Pierre Morel sont puristes et conservatrices. En 1790, Morel participe à l’enquête de l’abbé Grégoire sur les patois, en donnant des informations intéressantes sur le français parlé à Lyon.

 Membre correspondant de l’Institut de France en l’an VI, puis associé, Pierre Morel y présente son Essai sur les voix de la langue française dans la séance du 15 germinal an X [5 avril 1802].

 Pierre Morel est mort le 11 mai 1812 à la Croix-Rousse à son domicile, 136 rue de l’Enfance. L’acte de décès indique : « Profession de rentier, âgé de quatre-vingt neuf ans, célibataire ».


Académie

Membre de l’Athénée à son rétablissement en 1800, comme associé libre, il devient membre titulaire, section des lettres et des arts, à la réorganisation du 15 frimaire an XI [6 décembre 1802], il est noté « émérite » sur le registre, mais cette mention n’est pas rendue publique dans les almanachs avant celui de 1810. En 1809, il est le doyen de l’Académie. Il y présente une dizaine de communications, conservées dans la bibliothèque de l’Académie (manuscrit 153). La plupart de ces textes avaient été composés depuis longtemps déjà : on n’y trouve pas de référence à des livres publiés après 1780.

Bibliographie

Étienne Molard, « Notice sur M. Pierre Morel le grammairien, correspondant de l’Institut », AHSR, tome 1, p. 330-335. – Dumas. – M. Le Guern, « Pierre Morel, grammairien de l’Académie de Lyon », MEM 2013.

Manuscrits

Ac.Ms153 f°6-15, Y a-t- il des cas dans toutes les langues ? Rapport sur une dissertation du citoyen Bertrand, 25 brumaire an XI [16 novembre 1802]. – f°18-18 bis, Rapport succinct du projet de prosodie française présenté par le citoyen Chomel-Midon d’Annonay, 23 messidor an XI [12 juillet 1803]. – f°19-25, Analogie entre les tons ou sons de la musique et les voix ou sons de la parole (par le citoyen Morel, de l’Institut, associé libre de l’Athénée) (ce mémoire est antérieur au 15 germinal an X [5 avril 1802] : date du rapport sur le mémoire de Morel présenté à l’Institut national par le citoyen Villar). – f°26-57, Traité de la phrase et de la période, lu par M. Morel dans les séances des 5 nivôse (27 décembre 1803), 12 nivôse (3 janvier 1804), 24 pluviôse an XII (14 février 1804) : texte publié en 1804 sous le titre Traité ou examen analytique de la phrase et de la période, par leurs membres ou parties constitutives. – f°58-71, De l’adverbe, 3 juin 1806. – f°76-81, 18 novembre 1806, « Une phrase fort usitée en notre langue, et qui revient souvent dans la conversation, […] cette femme a l’air bonne, spirituelle ». – f°82-95, 17 mars 1807, Discours sur les pronoms. – f°96-111, 17 mars 1807, De la nature du verbe et de ses différentes espèces. – f°120-123, 19 mai 1807, Question grammaticale. Les temps du verbe être peuvent-ils être employés pour ceux du verbe « aller » ? Morel avait déjà répondu à cette question dans le Journal de la langue française (15 septembre 1784), et défendu sa réponse (15 janvier 1786) : version définitive dans le Bulletin de Lyon, n° 71, 5 septembre 1807, des Ballanche père et fils, p. 283 et 284. – f°125-130, « Examen d’une question grammaticale relative à la distinction entre le participe prétérit et le supin ». – f°131-136, « Quelle est la différence qui distingue les lettres obreptices des subreptices ? » (Le rapport de Piestre sur cette dissertation a été lu dans la séance du 18 juillet 1809).

Dans le Bulletin de Lyon du 12 juillet 1806, Étienne Molard s’engage dans une controverse grammaticale qui a opposé Pierre Morel, « qu’on doit regarder comme un des plus profonds grammairiens de France », à son confrère de l’Académie de Lyon et de l’Institut de France, le comte de Laurencin*. Laurencin répond à Molard dans le numéro du 16 juillet. Domergue, dans les Solutions grammaticales de 1808, rend compte de la controverse, et donne raison à Laurencin.