Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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La recherche est faite par sous chaîne, insensible à la casse et aux accents.

MENOUX Louis François (1769-1855)

par Paul Feuga, Dominique Saint-Pierre.

 Louis François Marie Menoux naît à Lyon le 12 novembre 1769, fils de François Menoux, principal commis au bureau de recette de la grande Douane, et de Marie Mayet. Deux jours plus tard, il est baptisé par le curé de Saint-Paul. Parrain : Louis François de Lespinne, contrôleur des fermes du roi à Lyon ; marraine : Marie Declerc, épouse de monsieur Nicolas Anne Bonami (Nicolas Bonamy de Villemereuil, 1714-1777), directeur général des fermes du roi à Lyon. Les Menoux se disaient originaires de Suisse, qualité dont Louis usera devant le tribunal révolutionnaire pour éviter l’échafaud.

 Il se destine au Barreau quand éclate la Révolution. En 1793, il est dit homme de loi. Quand Lyon est menacé par l’armée républicaine, il prend les armes pour la défense de la « ville rebelle ». À 23 ans, il est nommé au grade de sous-lieutenant, et peu après élevé à celui de lieutenant. Après la chute de l’armée lyonnaise, le 9 octobre, il est incarcéré ainsi que son père (ce que nient la plupart de ses biographes) ; la preuve en est donnée, le 29 janvier suivant, quand le tribunal révolutionnaire prend deux jugements identiques afin de réduire la surpopulation carcérale : il renvoie d’accusation et libère environ 300 prisonniers par le premier, et près de 170 par le second ; dans le premier groupe, figure François Louis Menoux, défenseur officieux, âgé de 26 ans, rue des Trois-Marie ; dans le second, François Menoux, 54 ans (le père), né à Lyon dans une famille originaire de Suisse, receveur du timbre et demeurant rue des Hébergeries (act. quai de Bondy).

 En l’an IV, ce même François Menoux sera l’un des receveurs du Domaine national. Un mois plus tard, le 9 ventôse an II [27 février 1794], Louis François Marie, qualifié alors d’écrivain, épouse à Lyon Huguette Françoise Baron, 34 ans (décédée à Lyon le 24 février 1842), lingère rue Tramassac, fille de feu Mathieu Baron, ancien greffier de la Guillotière, et d’Anne Marie Berger. En fait, Mathieu César Baron (1735-1793), ancien greffier du chapitre de Saint-Jean, avait été compagnon de captivité de Menoux. Moins heureux que lui, il avait été condamné à mort et fusillé le 5 décembre 1793 pour avoir été secrétaire de la section de Porte-Froc, et membre du comité de surveillance de cette section pendant le siège. Les témoins du mariage sont des artisans habitant les rues de l’Oubli, Brisée ou Marat, noms révolutionnaires dans le quartier Saint-Jean. Les Menoux emménagent « au bas du Chemin-Neuf, n° 2 ». Vers 1810, ils achètent la maison Buisson près de Saint-Rambert (Mazade d’Avèze, Lettres à ma fille sur mes promenades à Lyon, Lyon : Yvernault et Cabin, Paris : Brunot-Labbé, 1810, t. 2, p. 14, note 1).

 Les événements de Thermidor rendent espoir aux Lyonnais. Menoux est nommé à la tête de la délégation désignée pour plaider la cause de Lyon à la barre de la Convention. Par un discours rapporté au Moniteur du 18 vendémiaire an III, il obtient la révocation du décret Lyon n’est plus. Par décret du 16 vendémiaire an III, la ville rebelle était autorisée à reprendre son nom.

 En 1800, la formation d’un tribunal d’appel donne lieu à la création d’un corps d’avoués. Menoux va exercer cette charge durant onze années. En1812, il est président de la chambre des avoués, mais il démissionne et se fait inscrire au barreau. Lors du procès des prévenus de la conspiration formée à Lyon au mois de janvier 1816, il assure la défense de Jean Louis Étienne Lavallette. En 1817, sans rompre avec le Barreau, il est appelé au conseil de préfecture par le nouveau préfet, Albert de Lezay-Marnezia qui le porte en grande estime : « il s’est fait un nom au barreau de Lyon non seulement par des talents distingués, mais encore par la droiture de son caractère et par sa probité ». Il ne dispose que de 4 500 francs de revenus annuels ! Lezay-Marnezia lui délègue ses tâches locales quand, élu député du Lot, il demeure à Paris lors des sessions (janvier-juillet 1819, novembre 1819-juillet 1820, septembre-octobre 1820). Menoux « a sacrifié les intérêts de ses propres affaires à l’intérêt du bien public. À ses nombreux clients, il ne peut donner le temps qu’ils méritent ». Comme délégué du préfet, il préside la commission mixte pour le rétablissement de la statue de Louis XIV place Bellecour, mais doit faire face à de nombreux problèmes. En 1817, par exemple, il est nommé à la commission du monument des Brotteaux, présidée par Précy sous les ordres duquel il a servi pendant le siège. En reconnaissance de son action généreuse et efficace, la croix de chevalier de la Légion d’honneur lui est accordée par ordonnance du 9 mai 1825. Menoux demeure conseiller de préfecture jusqu’en 1830, quand la Révolution de Juillet lui fait perdre cette fonction.

 Revenu à plein temps au Barreau, il est élu bâtonnier de l’Ordre, le 17 novembre 1832, par 17 voix sur 31 votants, succédant ainsi à Guerre-Dumolard*. Il reste peu de temps dans cette fonction, étant nommé conseiller à la cour royale en 1834. Hostile à l’Empire, il retourne au Barreau en 1852, âgé de 82 ans, et y reste jusqu’à son décès. Conseiller municipal de Lyon en 1837, il perd son siège à la Révolution de 1848. En 1843, il s’était opposé fermement au projet de réorganisation des secours à domicile, présenté par le maire et adopté par la commission, projet qui a pour but de créer un bureau protestant, cette dissidence introduisant, selon ses détracteurs, de la discrimination et du prosélytisme. Refusant que l’on en fasse une question religieuse, Menoux propose la création d’un « conseil supérieur dans lequel se trouveraient réunis les hommes les plus remarquables par leur position, par leurs lumières, par leur expérience et par leur fortune » (Conseil municipal, séance du 5 mai 1843).

 Il a été président de la Société d’Éducation, de la Société d’agriculture, et de la Société d’horticulture-pratique du département du Rhône. Parmi les fondateurs de la Société littéraire en 1807, il en est président en 1809-1810 puis, après son refus de 1845, il l’est de nouveau en 1847-1848 et 1849-1850, pour devenir enfin président à vie en 1851. Entre deux présidences, il est vice-président en 1848-1849 et 1850-1851, alternant ainsi avec son ami Jean-Charles de Grégory* qui fut nommé secrétaire perpétuel en 1851. Président également en 1850 de la Société d’Éducation.

 En 1855, âgé de 86 ans, veuf depuis 13 ans et ayant perdu ses deux enfants, il meurt à Lyon 2 montée du Chemin-Neuf, le 31 juillet. Des hommages lui sont rendus sur sa tombe par Paul Sauzet* au nom de l’Académie et par Charles Fraisse* au nom de la Société littéraire. A la séance de rentrée de la Cour, le 3 novembre, Cl. Grandperret* prononça son éloge.


Académie

Menoux est nommé membre ordinaire de l’Athénée (classe des belles-lettres), lors de l’assemblée constitutive de l’Athénée convoquée le 13 juillet 1800 par le préfet Verninac*. Il occupe le fauteuil 1, section 3 Lettres, lors de la création des fauteuils en 1847. Le 25 décembre 1848, il prononce l’éloge de Vincent Reyre*. Président de la section des lettres en 1846 et 1847. Président de l’Académie en 1853, son discours d’ouverture le 21 juin n’a pas été conservé.

Bibliographie

Paul Sauzet, Discours prononcé sur sa tombe au nom de l’Académie, MASBLA, Lyon 1854-1855. – Charles Fraisse, Discours prononcé sur sa tombe au nom de la Société littéraire, Lyon 1855, p. 246. – Edme Martin-Daussigny, Notice sur Louis Menoux, RLY 2, n° 11, 1855, p. 246-278. – A. Brun, Notice nécrologique sur M. Louis-François-Marie Menoux, ancien président de la Société d’Éducation (lue en séance publique, le 30 juillet 1857), Lyon : Brun, 1858, 15 p. – Melvil Glover, Catalogue complet des jugements entendus par la Commission révolutionnaire, Lyon : Bellon, 1869. Abbé Ad[rien] Vachet, Nos Lyonnais d’hier, Lyon : s. d. [ca 1910]. – A. Dubreuil, Les anciens bâtonniers à Lyon, Lyon : Rey, 1914. – R. Hême de Lacotte, Une figure préfectorale sous la Restauration : le comte Albert de Lezay-Marnesia, préfet du Rhône, 1817-1822, mémoire de maîtrise, Université Lyon III, 2003.

Manuscrits

Un grand nombre de précis, de plaidoyers et de mémoires sont signalés par Dumas, mais non énumérés. Dans ses Essais de nomenclatures lyonnaises, municipales et autres, de 1800 à 1865 (Lyon : Libr. Thibaudier et Boin, mars 1866, 4e partie, p. 102), A[lphonse] Hodieu signale qu’il « existe à la bibliothèque des avocats de Lyon, une volumineuse collection de mémoires, factums, premiers et derniers mots judiciaires, répliques, etc., réunis et reliés par les soins de l’un de ceux qui entrèrent à l’Académie en 1800, M. Menoux, décédé titulaire en 1855 ». C’est probablement ces recueils auquel fait allusion Léopold Niepce lorsqu’il indique que la bibliothèque des avocats de Lyon possède, sous le titre de Mélanges, une collection importante des mémoires judiciaires de Menoux, qui compte au moins trente volumes.

Avec Achard-James* et Boullée*, Rapport sur les ouvrages de M. Lacuisine candidat, 15 août 1845 et 17 février 1846, Ac.ms279 II pièces 48 et 49. – Avec Grandperret* et Bouillier*, Rapport sur la candidature de l’abbé Dauphin, 22 février 1847, Ac.Ms279 II pièce 66. – Avec Grégory, Rapport sur la candidature de M. Eichhoff, 16 août 1847, Ac.Ms279 II pièce 72.

Publications

Plaidoyer pour M. Armand de Soulages, héritier bénéficiaire de M. de Vaux, contre M. Jourda de Vaux-du-Rouiller, en présence des intervenants [spoliation d’héritage], Lyon : Impr. Pelzin & Drevon, 1810. – Tribunal civil de Lyon [...] : affaire de la Guillotière : mémoire pour le sieur Combalot, défendeur ; contre l’administration des Domaines, demanderesse, Lyon : Impr. D.L. Ayné, s.d. [1829]. – En collaboration avec J. Guerre[-Dumolard]*, Mémoire pour le commerce de l’arrondissement de St-Étienne, département de la Loire, contre la Compagnie des concessionnaires du canal de Givors [16 nov. 1821], Lyon : Impr. J. B. Kindelem, 1821. – Opinions sur la question des eaux potables, émises dans les séances (du conseil municipal) des 19 et 23 novembre 1844, Lyon : Nigon 1844.

Sa bibliothèque, vendue le 11 février 1856 a fait l’objet d’un catalogue de 82 pages (Lyon : A. Brun, voir Léopold Niepce, « Les bibliothèques de Lyon », RLY 3, n° 20, 1875, p. 28.