Jean Jacques François Coignet est né à Lyon 3e, 13 cours Bourbon (act. cours de la Liberté), le 13 mai 1855, fils d’Étienne, dit Stéphane, Coignet (Saint-Étienne 6 août 1820-Lyon 3e 1er novembre 1866) et de Jeanne Pauline Bizot (Collonges 7 janvier 1830-Lyon 3e 4 février 1899). Il est le neveu du professeur de médecine et de chimie Alexandre Glénard*, qui avait épousé Emma Coignet (1821-1806), sœur d’Étienne (Stéphane). Orphelin de son père à 11 ans, il fait de brillantes études secondaires au lycée impérial de Lyon. À 18 ans il obtient le 2e prix de mathématiques au Concours général. Titulaire d’une licence de mathématiques, admis à Polytechnique en 1874, il suit les cours de l’École Nationale des Mines en 1876, démissionne de cette école la même année pour intégrer l’entreprise familiale, la Société Coignet frères, spécialisée dans l’industrie des dérivés des os (colles, gélatine, phosphore, phosphates, engrais, allumettes) implantée à Lyon et à Saint-Denis.
L’arrière-grand-père Claude François Coignet (Saint-Étienne, 1757-1798), armurier à Saint-Étienne, avait épousé Anne Pitiot fille d’un droguiste de Brignais, Jean François Pitiot. Leur fils, Jean François Coignet (1793-5 mars 1846), élevé dans sa famille maternelle, entré comme commis dans une droguerie à Lyon, épousa le 11 mai 1813 Élisabeth Dupasquier (1797-1828), fille de feu Joseph Denis Dupasquier (1762-1805) et de Françoise Glénard (1764-1832), qui tenait cette droguerie fabriquant de la colle et de la gélatine. Jean François créa tout d’abord une droguerie à Saint-Étienne, puis s’associa avec sa belle-mère et ses deux beaux-frères pour créer à Saint-Rambert-l’île-Barbe la « Maison Vve Dupasquier et Fils » qui fabriquait de la gélatine et de la colle extraite des os, selon un procédé inventé par d’Arcet qui avait déposé un brevet le 14 janvier 1814, et que Coignet améliora en déposant ses propres brevets le 23 octobre 1818. Ces produits étaient utilisés pour apprêter les étoffes. L’entreprise, transférée en 1828, chemin de Baraban (commune de la Guillotière), élargit son champ d’activité en fabriquant du noir animal et des sels ammoniacaux, sous-produits de la fabrication de la colle. Elle devient la société Coignet et fils avec l’entrée en 1837 des fils de Jean-François, François (11 février 1814-1888), ardent fouriériste, Louis né en 1819, et Stéphane, le père de Jean. En 1844, elle produit pour la première fois à Lyon du phosphore blanc pour allumettes provenant des os de gélatines, ainsi que du chlorate de potasse, des cyanures ferrurés et, en 1850 (après la mort de Jean François en 1846), du prussiate jaune de potasse issue des déchets de cornes et de peaux. François crée en 1851 à Saint-Denis une autre usine de produits chimiques. Pour sa construction, il imagine un béton aggloméré et armé de mâchefers. Cette réussite l’incite à fabriquer des matériaux nouveaux de construction, à déposer des brevets en 1854, et à créer à Saint-Denis une seconde usine de matériaux de construction. En 1854, les Coignet acquièrent d’Albright tous ses droits au brevet d’invention de 1851 pour la transformation du phosphore ordinaire en phosphore amorphe. Stéphane achète en 1856 un brevet suédois Lundström pour fabriquer des allumettes Les trois frères rachètent l’usine Sauveton, route d’Heyrieux (act. avenue Paul Santy, 8e). François reprend toutes les activités à la mort de ses frères Stéphane et Louis, qui ont donné leur nom à deux rues de Lyon (respectivement 8e et 3e arrt). La manufacture d’allumettes est nationalisée en 1871, mais la Société Coignet reste l’unique fournisseur de phosphore. François crée à Lyon et à Saint-Denis des usines de fabrication d’engrais à partir des phosphates et superphosphates de chaux.
Jean, neveu de François, dirige l’usine d’engrais de Saint-Denis à la sortie de ses études en 1876, devient directeur commercial de l’ensemble en 1881, responsable des usines de Lyon en 1882, crée un comptoir de vente à Londres et succède à son oncle en 1888 comme président du conseil d’administration. Il fait aussi produire du phosphore moulé, du phosphure et du sesquiphosphure de cuivre et de l’acide phosphorique. En 1914, la société Coignet, absorbe la société Mital et Laprévote qui lui apporte deux nouvelles usines à Givors et à Saint-Fons, puis en 1919, la société belge Hasselt et Vilvorde. Jean Coignet ne quittera son poste qu’en 1935 à l’âge de 80 ans. La Société des Produits chimiques Coignet a été absorbée au début des années 1960 par le groupe Kuhlmann...
Président du conseil d’administration des Houillières de Montrambert (1920), administrateur de la Compagnie du gaz à Lyon (1902), de la Compagnie des produits chimiques de Roche-la-Molière (1924), de la Banque de France, président du conseil d’administration de la Société lyonnaise de dépôts et de comptes courants (1927).
Conseiller du commerce extérieur, sa nomination comme président de la Chambre de commerce de Lyon en 1911 marque l’émergence de l’industrie chimique à Lyon (auparavant, cette fonction était traditionnellement dévolue à un « soyeux »). C’est pendant son mandat, qui dura jusqu’en 1921, qu’est inaugurée en 1916, en pleine bataille de Verdun, la première Foire de Lyon, présidée par Achille Lignon, alors qu’Édouard Herriot* était maire, destinée à concurrencer celle de Leipzig. Jean Coignet marqua surtout un grand intérêt pour les problèmes de navigation (membre du Comité consultatif de navigation du ministère des Travaux Publics). La construction du pont de l’Université et le projet du port Rambaud réalisé en 1924 lui doivent beaucoup. Il présida la Société d’Économie politique de Lyon, l’Association d’Expansion Economique ainsi que les conseils d’administration de l’École de chimie industrielle de Lyon et de l’École centrale Lyonnaise.
Politiquement proche d’Édouard Aynard*, Jean Coignet est élu le 11 janvier 1920 sénateur du Rhône (399 voix sur 761 votants), et siège à la Fédération Républicaine présidée par Louis Marin. Il se montre très actif, ses interventions sur l’économie sont trop nombreuses pour être citées : on les trouvera dans le Dict. des parlementaires de Jean Jolly. Il prêche notamment en faveur de l’aménagement hydro-électrique du Rhône. Au renouvellement du 9 janvier 1927, il n’est pas réélu (296 voix sur 744 votants). Il a habité successivement 31, puis 12 quai des Brotteaux (act. quai Général-Sarrail).
Officier de la Légion d’honneur (LH/561/25) et officier de la Couronne d’Italie (1905).
Il est mort à Lyon 6e le 20 avril 1947 et a été inhumé à Loyasse (Hours 193).
Il avait épousé à Lyon 1er le 7 janvier 1882 Marie-Louise Lombard-Morel, née à Saint-Vallier le 1er juillet 1861, fille de Léonce Marc Gabriel Lombard-Morel, notaire, et de Marie Albine Brosset (devenant ainsi plus tard le beau-frère d’Augustin Chomel*, qui épousera en 1888 Suzanne Lombard-Morel). D’où plusieurs enfants, dont Gabrielle (1882), épouse du docteur André Favre-Gilly ; Marie Julie (1886), épouse de Joseph Tresca, directeur de Tresca frères & Cie à Vizille.
Candidat le 7 février 1905, il est élu le 8 mai, sur un rapport du comte de Sparre*, au fauteuil 3, section 1 Sciences, succédant à Jean Alfred Léger*. Il sera plusieurs fois sollicité pour la présidence, mais refusera toujours en raison de ses nombreuses occupations industrielles et politiques. Émérite en 1946.
Son éloge a été lu à Saint-Pothin le 23 avril et à l’Académie le 29 avril 1947 par Jean Thibault*.
C. E. Curinier, Dict. national des contemporains, p. 136. – notice P. Faure DBF. – Michel Laferrère*, « Les industries chimiques de la région lyonnaise », Rev. Géog. Lyon, 1952, p. 219-256.
Une plaquette rectangulaire uniface à son effigie, gravée par Charles Pillet, lui a été offerte en 1924 : elle rappelle sa présidence de la chambre de commerce de Lyon et offre une vue du Port Rambaud dont l’aménagement avait été décidé au début de son mandat.
Il a rédigé un grand nombre de rapports pour la chambre de commerce, dont certains ont été publiés : 1896, Étude sur le projet de canal de Marseille au Rhône ; 1898, Rapport sur la gare d’eau de Perrache ; 1899, travail sur La question des Houilles ; 1900 et 1901, Rapport sur la loi relative au travail dans les manufactures ; 1901, Étude sur le trajet du Simplon ; 1903, Rapport sur les législations des chutes d’eau ; 1903, Rapport sur l’impact de main-morte ; 1904, travail sur Les raccordements entre la voie ferrée et la navigation.
Travaux de la Chambre syndicale, 1873-1893 :
Notice historique sur l’industrie des produits chimiques à Lyon, Lyon : impr. Salut public, 1894. – De l’Absorption de l’azote par les végétaux (lu àla SAHAL, séance du 16 novembre 1888), Lyon : Pitrat aîné, 1889. –Histoire de la maison Coignet, 1818-1900, in Exposition universelle 1900, Lyon : Rey, 1900. – Proposition de loi sur le contrat d’apprentissage, Rapport Chambre de commerce de Lyon, séance du 6 juillet 1905, Lyon : Rey. – Législation des chutes d’eau. Rapport Chambre de commerce de Lyon. Séance du 13 septembre 1906, Lyon : Rey. – Projet de loi relatif àla réglementation du travail. Rapport Chambre de commerce de Lyon. Séance du 21 mars 1907, Lyon : Rey. – Rapport sur l’industrie des produits chimiques, C R Travaux Chambre de Commerce de Lyon, 1907, Lyon : Rey, 424 p. – L’aménagement du Haut-Rhône, Genève : Wyss & Duchêne, 1914.