Jean François Legendre naît le 21 janvier 1796 « maison Caffarel, rue du Courrier » à Montpellier. Témoins : Jean Michel Falque, commis au bureau des postes, grand-père maternel ; Jean Louis Michel Dusiquet, collègue du grand-père et beau-frère du père. Le grand-père paternel, Marie Louis François Xavier Legendre est Lieutenant-commandant au château d’If de la Ville de Marseille lors du mariage de son fils, Étienne Louis, et il était officier des vétérans nationaux quand il est décédé le 20 janvier 1797 à Montpellier, à l’âge de 74 ans.
Étienne Louis épouse Jeanne Falque le 7 février 1793, en l’église Saint-Paul de Montpellier. De ce mariage naissent Étienne Louis Jean (28 décembre 1792), et Jean François qui n’a que 18 mois quand son père décède en 1797. Jeanne Falque, âgée de 23 ans, se remarie à Montpellier le 9 juillet 1798 avec un musicien, Pierre Héral, 28 ans, également veuf. Le couple a une fille, Anne Louise Michelle, née à Montpellier le 4 juillet 1802. Quand celle-ci se marie à Lyon le 18 février 1829 avec le fils d’un médecin, Jean Gaspard Dittmar, Pierre Héral se déclare professeur de musique à Beaujeu. Les raisons et la date précise du déplacement de la famille à Lyon sont inconnues.
Jean François Legendre entre en 1810, à 14 ans, à l’école spéciale des arts de dessin de Lyon, où il suit les cours de Revoil* et de Chinard*, auquel succède en 1813 Joseph Charles Marin. Dès 1817 Jean François commence à exposer à Paris des ouvrages en plâtre : Amour endormi, Hébé, Narcisse se mirant dans l’eau. Il signe dès lors ses œuvres Legendre-Héral, sans doute comme on l’écrit, en hommage à son beau-père, mais peut-être aussi pour se distinguer d’un autre artiste contemporain, le peintre paysagiste parisien Louis Félix Legendre (né en 1794), élève de David. Marin ayant donné sa démission, Legendre-Héral, sur proposition du maire le baron Rambaud, est nommé le 1er juillet 1818 pour lui succéder, à 23 ans. Au Salon parisien de l’année suivante, son Jeune lutteur lui vaut une médaille d’or. Son Eurydice présentée au salon de 1822 est jugée trop belle par les critiques qui laissent clairement entendre qu’il pourrait avoir moulé ses œuvres sur nature. Son ami Victor Orsel lui conseille de faire « pour le salon prochain, une figure d’homme au moins de 7 pieds, et de la mouler à creux perdu, condition que les sculpteurs de Paris exigent » (Journal des beaux-arts et de la littérature, 15 janvier 1842, « Biographie des artistes, Legendre-Héral statuaire », p. 261). Ayant peu d’élèves, Legendre-Héral obtient du maire de Lyon l’autorisation d’aller « perfectionner son art » aux frais de la ville et en conservant son traitement, une année à Paris et une année à Rome, prenant en retour l’engagement « de professer la sculpture à Lyon au moins pendant dix années ; de faire, au choix de la ville et pour elle, deux statues en marbre sous la condition que la Ville lui fournira le marbre et fera les frais d’ébauche. » (Birot, p. 9, n. 1). Quand il revient à Lyon en 1824, Legendre-Héral a 28 ans : « D’une figure agréable et régulière, d’une taille bien prise, il avait dans ses manières une distinction innée qu’il portait en toutes choses et qui n’avait rien de factice […], mais son plus grand attrait était son âme profondément sympathique et cet esprit conciliant qui lui permettait de compter des amis dans tous les camps » (Alfred Nettement). Jean-François Legendre, demeurant avec sa mère rue Saint-Polycarpe, se marie à Lyon le 25 février 1824 avec Aricie Louise Marie Gertrude Wable (Ravenstein [Brabant] 8 août 1799-3 rue Mazarine, Paris 17 mars 1878), fille de Jean Chrysostôme Wable (Avesnes-sur-Helpe [Nord] 4 avril 1772-Lyon le 21 février 1837, inhumé à Loyasse), directeur des contributions directes du Rhône, et de Louise de Meuse (Grave [Pays-Bas] 1773-Régnié-Durette 1868) ; Pierre Revoil* est son témoin, tandis que le nom de Pierre Héral n’apparaît pas. Le sculpteur reprend l’enseignement et il a pour élèves notamment Bonnassieux, Bonnaire, les frères Hyppolite et Paul Flandrin. Au plus fort de sa gloire lyonnaise, il reçoit le 9 août 1837 la Légion d’honneur. Mais ses convictions légitimistes commencent à lui faire tort, et en désaccord avec le peintre Bonnefond, directeur de l’école des Beaux-Arts, il démissionne de son poste d’enseignant en 1839 pour s’installer à Paris, rue de l’Ouest (14e). La famille connaît des jours difficiles avant que le ministre des Beaux-arts, en reconnaissance du talent de l’artiste, lui fasse attribuer un appartement à l’Institut de France (où son épouse pourra rester jusqu’à la fin de sa vie), et un atelier dans l’île des Cygnes. En dépit de quelques commandes officielles, il peine à s’intégrer dans le milieu parisien, se voit refuser l’entrée à l’Académie des beaux-arts, et miné par des chagrins personnels et une santé défaillante, il décède le 13 septembre 1851 dans la maison de campagne de Marcilly (Seine-et-Marne), qu’il avait acquise en 1849. Il est inhumé dans le cimetière communal. « On plaça sur la tombe de celui qui avait décoré des œuvres de son art de magnifiques mausolées, une simple colonne de marbre noir, de trois mètres de hauteur avec cette courte inscription : CI GIT / J.F. LE GENDRE-HÉRAL / STATUAIRE / NÉ À MONTPELLIER LE 3 JUILLET 1795 [sic] / MORT À MARCILLY LE 13 SEPTEMBRE 1851. » (Alfred Nettement).
À Lyon, Jean-François Legendre a habité successivement rue Saint-Polycarpe, avec sa mère, puis quai d’Angoulème (act. quai Gailleton). Le 27 février 1828, il achète un terrain quartier Perrache et demande à Louis Gaspard Dupasquier* de lui faire les plans d’une maison, que la famille va occuper de 1831 à 1839 (12 cours Charlemagne) : « La façade, précédée d’un perron orné de quatre colonnes, était surmontée d’un attique décoré de bas-reliefs ; le tout entouré d’un jardin, avait fort bel air » (Birot). En 1834, il y avait fait ajouter un atelier (recensement). L’ensemble a été démoli en 1855 quand la gare de Perrache a été construite. De son mariage avec Aricie Wable, Jean-François Legendre a eu trois enfants : Jeanne Lucie Louise, née le 19 avril 1825, mariée le 5 février 1845 à Paris à son oncle Joseph Wable (Bois-le-Duc, Brabant 11 février 1811-Marseille 11 mars 1874, frère de sa mère, percepteur des contributions directes), est décédée à Paris 10e, le 1er mai 1846, après avoir donné naissance le 19 avril précédent à Charles Emile Lucien Jean Joseph Wable (décédé à Barbizon le 9 octobre 1908), qui sera architecte. Louise Pauline, seconde fille, née le 6 avril 1827 cours d’Angoulême, est décédée le 10 août 1831. Charles Joseph Guillaume Émile (le général Le Gendre), né à Oullins le 26 août 1830 – le témoin et probable parrain étant Charles Guillaume Joseph Wable (1804-1878), son oncle –, qui a servi de modèle pour le Giotto enfant (bronze du jardin du musée des Beaux-arts) a eu une vie des plus romanesques, à commencer par son mariage à Bruxelles le 31 octobre 1854 avec une riche héritière américaine, Clara Victoria Mulock rencontrée fortuitement dans un des musées de la ville : parti avec elle aux USA, il mène grand train, puis en 1861 s’engage dans la Guerre de Sécession, où il est blessé à deux reprises (il a le nez arraché), et finit général de brigade en 1865 ; en 1866, il part comme consul en Chine (Amoy, act. Xiamen), en décembre 1872, il devient conseiller aux affaires étrangères et aux affaires militaires du Japon dont il a été le premier étranger honoré de l’Ordre du Soleil levant (et où il s’est marié sans avoir divorcé, et où il a eu trois enfants), et termine sa carrière en Corée où il décède le 1er septembre 1899 ; il a été inhumé dans le cimetière des étrangers à Séoul (Bonnassieux, « Souvenirs lyonnais. Le modèle du Giotto enfant de Legendre-Héral », RL 5, 1886, p. 354-363). Il a publié plusieurs ouvrages sur l’Asie, a laissé de nombreuses notes (Division des manuscrits, Bibliothèque du Congrès, Washington, DC) et avait réuni une magnifique collection de porcelaines et de jades.
Jean François Legendre-Héral pose sa candidature dès 1825, en offrant la maquette de sa statue Léda. Sur rapport de Fleury Richard* (Ac.Ms159 f°387), il est admis le 24 juin dans la classe des belles-lettres et arts. Il prononce son discours de réception le 26 juin 1827*, De l’imitation de la nature dans les arts. Il fait partie avec Artaud et Cochet* de la commission chargée de la création du jeton de présence, dont la conception est confiée au graveur André Galle : mais ils rejettent son projet en juillet 1825. « M. Legendre-Héral a quitté Lyon depuis plusieurs années sans esprit de retour. La place de cet académicien dans la section des belles-lettres et arts est déclarée vacante » (registres, 14 déc. 1841).
Journal des beaux-arts et de la littérature, « Biographie des artistes, Legendre-Héral statuaire », 15 janvier 1842, p. 261. – D. M. Pointe, « Artistes lyonnais contemporains, Legendre-Hérald » [sic], RL, 1840, p. 483-490. – Alfred Nettement, « Legendre-Héral», La Semaine des Familles, 9 et 16 janvier 1864, p. 226-229 ; 248-251. – Joseph Birot, Legendre-Héral sculpteur lyonnais, 1796-1851, étude biographique, discours de réception à l’Académie le 15 mars 1910, Lyon : Rey, 1910. – A. Roman d’Amat, DBF. – Gérard Corneloup, DHL.
Document relatif à l’Histoire de l’Académie de Dumas (Ac.Ms270 f°180). – Rapport sur la candidature de M. Léopold de Ruolz, 21 juillet 1835 (Ac.Ms279-III pièce 15). – Richard*, Rapport sur une statuette présentée par M. Legendre-Héral (Ac.Ms159 f°387).
Jean François Legendre-Héral a été un artiste très prolifique. Élève préféré de Chinard, il en reprend le style néo-classique : « C’est peut-être plus qu’un style à proprement parlé, cet effet d’écho entre deux aspects, simplicité des plans et grâce des expressions, affirmation des structures et nuance extrême des volumes, qui est la marque de son enseignement et de la postérité qu’on peut lui chercher dans ses meilleurs élèves : ne retrouve-ton pas ce balancement chez Legendre-Héral, de Jeanne d’Arc (1820), d’Eurydice (1822) ou de Giotto (1838) au Monument au général Joubert (1832, Pont-de-Vaux) ou au Président de Harlay (1842, Versailles) » (Catherine Chevillot, « La sculpture à Lyon au xixe siècle, école ou ÉCOLE ? », Le temps de la peinture Lyon 1800-1914, MBAL, Lyon : Fage, 2007, p. 150). On trouvera une liste importante (mais non exhaustive) de sa production dans Audin et Vial, et dans le catalogue dressé en fin d’article par son petit-neveu par alliance Joseph Birot*. Parmi les plus importantes productions lyonnaises, citons : Léda, Eurydice, marbres, 1821, MBAL. – Henri IV, statue équestre en haut-relief, tympan de l’Hôtel-de-ville, 1829. – Saint Jean, Saint Paul, statues, marbre, église Saint-Irénée, 1828. – Saint Just, Saint Irénée, statues, calcaire, église de Saint-Just, 1828. – Chenavard, buste, marbre, 1829, MBAL. – Jussieu, Gilibert, Poivre, Coustou, Pernon, bustes, marbre, 1834, 1836, 1837, MBAL. – Giotto enfant, bronze, 1838, MBAL. - Minerve pacifique, marbre, 1840, musée des beaux-arts. – Il faut également mentionner les œuvres du cimetière de Loyasse : les tombes Wable (buste de son beau-père, 1837), Pinet, Riboud, Monnier, Forest, Gaillard, toutes en collaboration avec Chenavard* (Hours). Son dernier travail a été le fronton de l’école supérieure des mines de Paris, qu’il n’a pas pu achever.