D’une famille de paysans et de vignerons, Antoine, dit Marius, Audin est né à Beaujeu (Rhône)le 5 février 1872, huitième enfant de Pierre Odin (Les Étoux, commune rattachée en 1833 à Beaujeu, 29 décembre 1827-9 janvier 1891), qui a signé Audin, propriétaire quartier de l’hôpital, tonnelier et plus tard marchand de nouveautés, et d’Antoinette Bost née à Beaujeu le 18 octobre 1835, couturière, épousée le 5 novembre 1856 ; présents à la déclaration : Antoine Audin, propriétaire, 27 ans, et Jean Marie Audin, 38 ans. Il est prénommé Antoine, prénom d’un frère né le 15 mars 1868 et qui vient de mourir le 1er avril 1871, mais il sera toujours appelé Marius.
Après de modestes études chez les Maristes et un bref emploi de commis chez un notaire de Beaujeu, Marius se rend à Lyon à l’âge de 20 ans avec sa mère, devenue veuve. Classé dans les services auxiliaires de l’armée, domicilié 10 rue de la Gare à Villeurbanne, il épouse à Villeurbanne, le 2 décembre 1893, Marie Rosalie Cherpin (Quincié 19 janvier 1873-Lyon décembre 1944), fille de feu Amable Cherpin et de Pierrette Marie Santallier. Naîtront deux fils, Maurice (24 mars 1895-7 mai 1975), et Amable* (26 juillet 1899-25 janvier 1990), collaborateurs et dignes successeurs de leur père.
Marius est commis-greffier au tribunal de commerce en 1892. Il habite 110 route de Genas, Lyon 3e, puis 68 place Guichard en 1899. Passionné de botanique et de géologie depuis l’enfance, il fréquente assidûment la bibliothèque du Palais des Arts où le conservateur, Jean-Baptiste Saint-Lager*, savant naturaliste, le remarque et l’encourage à publier dans les Annales de la Société botanique de Lyon (il en sera membre, puis secrétaire général jusqu’en 1903) et dans le Bulletin de l’Association française de botanique. L’imprimeur Alexandre Rey lui confie en 1906 la direction de la Gazette judiciaire. Il accumule les fiches, s’intéresse à la géologie et de plus en plus à l’histoire, et il publie sur ses pays d’enfance et d’adoption, le Beaujolais et Lyon. En 1908, il est domicilié 20 rue de la Bibliothèque, Lyon 5e. Il fonde une Société d’histoire naturelle, La Ségusia, qu’il animera presque seul, et qui ne durera que dix mois. En 1909 il passe aux Petites Affiches, composées chez Decléris, qu’il dirigera jusqu’en 1912. Il s’oriente alors vers des études historiques, et publie deux ouvrages indispensables pour les études lyonnaises et les historiens de l’art, la Bibliographie iconographique du Lyonnais en 1909-1913, et en 1918-1919 avec Eugène Vial*, à la demande de la Bibliothèque Doucet (Paris), le Dictionnaire des artistes et ouvriers d’art du Lyonnais. Il organise la section des beaux-arts de l’Exposition internationale de 1914.
Il multiplie les initiatives : en 1917, direction de la « Collection des Amis du Vieux Lyon » chez Cumin et Masson, quatorze volumes dont quatre écrits par lui ; en 1918, fondation d’un « Groupement d’études locales » avec une revue mensuelle « Les lectures » et projet d’une maison d’édition ; en 1919, ouverture d’une galerie d’exposition rue Gasparin, la « Galerie des Deux-Collines ». En mars 1919, l’acquisition de l’imprimerie Decléris, 3, rue Davout, entre le Rhône et le cours de la Liberté, marque un tournant décisif. Après la rencontre en 1920 de Robert Laurent-Vibert, riche industriel passionné d’art et de culture (mort dans un accident de voiture en 1925), l’imprimerie Audin devient le centre de rencontres intellectuelles et artistiques. Marius Audin, entouré de créateurs et d’illustrateurs – Combet-Descombes*, Touchagues, Brouillard, Bouquet, Chièze… –, multiplie les publications de qualité pour divers éditeurs, Crès, Jonquières, Arcos. Le maître-imprimeur est à l’apogée de son œuvre. Avec Laurent-Vibert, il publie les Causeries typographiques en 1921-1922, et relance la Revue du Lyonnais disparue depuis vingt ans ; elle tiendra jusqu’en 1925 (la tentative d’une Nouvelle Revue du Lyonnais en 1932 sera un échec). En 1923, il rend hommage à ses prédécesseurs lyonnais du xvie siècle dans l’exposition consacrée à Louis Perrin, à l’Hôtel de ville. Il consacre ses études et ses nombreuses publications à l’histoire des arts graphiques. Il les poursuit après 1930 alors que la crise économique ramène l’imprimerie à une activité plus ordinaire, laissant progressivement la conduite de l’entre-prise à ses deux fils. Pendant l’occupation allemande, Marius est arrêté quelque temps par la Gestapo pour avoir servi de boîte aux lettres pour la Résistance. À cette époque son intérêt se reporte vers le pays de ses origines. En 1943, il remet à la ville de Beaujeu les clés d’un « Musée cantonal » qui rassemble ses collections d’objets de la vie locale au xixe siècle. C’est aujourd’hui le Musée des traditions populaires Marius Audin.
Marius Audin, membre de l’Association française pour l’avancement des sciences, est admis à la Société littéraire, historique et archéologique en 1908. L’Académie des Pierres plantées le reçoit le 15 janvier 1922 sous le pseudonyme de Toussaint d’Esquevilles.
« Chercheur infatigable, collectionneur passion-né, tout imprégné d’érudition humaniste », Antoine Marius Audin, est mort le 15 janvier 1951 à son domicile, 3 rue Davout Lyon 3e ; son décès est déclaré par Régis Neyret*, 23 ans, employé, 39 quai Gailleton. Il est enterré au nouveau cimetière de Tassin-la-Demi-Lune, avec son épouse et ses fils. Le 18 juin 1956 le nom de Marius-Audin est attribué à la rue Davout, hommage amplement mérité selon le maire Édouard Herriot*.
Marius Audin et ses deux fils – imprimeurs, typographes, écrivains – ont marqué la vie intellectuelle lyonnaise pendant trois quarts de siècle. Trois autodidactes, travailleurs infatigables, curieux insatiables, indépendants de caractère, désintéressés, qui ont été tour à tour créateurs d’un musée : Marius à Beaujeu, Maurice (musée de l’imprimerie 1964) et Amable (musée gallo-romain 1975) à Lyon.
Mathieu Varille* présente Marius Audin le 28 mai 1946 (Ms. au musée de l’Imprimerie de Lyon). Il est élu le 4 juin 1946 au fauteuil 4, section 4 Lettres. Le 25 janvier 1949, malade, il communique son discours de réception : « Les Dejussieu imprimeurs », qui est lu par Claudius Roux* à la séance du 28 juin 1949. Cette même année, il passe à l’éméritat.
Bernard Berthelot, « Une famille du Beaujolais : les Audin », Généalogie et Histoire, décembre 1990, p. 26. – Paul Duvivier, « Marius Audin », Le Tout Lyon, 25 janvier 1951. – Mathieu Varille, « Marius Audin », La Vie lyonnaise, 27 janvier 1951, p. 11-12. – Thesaurus amicorum, Marius Audin, par 17 auteurs (avec bibliographie générale), Lyon : M. Audin, 1952, 265 p., 18 pl. – Henri Hours, « Un imprimeur lyonnais, Marius Audin », Rive Gauche 58-59, 1976, p. 9-12 et 9-11. – Henri Hours, « Les trois Audin », Rive Gauche 125, 1993, p. 23-24. – Régis Neyret, Les trois Audin, Lyon, 1993, 18 p. – Alan Marshall, « Marius Audin, Stanley Morison et la publication des Livrets typographiques et de la Bibliographie des De Tournes », Bull. Bibliophile, 1994/1992, Paris. – Alan Marshall, « Marius Audin : un imprimeur-érudit de l’entre-deux-guerres », p. 7-40, dans Impressions de Marius Audin, Lyon, Musée Imprimerie et Banque, Lyon, 1995, 64 p. – Henri Hours, Les Audin (Ms, dédié aux membres de l’Académie du Gourguillon), Lyon, 2000, 18 p.
Discours de réception : Les Dejussieu imprimeurs (dossier Académie). – Musée de l’imprimerie de Lyon, Fonds Audin. – Le Thesaurus amicorum cité en bibliographie se termine par une bibliographie générale de Marius Audin, classée par thèmes. Sont cités 48 manuscrits dont : Histoire de l’outillage agricole dans l’agriculture beaujolaise (33 opuscules) ; neuf monographies de paroisses, églises et histoire du Beaujolais ; une suite de la Bibliographie iconographique du Lyonnais imprimée (sur fiches) ; onze biographies particulières ; préparation des volumes 3 à 20 de la Somme typographique.
La bibliographie du Thesaurus amicorum mentionne 163 publications, dont :
1. 47 articles de botanique, les plus nombreux dans les Ann. Soc. Bot. Lyon, dont : « Les centaurées du Beaujolais », 1895. – « Additions à la flore du Beaujolais », 1896. – « Les plantes calcicoles du Haut-Beaujolais », 1898, 8 p. – « Recherches sur la distribution du sapin en Lyonnais et en Beaujolais », 1902 ;
2. 44 numéros pour l’histoire locale, la bibliographie et les biographies ;
3. 67 numéros pour l’histoire des arts graphiques et de la papeterie.
On citera : – Essai sur la géographie botanique du Beaujolais, Villefranche : Mercier, 1903, 120 p. – Essai de bibliographie beaujolaise, Villefranche : Mercier, 1906, 128 p. – La bazoche et les clercs du Palais, Lyon : Decléris, 1909, 96 p. – Bibliographie iconographique du Lyonnais, cinq fascicules avec Portraits, Lyon : Rey, 1909, 215 p. – Plans et vues générales, Vues particulières, 1910-1913, 152 p. – Claude Séraucourt graveur (1677-1756), Lyon : Rey, 1914. – La Maison de ville de Lyon et ses transformations successives depuis l’année 1646, Lyon : Cumin et Masson, 1914, 63 p. – La Loge du Change de Lyon, Lyon : Cumin et Masson, 1917, 166 p. – La vie des livres, Lyon : Cumin et Masson, 1917. – Voyage de Lyon à Nostre Dame de l’Isle (calligraphie Audin, décors Combet-Descombes*), Lyon, 1918. – Nos vieux moulins du Rhône, Lyon : Cumin & Masson, 1918, 110 p. – Légendes et contes du Beaujolais (ill. par Combet-Descombes), Lyon : Cumin et Masson, 1918, n.p. – La légende Roland, Lyon, 1918. – Le confluent du Rhône et de la Saône, Lyon : Cumin et Masson, 1919, 113 p. – Avec Eugène Vial*, Dictionnaire des artistes et ouvriers d’art de la France : Lyonnais. Paris : Bibl. Art et Archéol., 2 vol. 1918-1919, 521+370 p. – L’hôtel de ville de Lyon, Lyon : Les Deux Collines, 1921, 62 p. – « Perrin, imprimeur », RLY 4, 1921, p. 505‑522. – « Guillotière et Brotteaux », RLY, 1923, p. 205‑206. – L’hôpital n° 31 à l’Hôtel de Boissac, Lyon : Audin, 1923, 68 p. – Le livre, sa technique et son architecture, Lyon : Cumin et Masson, 1921 ; puis Paris : Crès, 1924, XVI+280 p. ; rééd. 1969. – Impressions de Louis Perrin et quelques livres lyonnais du xvie siècle, Lyon, 1923, 204 p. – L’imprimerie à Lyon, RLY 9, 1923, p. 1-122. – « Les Jean de Tournes, imprimeurs lyonnais », RLY, 1924, p. 5-43. – Lyon sur le Rhône, Lyon : Pierre Masson, 1924, 95 ill. – Avec Laurent-Vibert, Les marques de libraires et d’imprimeurs en France aux xviie et xviiie siècles, Paris : Champion, 1925. – Essai sur les graveurs de bois en France au xviiie siècle, Paris : Crès, 1925, 192 p. – Le livre, son illustration, sa décoration, Paris : Crès, 1926. – Le Beaujolais, Lyon : P. Masson, 1926. – Le « Thesaurus Amicorum » de Jean de Tournes, Lyon : les Deux Collines, 1927, 23 p. – Histoire de l’imprimerie par l’image, Paris : Jonquières, 1928-1929, 4 vol., 126 + 105 + 110 + 13 p. – Le livre français, Paris : Rieder, 1929, 80 p. – Les étapes de la gravure sur bois, Paris : Union synd. maîtres imprimeurs, 1933, 84 p. – Avec M. Varille*, La Mustardographie Lyon : aux Deux Collines, 1935, 82 p. – Sous le signe du Rateau. Histoire de Beaujeu, Villefranche : Guillermet, 1936, 185 p. – Vieux moulins qui ne tournent plus, Villefranche : éd. du Cuvier, 1936, 98 p. – Le chapitre de Beaujeu (1064-1785), 3 vol., Villefranche : Guillermet, 1937-1938, 97 + 53 + 295 p. – L’épopée du papier, Paris : Colbert, 1944, 74 p. – Le musée folklorique de Beaujeu, Villefranche : éd. du Cuvier, 1945, 28 p. ; Guillermet, 1947, 30 p. – Somme typographique, 1, Les origines, Paris : Dupont, 1947, 238 p. ; 2, L’atelier et le matériel, Lyon : Audin, 1949, 157 p. – Les Étoux, deuxième paroisse de Beaujeu, Lyon : Audin, 1948, 73 p. – Avec M. Varille*, La Nef du parfait vinaigrier Lyon : Aux Deux Collines, 1951, 117 p.