Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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La recherche est faite par sous chaîne, insensible à la casse et aux accents.

La SERRE Jean Antoine (1736-1782)

par Denis Reynaud.

 L’abbé Jean Antoine La Serre (souvent écrit de la Serre, ou Laserre) est né à Paris en 1736 (selon Ac.Ms124 f°341 et Delandine ; Bérenger écrit 1713 dans le Journal de Paris, 1731 dans le Porte-feuille ; Hoefer dit 6 janvier 1722).

 Épuisé par l’édition d’une contrefaçon de l’Encyclopédie (voir ci-après), il meurt à Lyon le 2 mars 1782 « âgé d’environ cinquante ans » et est inhumé « dans le tombeau de la chapelle de la Sainte Vierge », à Ainay, sous le nom mal orthographié d’Antoine de Laserve.

 Après des études à Paris, il rejoint la congrégation de l’Oratoire. Il professe successivement la grammaire, les humanités et la rhétorique à Marseille, puis à Lyon, où il arrive en 1763 après la suppression des jésuites. Pendant six ans il occupe « avec éclat » au collège de la Trinité la chaire d’éloquence naguère illustrée par les P.P. Millot* et Mongez*. Il est protégé par le prince de Condé ; se lie avec Marmontel, La Harpe, Suard. Il quitte l’ordre en 1770. À une date indéterminée, il devient chanoine de Nuits, en Bourgogne.

 Au moment de sa mort il est prêtre du diocèse de Paris.


Académies

Après une tentative malheureuse en août 1773 (on lui a préféré Prost de Royer), il est admis le 16 novembre à une place de titulaire dans la classe des belles lettres, laissée vacante par le départ de l’abbé de Pusignieu*. Il prononce le 7 décembre son discours de réception : Sur la sagesse des règlements des académies qui ont substitué à l’usage de prononcer des remerciements, celui de prononcer un discours (Ac.Ms264 f°158). Le 22 juillet 1777, il introduit à l’Académie un prince « descendant du célèbre Gengiskan », qui assiste à trois séances. Il est directeur le premier semestre 1780.

Il était membre des académies de Nîmes, Dijon, Marseille, Villefranche, et de la société littéraire de Clermont.

Autres œuvres signalées par les biographes

Le Poëme lyrique, 1764, ode qui remporta un accessit à Toulouse. – Épître sur la noblesse à M. le marquis de Rochambeau. – Ode sur la prise de Mahon (1756 ?). – Stances à la Dauphine. – Discours sur le danger de préférer les talents agréables aux talents utiles. – « On lui attribue l’ouvrage sur Les inconvénients du célibat des prêtres, mais il est certain qu’il n’est pas de lui » (Ac.Ms124 f°341), mais de son confrère J. Gaudin*.

Bibliographie

Journal de Paris, 10 avril 1782, p. 398-399 (nécrologie par Bérenger ; réimpr. in Porte-feuille d’un Troubadour ou Essais poétiques de M. Bérenger, 1782, p. 117-121) et 2 août 1783, p. 885-886 (lettre de Bays). – « Épître à l’abbé de La Serre pour le féliciter de la situation heureuse dont il commençait à jouir, lorsque la mort l’a enlevé », in Porte-feuille d’un Troubadour, p. 41‑45. – Éloge de M. l’abbé La Serre lue par l’abbé Roux* devant l’Académie le 24 avril 1787 (Ac.Ms124 f°341-351 : une main autre que celle de Roux recopie et annote un discours prononcé « trois ans auparavant ») ; cité par J. encycl., août 1787, p. 526-527. – Louis-Mayeul Chaudon, Dict. hist, crit. et biog., t. 24, Paris : Ménard, 1822. – J.-C.-F. Hoefer, Nouvelle Biographie générale, 1851-1856. – R. Darnton, The Business of Enlightenment : A Publishing History of the Encyclopedie (1775-1800), 1979.

Manuscrits

Lettre du 10 juillet 1773, Ac.Ms268-III f°109. – Épître à l’abbé Le Monnier, lue à la séance publique de l’Académie le 19 avril 1774, Ac.Ms127 f°225. – Les fléaux, ode lue à l’Académie le 6 décembre 1774, Ac.Ms127 f°200. – Morceau tiré du 1er chant d’un poème sur l’Éloquence, lu le 18 mars 1777, Ac.Ms127 f°204. – L’Éloquence, 3e chant : les effets l’éloquence, AcMs127 f°209. – Influence du débit dans l’éloquence, lu à la séance publique du 7 déc. 1777, Ac.Ms126 f°148. – Influence du goût dans l’éloquence, lu le 22 juil. puis, en séance publique, le 2 déc. 1777, Ac.Ms126 f°152. – Influence des connaissances dans l’éloquence, 4e chant, lu le 6 mai 1777, Ac.Ms126 f°158. – Lettre de Servilie à BrutusCe Brutus est mon fils et César est son père »), héroïde lue le 4 août 1778, Ac.Ms126 f°169. – Le danger d’être auteur, épître, 9 fév. 1779, Ac.Ms126 f°167. – La servitude abolie dans les domaines du Roi, séance publique du 28 août 1781, Ac.Ms126 f°173. - Correspondance La Serre-STN, Fonds Société Typographique, BPU de Neuchâtel. – Compte rendu des ouvrages de l’Académie de Lyon dans sa séance du XI Avril 1780, Ac.Ms267-I f. 218-231 (contient l’éloge de Billy*).

Publications

Les grands hommes de Dijon, ode, 1762. – Nouveaux discours académiques, par M. L** de l’O***, Nîmes : Gaude, 1769 ; contenant : Discours sur le style académique ; Quelles sont les sources de la décadence du goût ? (prix de l’Académie de Marseille, 1765) ; Éloge de la magistrature ; Éloge de Gassendi (lu à l’Académie de Villefranche en 1766) ; Éloge de Pierre Corneille ; Oraison funèbre de Marie Lezinska, reine de France (prononcée à Lyon le 1er août 1768) ; voir comptes rendus dans Affiches de province, 21 juin 1769, p. 98, et J. encycl., juin 1769, p. 362-363. – Discours sur les arts d’agrément, Lyon : A. de la Roche, 1769. – Poétique élémentaire, Lyon : Perisse, 1771, 473 p., dédicacé à M. de Flesselles*, qui devient « classique dans plusieurs collèges ». – Élite des poésies décentes, 3 vol., Lyon : Perisse, 1772 (en collaboration avec L. P. Bérenger*, une anthologie « propre à donner à la première enfance le goût de la poésie sans aucun risque pour ses mœurs »). – Discours sur les jeux et les exercices publics, prix de l’Académie de Dijon en 1775, Dijon : Causse, 1776. – « Vers prononcés en recevant à Dijon le prix d’éloquence des mains de M. le prince de Condé », et « Du style oratoire, fragment d’un poème sur l’éloquence », Almanach des Muses, 1777, p. 48 et 149. – L’Éloquence, poème didactique en VI chants, Lyon : Faucheux, 1778 (le 17 mars 1778, voulant faire imprimer ce poème, il obtient la permission de prendre le titre de membre de l’Académie ; le 28 avril, il en offre à la compagnie plusieurs exemplaires imprimés).

« L’édition de l’Encyclopédie in-4° à Lyon chez Duplain fut faite sur son plan et par ses soins » (Ac.Ms124 f°341). Par suite du contrat passé entre Joseph Duplain, la Société Typographique de Neuchâtel et Panckoucke, La Serre était en effet chargé de fournir aux divers ateliers d’imprimerie le texte de cette nouvelle édition, au rythme de six volumes tous les trois mois : il devait fondre les articles du Supplément et ceux du Dictionnaire de Diderot et d’Alembert, supprimer les références aux planches, corriger les erreurs les plus manifestes relevées par la critique. Il rechigne à gommer les contradictions de l’Encyclopédie originale : « Notre dictionnaire doit avoir l’avantage des académies de recueillir tous les sytèmes sans les adopter » (lettre à la STN, 4 août 1777). Sous la pression de Duplain, il se livre subrepticement à un travail de raccourcissement. Mais il opère aussi des changements et des augmentations de son cru. Il remplace l’article « Apologue » de l’abbé Mallet par un autre « tiré de la poétique élémentaire de Mr. l’abbé Laserre » ; il ajoute un article « Carpeau », d’après un article de La Tourrette* pour le Journal de physique de l’abbé Rozier* ; il insère un extrait de son discours de réception à l’Académie dans l’article « Naturel ». D’abord payé « comme un crocheteur » selon Panckoucke, c’est-à-dire 600 livres par volume, il obtient une augmentation de 250 livres en septembre 1777. Il se voit également confier la composition des Tables de l’édition in-4°, pour un salaire de 2 400 livres. Le 28 juillet 1778, il présente à l’Académie les volumes 13 et 14.

Le 2 août 1783, le Journal de Paris publie une lettre d’E. de Bays, avocat à Nuits-sur-Beaune, qui, « dépositaire du portefeuille de M. l’abbé de la Serre », demande le secours des lecteurs en vue d’une édition complète des œuvres de cet écrivain « avantageusement connu dans la République des Lettres ».