Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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La recherche est faite par sous chaîne, insensible à la casse et aux accents.

BRACHET Jean Louis (1789-1858)

par Alain Brémond.

 Il est né à Givors le 21 avril 1789, de Jean Marie Brachet (Givors 1er janvier 1756-14 février 1843), marchand-drapier et garde national, et Catherine Allimant, encore écrit Alliment (Givors 13 avril 1764-Givors 22 avril 1823) dont le père était maître souffleur à la verrerie de Givors. Parrain : son oncle Louis Allimant (Givors, 1768-1847), maître-verrier à la verrerie royale de Givors ; marraine : Jeanne Marie Brachet Madinier, tante de l’enfant, en présence de Michel Allimant (Miellin [Haute-Saône] 20 septembre 1735-Givors 11 mars 1810) gentilhomme verrier, le grand-père. Entré à treize ans au collège, il poursuit ses études avec un précepteur. Étudiant à l’Hôtel-Dieu à 17 ans, il réussit le concours des élèves internes en chirurgie en 1811. Parti immédiatement pour Paris, il soutient sa thèse deux ans plus tard : Dissertation physiologique sur la cause du mouvement de dilatation du cœur. La même année, il occupe un poste de chirurgien-adjoint à l’Hôtel-Dieu de Paris. Il est l’élève de Dupuytren, de Corvisart et de Pinel. Au cours de ce séjour, il se dévoue aux soins des malades atteints de typhus sans être lui-même contaminé par cette maladie. En 1814, il est proposé à Larrey pour accompagner Napoléon à l’île d’Elbe. Alors qu’il est prêt à partir, le typhus se déclare et il doit se soigner chez ses parents. À la fin de sa convalescence, il prend à l’Hôtel-Dieu de Lyon son poste d’interne qu’il n’avait pas encore occupé. Il commence à publier plusieurs travaux de chirurgie et d’obstétrique. À la fin de son internat il s’installe en ville. En 1818, il est reçu au concours de médecin de l’Hôtel-Dieu, en 1821 professeur-adjoint de pathologie interne à l’École secondaire de médecine, l’année suivante professeur. Après la création de l’École préparatoire de médecine, il est nommé en 1842, professeur de pathologie et thérapeutique générale, puis en 1854, jusqu’à son décès, professeur de matière médicale et thérapeutique.

 Il publie de nombreux travaux sur différents sujets médicaux qui eurent une notoriété nationale, notamment ses études de physiologie, de médecine interne et surtout de neurologie. Traitant de l’ « hypochondrie » (qu’il écrit avec un h), dans le cadre d’un concours ouvert par l’académie de médecine, il veut « dissiper le chaos qui régnait sur les opinions sur son siège, sa nature et son traitement » et l’attribue à un dysfonctionnement global de l’encéphale, du « système nerveux cérébral » et du « système nerveux ganglionaire » en reprenant la distinction de Bichat. Il fait une place, dans son origine, à l’irritation nerveuse par le chagrin et l’« imagination », mais prend au sérieux les souffrances des hypocondriaques. Il conseille un traitement hygiénique, un régime lacté, la modération sexuelle, quelques médicaments « adoucissants » et de rares et prudentes saignées. En réponse à une autre question posée au concours par l’académie de médecine, il traite de l’hystérie, qu’il différencie soigneusement de l’hypocondrie en reprochant à Sydenham de les avoir confondues. Pour lui, l’hystérie se caractérise par deux symptômes : les convulsions et la sensation de boule ascendante dans l’estomac et la poitrine. Après un historique détaillé de cette pathologie connue depuis Hippocrate, il fait justice des théories utérines qui ont donné son nom à la maladie qu’il propose d’appeler une « névrospasmie cérébrale », c’est-à-dire une affection spasmodique des nerfs du « système nerveux cérébral. » Il considère que cette maladie, qui peut affecter les hommes, est à prédominance féminine, à cause des particularités du système nerveux cérébral de la femme : sa sensibilité et sa domination par les sentiments. Les causes peuvent être diverses : aussi bien une maladie physique qu’un désordre émotionnel : « tout agent d’une excitation vive et d’une modification spéciale du système nerveux cérébral ». Tout en reconnaissant le rôle des abus sexuels comme de la continence exagérée, il s’élève contre l’assimilation de la crise d’hystérie à un orgasme, mais, dans un souci prophylactique, il déconseille fortement la lecture des romans licencieux qui enflamment l’imagination des jeunes filles (un point de vue repris par Freud !).

 Membre de la société médicale d’émulation de Lyon en 1841, membre de la société nationale de médecine et des sciences médicales de Lyon, président de la société de médecine de Lyon, il participe aussi à de nombreuses sociétés savantes françaises et étrangères : membre correspondant de l’académie royale de médecine (1825), de l’académie impériale de médecine de Vienne, des sociétés médicales de Berlin, de Paris, de Göttingen, de Copenhague, de Hambourg, de la Nouvelle-Orléans, de Marseille, de Bordeaux (il ajoute etc.). Il est administrateur du Dépôt de mendicité de Lyon, fondé à la Quarantaine, transféré à l’Antiquaille puis aux Chazeaux. Chevalier de la Légion d’honneur.

 Il meurt à Lyon 2e au 97 quai Saint-Antoine, le 10 avril 1858, déclaration faite par ses neveux Antoine Chavant, procureur à Gex, et Jean-Claude Lavirotte, docteur en médecine.

 Il avait épousé à Lyon le 25 février 1824 Fanny Guillard, née à Amplepuis le 18 frimaire an XI, fille de Bonaventure Guillard et de Louise Noally. Il semble avoir eu un enfant, Jean Louis, qui n’a pas survécu, car il est mort sans laisser d’héritiers à réserve, et a testé en faveur de ses neveux et nièce, Lavirotte et Chavant.


Académie

Admis le 3 décembre 1833, section des sciences, il est président en 1846. Il occupe à partir de 1848 le fauteuil 3, section 2 Sciences. Discours de réception communiqué en séance privée le 17 juin 1834, lu en séance publique le 25 juin : « En combattant un sot préjugé, l’auteur établit qu’en général les médecins ne sont ni athées ni matérialistes. [...] Dieu même s’est manifesté au génie des Barthez et des Cabanis ». Émérite en 1856. Il a présenté : Études physiologiques sur la théorie de l’inflammation, MEM S 1, 1851. – De l’unité de la médecine. MEM S 6, 1856.

Bibliographie

H. Bonnet, P. Guisti, Un précurseur de la neuro-psychiatrie, Jean-Louis Brachet (1789-1858), médecin de l’Hôtel Dieu de Lyon, Inst. Hist. Méd., cycle 1987-1988. – F.F.A. Potton, Notice historique sur la vie et les travaux de Jean-Louis Brachet, Lyon : Aimé Vintrignier, 1859, 56 p. – O. Walusinski, « Jean-Louis Brachet (1789-1858). Un médecin lyonnais méconnu à l’aube des neurosciences », Rev. Neurologique, 2015.

Iconographie

Portrait en pied en robe de professeur (non signé), MHM Lyon.

Publications

Dissertation physiologique sur la cause du mouvement de dilatation du cœur, thèse, Paris : Didot jeune, 1813. – « Mémoire sur la réunion secondaire de la plaie après l’amputation circulaire des membres », Journ. Méd. Chir. Pharm. 37, 1816, p. 96-105. – Modification de la canule de Mr Dupuytren, pour l’opération de la fistule lacrymale. Lyon : J.-M. Boursy, 1816. – « Mémoire sur une nouvelle modification du bandage à extension permanente, dans les fractures du col du fémur », Journ. Méd. Chir. Pharm. 37, 1816, p. 36-51. – Essai sur l’Hydrocéphalite ou Hydropysie aigüe des ventricules du cerveau, Paris : Gabon, 1818. – « Mémoire sur la maladie tachetée hémorrhagique de Werlhof », Bull. Soc. Médic. Émul. Paris 1, 1820, p. 469-486. – Mémoire sur les causes des convulsions chez les enfants et sur les moyens d’y remédier, Paris : Béchet jeune, 1824. – « Réflexions sur l’ontologie physiologique », Journ. Méd. Chir. Pharm. 29, 1825, p. 54-61. – De l’emploi de l’opium dans les phlegmasies des membranes muqueuses, séreuses et fibreuses : suivi d’un mémoire sur les fièvres intermittentes, Paris : Gabon, 1828. – De l’emploi de l’opium dans les phlegmasies des membranes muqueuses, séreuses et fibreuses: suivi d’un mémoire sur les fièvres intermittentes, Paris : Gabon, 1828. – Mémoire sur l’asthénie, Paris : Gabon, 1829. – Note sur les causes de la lassitude et de l’hanélation dans les ascensions sur les montagnes les plus élevées, Suisse, 1830. – Recherches expérimentales sur les fonctions du système nerveux ganglionnaire et sur leur application à la pathologie, Paris : Gabon, 1830. – Recherches sur la nature et le siège de l’hystérie et de l’hypocondrie, et sur l’analogie et les différences de ces deux maladies, Paris : Gabon, 1832. – Réfutation de l’opinion qui accuse les médecins d’athéisme et de matérialisme, Lyon : Lambert-Grenot, 1834. – Traité pratique des convulsions dans l’enfance, Lyon : Savy, 1837. – Traité complet de l’hypochondrie, Lyon : Savy et Paris : Baillière, 1844. – Traité de l’hystérie, Paris : JB. Baillière, et Lyon : Savy, 1847. – Mémoire sur la peste et les quarantaines, Lyon : L. Perrin, 1847. – Traité pratique de la colique de plomb, Lyon : Savy, 1850. – Physiologie élémentaire de l’Homme, Paris : Germer-Baillière, Lyon : Savy, 1855.