Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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La recherche est faite par sous chaîne, insensible à la casse et aux accents.

GAUDIN Jacques (1735-1810)

par Denis Reynaud.

 Jacques Gaudin est né le 7 mars 1735 aux Sables-d’Olonne (Vendée), fils d’honorable Maurice Gaudin, sieur de la Guilbaudière, bourgeois armateur (1704-1740, fils de Laurent-Nicolas Gaudin ancien directeur de l’hôpital des Sables, et de Louise Perrayne), et de demoiselle Marie Aimée Bernard (fille d’Étienne Bernard, capitaine de navire, et de Marie Joly). Parrain : son oncle Jacques Gaudin (mort en décembre 1763), prêtre aumônier de l’hôpital de la ville, qui l’a baptisé ; marraine : Angélique Bourget Joly. Cet acte (mal placé en août 1735), porte en marge : « Il est mort prêtre et marié dans la 1re révolution – mort à La Rochelle le 30 Xbre 1810 ». Il est l’aîné de quatre enfants. Il est parfois confondu avec son cousin germain Joseph Marie Jacques François Gaudin, dit Gaudin l’aîné (1754-1818, fils de Joseph Gaudin armateur), député à la Législative et à la Convention, membre du Conseil des Cinq-Cents et du Corps législatif.

 Le 29 frimaire [19 décembre 1793], à près de 60 ans, il épouse à La Rochelle Marie-Anne Vanard, 26 ans, fille d’un aubergiste du quartier Saint-Sauveur dont il a un fils, François Antoine Aimé, né le 4 ventôse an III [22 février 1795], qui devait entrer à l’École militaire et devenir officier d’artillerie, sans postérité.

 Il meurt à 75 ans le 30 novembre 1810, à La Rochelle, dans la bibliothèque municipale rue Gargouillaud, locaux de l’ancien évêché qu’il avait connu comme premier vicaire de Vendée.

 Après avoir commencé des études d’ingénieur, Gaudin entre dans la congrégation de l’Oratoire. En 1763, il est au nombre des seize oratoriens que la ville de Lyon appelle pour remplacer les jésuites expulsés. Malgré la publication anonyme en 1781 d’un livre polémique sur le célibat des prêtres (que certains attribuaient à l’abbé Raynal, et où il propose le mariage des prêtres, ainsi que des mesures que l’on retrouvera dans la constitution civile du clergé : église nationale indépendante de Rome, suppression des ordres monastiques, fin des impôts ecclésiastiques, confiscation des biens de l’Église), sa carrière progresse. Il est nommé bibliothécaire du collège de la Trinité. En 1783, il quitte l’Oratoire et obtient une pension de 1 440 livres sur l’abbaye bénédictine de Gorze en Lorraine. Cette même année il est nommé grand vicaire du Nebbio (diocèse septentrional pauvre de la Corse), puis conseiller-clerc au conseil supérieur de la Corse, créé en 1768. Il réside en Corse entre 1783 et 1787. En 1784, il publie à Bastia, chez la veuve Batini, une Description de la Moresque avec quelques réflexions sur cette danse. Dans son Voyage en Corse, il plaide pour la mise en valeur de la plaine d’Aléria, lutte contre l’indivision de la propriété, le développement des voies de communication, la diversification des cultures, notamment de la vigne, la création d’une activité de pêche ; il se préoccupe de la condition des femmes corses, qui « suppléent en grande partie à ce que font parmi nous les animaux domestiques ».

 Revenu à Lyon en 1787, il quitte sans doute la ville au début de la Révolution. Le 4 janvier 1790, en tant que procureur-syndic des Sables-d’Olonne, il participe au dépôt à l’Assemblée nationale d’un mémoire contre le choix de Fontenay comme chef-lieu du département. Aux premières élections municipales, le 5 février 1790, il est élu procureur. Il semble avoir été alors en relation avec Mirabeau, qui fait rééditer cette année-là le livre sur le célibat des prêtres, bientôt réfuté par l’avocat janséniste Gabriel Nicolas Maultrot (La Discipline de l’Église sur le mariage des prêtres en réponse aux inconvénients du célibat, Paris : Lejay, 1791). Il démissionne de ses fonctions municipales en novembre 1790, laissant son cousin Joseph Marie devenir maire. Le 18 mars, il pétitionne pour que lui soit payée sa pension sur l’abbaye de Gorze. Le 16 avril, il rédige l’éloge funèbre de Mirabeau, prononcé par un autre en raison de problèmes de santé. La même année, il est un des premiers prêtres assermentés, avant de devenir le 11 mai premier vicaire de l’évêque constitutionnel François Ambroise Rodrigue, élu le 2 mai. Il avait lui-même été candidat à cette fonction. Élu député de la Vendée à l’Assemblée législative le 6 septembre, le dernier de la liste de neuf, en compagnie de Joseph Marie Gaudin, il fait partie du comité d’instruction publique. Il est reçu au club des Jacobins le 3 octobre 1791. Le 24 octobre 1791, il présente un projet de décret disposant que les corps administratifs soient armés de la force correctionnelle pour chasser de leur enceinte les prêtres réfractaires. Il propose le 10 février 1792 un rapport et un projet de loi sur la suppression des congrégations séculières, notamment celles chargées de l’instruction publique, dont les oratoriens (votée le 18 juin). Le 9 mai 1792, il dépose un rapport sur le serment des femmes vouées à l’instruction publique. Il intervient sur l’organisation de l’artillerie et de l’infanterie de marine ; et en août un décret sur les monuments publics prévoyant le remplacement des statues élevées en l’honneur du despotisme, par d’autres mises au concours célébrant la liberté, l’égalité, la loi et la félicité publique. Contrairement à Joseph Marie Gaudin, Jacques ne se représente pas à la Convention nationale en septembre et reprend ses fonctions de premier vicaire.

 Le 20 novembre, l’ouverture de l’armoire de fer de Louis XVI révèle les relations du roi et de Mirabeau. Le Moniteur du 6 décembre affirme que l’abbé Gaudin devait recevoir 200 livres par mois sur la liste civile comme agent de propagande monarchique. Gaudin répond le 6 décembre en produisant un certificat du comité de Sûreté générale de la Convention. Le 5 frimaire an II [25 novembre 1793], alors qu’il réside à La Rochelle pour des raisons de santé ou de sécurité, il écrit aux administrateurs du directoire de la Vendée pour annoncer qu’il a renvoyé ses lettres de prêtrise à l’Assemblée, avant de se marier le mois suivant. En 1797, il est nommé conservateur de la bibliothèque de La Rochelle, avec 1 400 livres d’appointement, puis juge au tribunal civil de la ville (1800-1807).


Académie

Gaudin est élu à l’Académie de Lyon le 20 novembre 1780 ; son discours de réception du 3 décembre 1780 tend à prouver que les lettres peuvent réussir en province comme à Paris (Ac.Ms128 f°79 ; il est inséré à la suite du Voyage en Corse (p. 239-263). Le 18 mai 1782, quittant Lyon, il écrit de Paris pour proposer sa démission (Ac.Ms268 IV f°114). À son retour de Corse, Gaudin est directeur de l’Académie en 1787, ouvrant la séance publique du 24 avril par des réflexions sur l’utilité des corps littéraires (Ac.Ms267 I f°319). Il a été également membre associé de l’Institut (classe des sciences morales et politiques, section de morale) ; après la réforme de 1803, il est membre correspondant dans la classe histoire et littérature ancienne. Dans les Mémoires de l’Institut figure un extrait de ses Réflexions philosophiques sur la législation de Solon et sur le gouvernement d’Athènes, lues le 17 germinal an VIII. Il devient membre de l’académie de La Rochelle, réformée sous l’appellation de Lycée rochelais. Il y traduit une partie du deuxième chant du Tasse ; y donne une Dissertation sur le huitième chant de l’Iliade et sur le bouclier d’Achille ; y lit en 1806 un Parallèle de Trajan et du vainqueur d’Austerlitz ; et en 1807 un Essai sur l’histoire de la Pologne, ses guerres et l’état où elle se trouve.

Bibliographie

Courtin, Encyclopédie moderne, 1829. – Félix Desvernay et Léopold Délayant, deux études sur « Le Père Jacques-Maurice Gaudin », Lyon-Revue, 1886. – Charles-Louis Chassin, La Préparation de la Guerre de Vendée, tome 1, 1892, p. 121. – Dict. des Vendéens (AD Vendée). – Note de Bréghot, Ac.Ms270 f°97. – Edna Hindie Lemay (dir.), Dict. des législateurs 1791-1792, Ferney-Voltaire, 2007, t. 1, p. 328-330. – Jean Artarit, « L’abbé Jacques Gaudin député de la Vendée à l’Assemblée législative », Annuaire de la Société d’émulation de la Vendée, 2011, p. 73-93. – T. de Morembert, DBF.

Manuscrits

L’Académie conserve une « Épître sur l’amour du travail » du 7 décembre 1785 (Ac.Ms126 f°67) et un rapport de février 1786 de Gaudin et Castillon sur les Sermons du prédicateur écossais Hugh Blair, traduits en 1784 par Benjamin-Sigismond Frossard (Ac.Ms158bis f°175).

Publications

Mémoires de Jean Graham, marquis de Montrose, contenant l’histoire de la rébellion de son temps, traduits de l’anglais, 2 vol., Paris : Prault, 1767. – Traduction de différents traités de morale de Plutarque, Paris : Debure, 1777. – Les Inconvénients du célibat des prêtres prouvés par des recherches historiques, Genève (Lyon) : Pellet, 1781, 439 p. ; puis Paris : Lejay, 1790, 499 p. – Voyage en Corse, et vues politiques sur l’amélioration de cette Isle ; suivi de quelques pièces relatives à la Corse, & de plusieurs anecdotes sur le caractère & les vertus de ses habitans ; orné d’une Carte Géographique. Par M. l’Abbé Gaudin, Vicaire-Général de Nebbio, de l’Académie de Lyon, in-8°, Paris : Lefebvre, 1787 (compte rendu dans Journal général de France, du 29 décembre 1787 ; collaboration de Bérenger pour les anecdotes), traduit en allemand : Neueste Reise durch Corsica, Leipzig, 1788. – Gulistan, ou le jardin des roses, traduit du poème de Saadi, 1789 ; et 1790, avec un Essai historique sur la législation de la Perse, Le Jay, 1789, XXXXI + 415 p. (v. Esprit des journaux, février 1790, p. 3-14). – Éloge civique d’Honoré Riqueti Mirabeau, député de l’Assemblée nationale, prononcé dans l’Assemblée des Amis de la Constitution de la ville et du district des Sables-d’Olonne, du département de la Vendée, le 16 avril 1791, par l’abbé Gaudin, ancien vicaire général en Corse, Les Sables : Ferré, 1791, 28 p. – Rapport du comité d’instruction publique, sur les congrégations séculières, par M. Gaudin, de Luçon, député du département de la Vendée, imprimé par ordre de l’Assemblée nationale, 1791, 18 p. – Lettre de Jacques Gaudin, ex-député à l’Assemblée législative, au sujet d’une accusation contre lui consignée dans le supplément du Moniteur, n° 141, daté du 6 décembre, Fontenay : Testard et Goichot, 1793. – Recherches et considérations politiques sur les récompenses nationales, les anciens ordres de chevalerie et la légion d’honneur, 1804. – Avis à mon fils âge de sept ans, in-12, Paris : Cocheris, 1805, 353 p. – Également : diverses traductions du latin et de l’anglais ; quelques poésies (« À Mlle*** âgée de 7 ans », Almanach des muses, 1788, p. 221-224).

Son Histoire des troubles de Lyon au temps de la Ligue, pour laquelle il demande le jugement de l’Académie dans une lettre de 1782 (Ac.Ms268-IV f°114) ne semble avoir paru que par fragments, dans les nos 16 à 26 du Journal de Lyon de 1787.