Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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PERRACHE Antoine Michel (1726-1779)

par Maryannick Lavigne-Louis.

 Antoine Michel Perrache, né le 23 novembre 1726 à Lyon, est baptisé le lendemain dans l’église Saint-Nizier. Son père, Michel Perrache (Lyon, 12 juillet 1685-21 décembre1750, inhumé le lendemain dans l’église Saint-Bonaventure des Cordeliers), est l’un des grands sculpteurs lyonnais de la première moitié du xviiie siècle : il a embelli la ville et les églises de Lyon, mais ses œuvres ont pratiquement toutes disparu, hormis de très beaux éléments de décor dans l’église de Neuville-sur-Saône. Son grand-père Étienne Perrache, architecte et maître charpentier à Vaise, est né vers 1642 et décédé le 3 décembre 1700, à 58 ans, rue du Pas-Étroit (act. rue du Bât-d’Argent) ; sa grand-mère Élisabeth Sibert, fille de Jean Sibert, maître maréchal à Vaise, née vers 1649, est décédée à Lyon à 83 ans le 29 août 1732. Michel Perrache a épousé le 2 décembre 1719, dans l’église Saint-Pierre Saint-Saturnin, Louise Pierre, 20 ans, fille de François Pierre, marchand pelletier, et de Marie Fédéry, d’une famille d’orfèvres, l’un et l’autre déjà décédés au moment du mariage. Louise Pierre est morte après le 18 avril 1740, date de la naissance de son seizième enfant, Marie Anne (Lyon 1740-après 1782), qui sera peintre après avoir été élève de Jean-Baptiste Greuze.

 Antoine Michel est le sixième de la longue liste des enfants de Michel Perrache. Il a pour parrain Antoine Robin, marchand chapelier, et pour marraine Claudine Omel, épouse de Claude Perrache, l’un de ses nombreux oncles, également maître charpentier et architecte. D’abord élève de son père, Antoine Michel se rend à Paris où il est admis à l’École royale des élèves protégés, créée en 1745 ; il obtient une première médaille en 1747 et un accessit en 1748, ce qui lui permet d’aller à l’Académie de Florence et à Rome où il est couronné par l’Académie de Saint-Luc à l’âge de 21 ans.

 Revenu à Lyon, il érige en 1751 un monument à la mémoire de son père dans l’église Saint-Bonaventure. Pendant plusieurs années il sculpte de nombreux ouvrages pour la ville ou pour les églises de Lyon (pratiquement tous disparus, voir le détail donné par Audin et Vial). En 1756, Antoine de Lacroix-Laval* fonde l’école royale académique gratuite de dessin et de géométrie et en 1757 Antoine Michel Perrache y est chargé de l’enseignement de la sculpture. En 1769, il habite rue Écorche-Bœuf (Port-du-Temple). Se sentant une âme d’ingénieur et d’homme d’affaire, il reprend le Projet pour la Jonction de l’Isle Mogniat à la Ville de Lyon présenté à l’Académie en 1739 par Guillaume Marie Delorme*, et propose au Consulat un « plan pour l’établissement d’un cours servant de gd chemin, tend. du quai de la Charité à l’extrémité mérid. des Étroits appelés la Mulatière, avec un pont en bois à lad. extrémité et d’un canal de communication du Rhône à la Saône entre les jardins étant au-dessous des remparts et le broteau Mogniat servant de fossé pour terminer la ville au midi. » Le plan est accepté le 23 janvier 1770 (AML, BB 338) et, le 13 octobre 1771, Louis XV lui accorde par lettres patentes l’autorisation de faire réaliser les travaux à ses frais, contre le droit de péage sur le pont prévu et la propriété de tous les terrains concernés, ce qui lui permet de porter le titre de seigneur de l’île Mogniat. Mais manquant de moyens, il est obligé de vendre les terrains. En septembre 1771, il crée une société par actions, la Compagnie des Associés aux travaux du Midi de Lyon ou Compagnie Perrache dont le siège est situé 4 place Grolée (act. place Gailleton) et dont sont membres, entre autres, Soufflot* (jusqu’en 1777), le comte de Laurencin*, Claret de Fleurieu*, et les ingénieurs Jean François Lallié* (Saint-Denis 1725-Charly 1798), Jean Rodolphe Péronnet (Suresnes 1708-Paris 1794) et Emiland Gauthey (Châlon-sur-Saône 1732-Paris 1806). Sur proposition de Soufflot*, Perrache modifie ses plans en 1774. Il décide de construire le pont dit de Bellevue (La Mulatière) en pierre au lieu du pont en bois prévu. Celui-ci sera ouvert à la circulation seulement en décembre 1782, et emporté par la crue du Rhône des 13 et 15 janvier 1783 (Pierre Sarocchi, « Les anciens ponts de La Mulatière à Lyon, 1782-1785 », BSHALL, 1999, p.42). Seule la chaussée Perrache, conduisant de l’hôpital de la Charité à l’actuel cours de Verdun, est achevée lorsqu’il décède le 12 octobre 1779 sans qu’il soit parvenu à faire aboutir son grand projet. Il est inhumé le lendemain dans la chapelle de la Vierge de l’église d’Ainay.

 Sans doute son infirmité physique (il est bossu) l’a-t-elle contraint au célibat. Il institue comme légataire universelle sa jeune sœur Marie-Anne, peintre, qui lui succède à la tête de la compagnie et doit souscrire de gros emprunts pour faire face aux travaux prévus. Dans son testament du 10 mai 1780, elle institue comme légataire universel Jean Baptiste Espérance de Laurencin*, seigneur de Machy. Ce dernier reprend les travaux en 1782, mais ce n’est pas avant 1840 que le projet de Perrache sera terminé; donnant naissance à un nouveau quartier qui perpétue son nom. C’est ce qu’avait prophétisé André de Bory* dans son éloge funèbre : « La postérité, qui jouira des fruits de son génie, lui rendra la justice que rarement les grands hommes obtiennent de leurs contemporains. »

 Perrache a été fait chevalier de Saint-Michel, ordre royal réservé aux artistes et aux savants.


Académie

Ayant présenté sa candidature comme sculpteur, le 26 janvier 1753, Perrache est reçu dans la classe des arts le 4 mai suivant. Dans la foulée, il présente des pétrifications de fougères couleur ardoise, le 18 mai ; un chat à deux têtes conservé dans l’esprit de vin, le 15 juin ; un Mémoire ou préface sur la sculpture, le 14 septembre et le 7 décembre, en assemblée publique (Ac.Ms185 f°208) ; un Discours sur la sculpture, 15 novembre 1754, 21 novembre 1755, 18 novembre 1757) ; Constructions utiles à faire à Lyon, 1758 (AcMs121 f°48) ; Nouvelles constructions à faire à l’Hôpital de Lyon (Ac.Ms121 f°50) ; L’anatomie considérée relativement à la peinture, 22 novembre 1759 ; le 20 mars 1760, Perrache présente le modèle d’une décoration pour l’église de St. Bonaventure ; Essai sur les décorations propres aux églises, 4 décembre1760 ; Mémoire sur les différentes pierres utilisées dans les édifices de Lyon, 23 juillet 1761 ; Observations sur les carrières des cantons voisins de notre ville pour utiliser la pierre dans les édifices, 8 novembre 1762 ; Réflexions sur les dangers que peuvent rencontrer les élèves dans la sculpture en s’attachant sans réserve à un maître, 15 décembre 1763 (Ac.Ms185 f°198) ; Discours sur la sculpture (suite), 15 novembre 1764 ; L’expression des passions en sculpture, à l’assemblée publique du 4 décembre 1764 ; Sur l’éducation qu’il conviendrait de donner aux jeunes gens qui se destinent aux arts, 25 juin 1765 (Ac.Ms147 f°130) ; Mémoire sur un canal le long du Rhône quai des Etroits jusqu’à Saint-Georges pour les moulins, 7 janvier 1766 (Ac.Ms269 f°109 et 115) ; À propos des changements au canal projeté sur le Rhône au quai des Étroits au-delà de la porte St Georges, pour éviter que les moulins fassent obstacle à la navigation, 22 avril 1766 ; Discours sur la police qu’il conviendrait d’établir à Lyon, des manufactures, des denrées et autres objets de l’économie publique, 24 mars 1767 ; Discours allégorique sur les principes et les effets de l’amour-propre, 3 mai 1768 (Ac.Ms131 f°43) ; Delorme, Perrache, Lallié, Rapport sur le concours de 1769, minoterie des blés (Ac.Ms273-II-1, Ms273-II-21) ; À propos d’un désaccord entre Delorme et Perrache sur le nivellement du Rhône d’Ainay à la Mulatière, l’Académie invite Perrache à refaire ce nivellement avec Delorme, 5 février 1771, Ac.Ms116 f°206 ; Observations sur les monuments antiques du Mont Ganelon près de Compiègne, 7 mai 1771 (Ac.Ms116 f°206) ; Sur le rapport favorable de Perrache et Devillers, l’Académie donne un certificat d’intérêt pour l’Invention du Sr François Morel d’une machine propre à transporter les terres des montagnes dans la plaine, 16 juin 1772 ; Observations sur quelques monuments antiques de la ville de Vienne en Dauphiné (8 septembre 1772), Ac.Ms 143 f°177 ; Rapport avec Genève sur le “Discours sur la minoterie économique” par M. Béguillet Lyon, 26 avril 1774 Ac.Ms-174 f°215 et 225 ; le 12 septembre 1775, Perrache fait visiter à Monsieur, frère du roi, les travaux du confluent dont il a dressé le projet. Bordes, Mongez, Jacquet, La Serre et Perrache sont commissaires pour en définir les inscriptions ; Dépôt d’un projet d’établissement d’éducation relative aux sciences, au commerce et aux arts (19 novembre 1776), Ms147 f° 84. Le 8 avril 1777 Perrache, directeur, lit son discours pour l’ouverture de la séance publique ; Discours sur l’union des sciences, des Belles lettres et des arts pour leurs besoins réciproques, séance publique du15 avril 1777 ; Comptes rendus des assemblées publiques, 15 avril 1777, Ac.Ms267 f°492 et Ms267-II f°504 ; Dépôt d’un projet de construction d’un palais de justice,13 décembre 1778 ; Mémoire sur le projet d’établissement d’éducation relative aux sciences, au commerce et aux arts, 24 mars 1778 ; Rapport sur les mémoires 1 à 7, 1778 (Ac.Ms173-3) ; Rapport sur l’ouvrage du Père Frisi (prix de 1778), Ac.Ms173 f°185.

André de Bory* prononce son éloge funèbre (Journal Encyclopédique, janvier 1784).

Bibliographie

Dumas. – Charvet. – Frécon. – Audin et Vial. – François-Régis Cottin, « Les architectes et l’académie de Lyon au xviiie siècle », RLY 1, n° 1 (septembre 1977), Lyon, Union des sociétés savantes du Lyonnais, 1977, p. 41-54. – F.-R. Cottin, « L’abbé Duret témoin des grands travaux à Lyon (1761-1782) », BSHALL 24 (année 1994), 1995, p. 63-81, [1] pl. h.t., plan en coul.

Iconographie

Anne Marie (Marie-Anne, Marianne) Perrache, Portrait d’Antoine-Michel Perrache, vers 1770-1775, huile sur toile, musée des Beaux-Arts de Lyon, inv. A 3138 ; déposé aux musées Gadagne (inv. (9) 47-293). – Anonyme, Portrait d’Antoine-Michel Perrache, dessin au crayon graphite, portant une annotation à la plume : « Mr Perrache de Lyon dessiné a Paris en juin 1777 », BML. – Perrache est représenté sur la peinture de Louis-Édouard Fournier, Aux Gloires du Lyonnais et du Beaujolais, 1896, salle des délibérations du Conseil général.

Manuscrits

Des proportions du corps humain, Ac.Ms185 f°224. – Des proportions de la femme, Ac.Ms185 f°231. – Actions de la première et de la seconde classe dans l’entreprise [Perrache] des constructions pour la partie méridionale de la ville de Lyon autorisée par lettres-patentes du Roi, du 13 octobre 1771, Imprimés avec, au bas, les signatures autographes des syndics Genève l’aîné, de Verneaux, l’abbé Guiguet, Perrache, Bml, Pa Ms 2335. – Plan de l’entreprise du sr Perrache au midy de la ville de Lyon, exécuté en plus grande partie, lorsque Monsieur [comte de Provence] visita les travaux en 1775, Bml, Ms Coste 13. – Vente par Michel-Antoine Perrache à François Bouillon et à sa femme Antoinette Dufournel, d’un terrain de la chaussée Perrache à Lyon, 10 décembre 1779, Bml, Pa Ms 2335. – Projet de M. Perrache pour la partie méridionale de la ville de Lyon, plan en couleur imprimé, Bml, Ms Coste 12. – Rapport sur des constructions et embellissements à faire à Lyon, Bml, Ms Pa 21. – Discours sur une nouvelle cheminée, Ac.Ms194 f°179, 1740. – Abbé Lacroix, Perrache, Nonotte, Examen du coin pour frapper les médailles Adamoli, Ac.Ms263 f°188.