Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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DEVILLE Nicolas François (1708-1770)

par Michel Dürr.

 Le 22 avril 1714, est baptisé à Ainay Nicolas François, fils d’André Nicolas de Ville, ingénieur ordinaire du roi, et de Gabrielle Forget. Est ajouté dans l’acte : « Baptisé dans la maison le vingtième avril 1708 dans la ville d’Embrun, paroisse de St Donat comme il parait par l’acte signé de Mr Vinatier curé de Saint-Donat, légalisé par Me Charles archevêque d’Embrun et plus bas par Thierry son secrétaire à sa date. A été son parrain François de (?) écuyer, chevalier de Saint-Louis et major du régiment de Haudete, et marraine Louise Françoise Morel, épouse de Me Charron [Louis Charron, Paris Saint-Eustache 16 septembre 1678-Lyon 23 juillet 1750, commissaire général de la marine et des galères à Lyon pour le service des bois, époux le 5 janvier 1710 de Louise Françoise Morel] ». Nicolas François serait donc né en 1708, mais l’acte est introuvable paroisse Saint-Donat à Embrun. La Tourrette* dans son éloge, comme d’autres historiens, le fait naître à Mont-Dauphin le 19 avril 1712. Son mariage à Saint-Ferréol-d’Auroure (Haute-Loire) donne d’autres éléments d’état-civil : « Messire Nicolas François Deville, écuyer, seigneur de Nerjoux et La Barre, lieutenant ordinaire de la vénerie du roi, ingénieur en chef au département de Lyon, de l’Académie des sciences et belles-lettres et de la Société Royale de la dite ville, fils légitime de feu Messire André Nicolas Deville, écuyer, ancien capitaine d’infanterie, ingénieur ordinaire du Roy et de feue dame Gabrielle Françoise Bertrand de Forget ses père et mère, époux d’une part, demeurant en la ville de Lyon, paroisse Saint-Georges et demoiselle Marie-Anne de Jullien de Villeneuve [baptisée le 7 octobre 1729 à Notre-Dame de St-Étienne, décédée 2 septembre 1791 à Lyon], demoiselle, fille légitime de Messire Jacques Étienne de Jullien du Bessy [Saint-Étienne, 1698-1782], écuyer, seigneur de Villeneuve [par sa femme], et de dame Anne Marie de Parchas Saint-Marc [Firminy 1706-Saint-Ferréol d’Auroure 1762], demeurant dans leur château de Villeneuve de cette paroisse, épouse d’autre part, le dit seigneur époux ayant été proclamé trois fois dans l’église paroissiale dudit Saint Georges suivant la remise de son curé en date du vingtième août dernier, signé F. joseph, curé de St-Georges et la dite épouse ayant été proclamée une fois dans l’église paroissiale de St Ferréol et reçu dispense de deux proclamations par Monseigneur l’évêque du Puy en date du vingt cinquième du même mois d’août, contresigné Hébrard, n’ayant découvert aucun empêchement civil et canonique, ont reçu la bénédiction nuptiale et ont été unis par le sacrement de mariage dans la chapelle du château de Villeneuve ce quatrième septembre mil sept cent cinquante trois ensuite de la permission de mon dit seigneur évêque du Puy en présence de Messire Charles François de Roussereau, écuyer, seigneur de Biars, cousin germain dudit seigneur époux et des seigneur et dame de Villeneuve, père et mère de ladite demoiselle épouse, de Messire Claude Marcellin de Jullien de Villeneuve, écuyer, seigneur de la Tranchardière, frère germain de ladite demoiselle épouse et de Claude Michel Ferrandière, notaire royal de la ville de Saint-Étienne, témoins qui ont signé avec les dits époux et épouses, autres parents et amis soussignés et moi, curé de la dite paroisse de St-Ferréol qui ai imparti la bénédiction nuptiale audit seigneur époux et demoiselle épouse et rédigé le présent acte aussi soussigné, Mermet, curé de St Ferréol ». On note la signature de De Sozzi*.

 Nicolas François Deville meurt le 18 décembre 1770 âgé de 60 ans, en son domicile, paroisse de St-Georges sur les limites de la paroisse de Ste-Croix. Après ses obsèques célébrées le 21 décembre à St-Georges, il est inhumé à Villeurbanne : « Messire Nicolas François Deville, chevalier seigneur de Vaulx en Velin et Villeurbanne, lieutenant ordinaire de la vénerie du roi, chevalier de l’ordre royal et militaire du Christ décédé le 18 du présent mois muni des sacrements de l’église (à Lyon en son hôtel de Saint-Georges et enterré suivant ses dernières volontés dans le cimetière de Villeurbanne) âgé de soixante ans a été inhumé par nous curé de Villeurbanne selon ses dernières volontés ce 21 décembre 1770 en présence de Mr Chenevaz, juge châtelain dudit lieu et de Mr Cochard lieutenant audit lieu ».

 Nicolas François Deville serait issu de l’ancienne et illustre famille lorraine de Ville-sur-Illon. Son ancêtre Antoine de Ville, seigneur de Domjullien et Beaupré, capitaine du roi, gouverneur de Montélimar, aurait, le premier, gravi le Mont Aiguille dans le Vercors, le 26 juin 1492, sur ordre de Charles VIII roi de France. Son père, André Nicolas Deville (1662- décédé à Lyon, paroisse St Georges le 7 avril 1741 et inhumé dans la chapelle du couvent des trinitaires), officier d’infanterie jusqu’à la paix d’Utrecht, remarqué par Vauban pour ses connaissances dans l’art des fortifications, est chargé par lui de fortifier Mont-Dauphin, Embrun et le Queyras. Il est ensuite appelé à la direction des ponts et chaussées du gouvernement du Lyonnais. Il améliore la navigation sur la Saône au niveau de l’Isle-Barbe, aménage la route de Roanne par « la montagne de Tarare » (il acquiert le domaine du Muzard, à Saint-Germain-sur-l’Arbresle), lève les plans et nivelle la place Louis-le-Grand, édifie la maison des comtes de Lyon entre la Saône et la rue Saint-Georges, etc. Il instruit son fils en géométrie, mécanique, hydraulique, « architecture civile, coupe des pierres, art des profils, code de voierie. L’étude de la minéralogie le met à portée de distinguer, avec certitude, la qualité des métaux employés pour les instruments, les pierres et les terres, convenables ou nuisibles à la solidité des chemins et des constructions ». Il le prend à ses côtés et, par faveur spéciale, Nicolas François est nommé sous-ingénieur. En 1738, il fait les plans du pont de la Madeleine à l’Arbresle sur la Brévenne. En 1740, il commence avec son père la réalisation des quais du Rhône entre le pont de la Guillotière et Saint-Clair. Au quai de Retz [act. quai Jean-Moulin], à côté de l’Hôtel-Dieu, il aménage pour l’abordage des bateaux et le déchargement des marchandises, un port avec deux rampes, qu’on appelle le port du Tibre par analogie avec le port de Ripetta à Rome. Il établit un plan de Lyon avec un projet de citadelle sur la colline de Fourvière. On lui attribue un mémoire sur les grandes routes et chemins de la généralité de Lyon pour servir à en connaître l’utilité relativement au commerce. À la mort de son père, en 1741, l’intendant Pallu* le nomme à la place d’ingénieur en chef. Il fait élever à Roanne deux ponts de bois sur la Loire et, à Boën, le pont de pierre sur le Lignon. Il termine les casernes de Montbrison commencées par son père. En 1750, il rédige un mémoire développant « le grand projet, exécuté depuis, d’une route dans la Bresse, en évitant la montagne de la Croix-Rousse ». Il aménage le quai d’Hallincourt sur la Saône et construit plusieurs digues pour contenir le Rhône, dont la digue de la Tête d’Or entre 1758 et 1760. En 1757, l’intendant Trudaine* le charge d’étudier le projet de canal de Givors présenté par François Zacharie. En 1761, il prend sa retraite d’ingénieur en chef des ponts et chaussées de la généralité de Lyon. La Tourette note les réticences, voire l’opposition marquée par Deville à l’entretien des routes par la corvée, généralisée à tout le royaume par le contrôleur général Orry en 1738.

 L’activité intellectuelle de Deville est très éclectique. Il s’intéresse à la philosophie et commence un traité Sur l’infini créé que sa mort laisse inachevé. Il maîtrise l’anglais et l’italien, et traduit en cette langue Acajou et Zirphile de Duclos (1744). Il « cultive la médecine et la jurisprudence avec beaucoup de succès. Il finit ses jours au milieu des travaux des champs, si convenables à la modération de son caractère » (Dumas).


Académie

Le 26 janvier 1751, Deville, ingénieur du roi est proposé pour remplacer l’abbé [Trocu de] Faraman* ; il est élu le 9 mars 1751 et reçu le 22 juin 1751. Les 18 et 25 avril 1752, il lit un mémoire sur les jeux olympiques. Le 15 avril 1755, il annonce son projet de traduire de l’anglais l’ouvrage de Thomas Birch consacré aux vies des personnages illustres de la Grande-Bretagne. Le 8 mai 1760, on annonce que Deville est nommé membre associé de l’académie d’Angers. Lorsqu’il meurt le 20 décembre 1770, son ami Sozzi* qui était présent à son mariage demande à prononcer son éloge, ce qui est refusé au motif du respect des usages établis à l’académie. C’est La Tourrette*, secrétaire perpétuel qui prononce cet éloge lors de l’assemblée publique du 3 décembre 1771.

Bibliographie

Bollioud. – Dumas. – La Tourrette : Éloge de Nicolas François Deville, Ac.Ms124 f°202. – Audin et Vial. – M. Jacquet, DBF.

Manuscrits

Mémoire sur le charbon de terre, 24 novembre1739, Ac.Ms214 f°112-117. – Mémoire sur la maladie des bestiaux appelée charbon, Ac.Ms224 f°23-32. – Discours de réception à l’Académie des Beaux-Arts, 29 juillet 1739, Ac.Ms263 f°88-91. – Discours en tant que directeur à l’Académie des Beaux-Arts, 3 janvier 1753, Ac.Ms263 f°57 et Ac.Ms264 f°139. – Compte rendu de l’Assemblée publique de la Société Royale en date du 11 mai 1753, Ac.Ms267-II f°185 et Ac.Ms267-II f°196. – Compte rendu de l’Assemblée publique de la Société Royale en date du 7 décembre 1753, Ac.Ms267-II f°211.

Publications

« Duclos : Acajou et Zirphile, traduit en italien par Nicolas François Deville », Lyon, 1744 (selon Bollioud et Dumas). – « Éloge de Louis Bordes », lettre datée du 18 décembre 1747, Mercure de France, mars 1748, p. 91-92.

Société des conférences de l’Académie des Beaux-Arts. Société Royale

Le 1er juillet 1739, Deville est proposé dans la section de physique de l’Académie des Beaux-Arts. Il est élu le 15 juillet et fait son remerciement le 29 juillet. Le 7 septembre 1740, il montre la carte qu’il a établie de la route de Lyon à Paris jusqu’aux confins du Bourbonnais. Le 24 novembre 1740, il lit un mémoire sur les poêles et sur l’usage comparé comme combustible du bois et du charbon de terre, mémoire repris lors de la séance publique du 11 avril 1742. Il est choisi avec Grollier de Servières*, Borde* et Delorme*, comme commissaire pour évaluer le moulin à vent construit par le sieur Dubost près de sa maison de la Part-Dieu, quartier de la Guillotière (rapport favorable le 14 mars 1742). Le 28 novembre 1742, il est désigné avec Béraud*, Cayer*, Borde*, Delorme* et Christin* pour tracer la méridienne de l’Hôtel de ville de Lyon. Le 3 juillet 1743, il donne des explications sur les deux roues flottantes pour moulins inventées par feu M. Bourgeois de Lyon. Le 31 juillet 1748 Deville, qui s’est donné les soins d’obtenir à Paris les lettres patentes de la Société, en rapporte l’exemplaire original. Le 11 mars 1750, il présente un mémoire pour accompagner le plan du chemin de Lyon à la Bresse évitant la Croix-Rousse. Le 16 décembre 1750, il fait avec de Ruolz un nouveau projet de lettres patentes, celles de 1748 n’ayant pu être enregistrées et entreprend diverses démarches auprès du duc de Villeroy*. Le 7 juin 1752, il présente le dessin d’une pyramide à installer sur le pont de Tarare. Le 20 décembre 1752, il est nommé directeur pour l’année 1753. Le 7 juillet 1753, il donne « un beau scrutin [sic] formé en urne antique peinte en marbre pour servir à recueillir les voix dans les délibérations ». Lors de l’assemblée publique du 7 décembre 1753, il consacre son discours aux « secours mutuels que se doivent les sciences et les arts ». Le 1er mars 1754, il passe de la classe de mathématique à celle de physique. Le 6 juin 1755, il traite de « la maladie des bestiaux appelée charbon et des moyens de guérison » et le 20 juin, « du cas d’un homme qui rendit un serpent de 11 pieds de long ».