Campigneulles est né à Montreuil-sur-Mer (Pas-de-Calais) le 3 octobre 1737, fils de Florent Thorel et de Marie Louise La Fresnaye. Un de ses ancêtres, Philippe Thorel (1617-1705), notaire, échevin et argentier de Montreuil était seigneur de Campigneules-les-Petites, en Artois. En 1757, Thorel de Champigneules réside déjà à Lyon ; le tableau qu’il fait de la ville dans une lettre à Fréron datée du 11 août, n’est pas vraiment flatteur : « Lyon, qui ne renferme dans son enceinte qu’un temple isolé, dédié aux divinités du Parnasse, où le pesant esprit de calcul n’a pas encore pénétré : Lyon semble aujourd’hui peuplé de gens à lecture, et de demi beaux esprits. Quelques douzaines de personnes écrivent ; et, le croira-t-on ? presque toute la ville lit ». En 1757, il est garde du corps du roi. En 1760, il est trésorier de France en la généralité de Lyon. En 1763, la liste des abonnés du Mercure de France indique qu’il réside rue Saint-Joseph. Sa mère meurt en janvier 1789, rue du Peyrat (puis rue Alphonse-Fochier, act. rue Saint-Exupéry), Journal de Lyon. En 1790, Thorel de Campigneulles, habite cul-de-sac de l’Arsenal (près du quai Tilsitt). En 1804, il vit à Trévoux sous le nom de Thorel-Campigneulles.
Il est mort à Trévoux le 6 germinal an 13 (27 mars 1805) sous le seul nom de Thorel. Il est dit rentier et membre de l’Athénée de Lyon.
Campigneulles a été reçu à l’Académie, non en 1758 (Almanach de Lyon, 1787), mais le 1er juillet 1766. Lors de l’assemblée publique du 17 avril 1777, il répond à la question : « Est-il permis d’abréger ou de refaire les ouvrages des écrivains morts ou vivants ? ». Le 30 novembre 1779, il écrit à l’Académie pour indiquer qu’il ne souhaite pas lire son discours lors de la séance publique (Ac.Ms268III f°261). En 1787, il est associé. Rapporteur du prix Raynal de 1791 et 1793 (« Déterminer les vérités et les sentiments qu’il importe le plus d’inculquer aux hommes pour leur bonheur »), il corrobore les jugements de Vasselier* et se dit en général accablé par « tant de vaines déclamations ». Du mémoire envoyé par le jeune Bonaparte, il écrit : « Le n° 15 n’arrêtera pas longtems les regards des commissaires. C’est peut-être l’ouvrage d’un homme sensible, mais il est trop mal ordonné, trop disparate, trop décousu et trop mal écrit pour fixer l’attention » (Ms274 f°8). En 1800, il est « associé libre » de l’Athénée.
Il appartenait également aux académies de Villefranche, Angers, Besançon, Caen et des Arcades à Rome et à « la société électorale de Bavière des sciences morales et économiques ».
Dumas. – Léon Vallas*, La Musique à Lyon, Lyon, 1908, t. I, p. 175. – Jacques Rustin, « Les “Suites” de Candide au xviiie siècle », SVEC 90, 1972, p. 395-1416. – Nina Gelbart, Féminine and opposition journalism in old régime France : le Journal des dames, Berkeley, 1987. – Françoise Weil, Dict. des journalistes, 1999. – Philippe Bourdin, « L’idée du bonheur selon Daunou et Bonaparte. Les concours de l’académie de Lyon en 1791 et 1793 », Colloque L’abbé Raynal et l’Académie de Lyon, 10 oct. 2013.
L’Académie conserve douze manuscrits, tous postérieurs à ses œuvres publiées : trois discours sur les tragédies de Crébillon père, 15 sept. 1767 et 1768, 1769 (Ac.Ms132 f°76 et f°88, Ac.Ms128 f°54) ; De l’esprit considéré à Paris et en province, des avantages et inconvénients qui peuvent en résulter, 1772 (Ac.Ms128 f°111) ; compte rendu d’une assemblée publique de 1774 (Ac.Ms267 I f°147) ; Essai sur l’esprit du monde et de la société. Dialogue entre Sainval et Cléon, 1775 (Ac.Ms129 f°8) ; Les aveux littéraires. Dialogue, 1780 (Ac.Ms128 f°125) ; Observations sur le journal de la langue française, 1785 (Ac.Ms151 f°34) ; Discours de l’humanité (Ac.Ms128 f°20) ; Discours sur Les Trois Siècles de la littérature française et sur d’autres ouvrages satiriques (Ac.Ms128 f°28); un rapport de 1790 sur le mémoire de M. Thévenard de Mornant sur les impositions (Ac.Ms141 f°6, avec Rozier* et Roland*). Rapporteur, avec Vasselier* sur le prix Raynal de 1791 et 1793 (Ac.Ms274).
Très jeune, il publie Le Temps perdu ou Histoire de M. de C***, s.l., 1756, 64 p. – Cléon ou le Petit-maître esprit fort, anecdote morale, Paris, 1756 (plusieurs fois réédité entre 1757 et 1763, et plus récemment par H. Coulet, Nouvelles du xviiie siècle, Bibliothèque de la Pléiade, 2002, p. 519-528). – Essais sur divers sujets par M. de C***, Londres, et Paris : Lambert, 1758, 142 p. (contenant plusieurs pièces déjà parues dans le Mercure de France). – Anecdotes morales sur la fatuité, Anvers et Paris : Coutelier, 1760 (extraits dans Journal des savants, juin 1760, p. 416-417, et Mercure de juin 1760, p. 83-87).
II est l’éditeur des quatre premiers volumes du Journal des dames (janvier 1759-avril 1761) ; mais sa tentative empiète sur les privilèges du Journal des savants et du Mercure de France, et il doit vendre son journal. On lui attribua pour le discréditer une Suite de Candide licencieuse, publiée en 1760, et probablement due à Dulaurens, qu’il désavoue dans les Affiches de Lyon du 11 février 1761 et le Mercure de juillet 1761 : « C’est particulièrement dans le pays que j’habite que soit par ignorance ou par mauvaise foi, on se plaît à m’attribuer je ne sais combien de petites borchures, parmi lesquelles il s’en trouve qui feraient un tort sensible à mon cœur et à mon esprit ». Il édite des Pièces fugitives de M. de Voltaire (Genève et Lyon, chez Jean-Baptiste Reguilliat, 1761) auxquelles il mêle ses propres productions. En 1763, Le Nouvel Abailard, ou lettres d’un Singe au docteur Abadolf, est l’objet d’un extrait dans l’Année littéraire, que Fréron conclut ainsi : « L’auteur est de Lyon ; il doit s’estimer très heureux que la loi terrible qui s’observait dans cette ville, ait été abolie. Lorsqu’on avait composé un mauvais écrit, il fallait l’effacer avec sa langue, ou être jeté dans le Rhône. » Vers 1765, il fournit la chronique dramatique lyonnaise du Mercure de France. On lui a aussi attribué, à tort, Cléon, rhéteur cyrénéen, Amsterdam, 1750