Danièle Cécile Gautheron naît à Lyon le 21 juillet 1927, fille d’Henri Auguste Gautheron (Lyon 3e 17 mai 1903-30 mai 1987), employé de soierie, et d’Anne Catherine Louise Léonie, dite Julienne, Chaney (Lyon 5e 13 juin 1904-Lyon 2e 29 décembre 1988). Elle est ainsi la nièce de Marc Chaney*. Bachelière à 17 ans, elle entre à l’école supérieure de chimie industrielle de Lyon en 1946, et obtient le diplôme d’ingénieur chimiste en 1949. À l’issue de ses études, elle passe deux ans en Angleterre comme Demonstrator and teacher in General Chemistry au Whitby Community College (Yorkshire), avant d’entrer en octobre 1951 en qualité de stagiaire du CNRS au laboratoire de chimie physiologique dirigé par Paule Chaix (née Audemard, 1904-1992), maître de conférences. Elle obtient la licence ès-sciences à Lyon en 1952, et, nommée attachée de recherches en octobre 1953, elle accompagne à Paris Mme Chaix qui rejoint son maître, le professeur Claude Fromageot (1899-1958), qui avait été titulaire de la chaire lyonnaise de chimie biologique avant d’être appelé à la Sorbonne. Madame Chaix s’intéresse au mécanisme d’action des hormones, alors à peu près inconnu, et Danièle Gautheron commence par étudier les effets de dérivés d’oxydation de l’adrénaline ainsi que de la nor-adrénaline, en commençant par mettre en évidence la formation d’adrénochrome et de nor-adrénochrome, et en montrant que ces composés ne reproduisent pas les effets physiologiques de l’adrénaline ; elle s’oriente alors sur l’étude des effets de l’adrénaline et de diverses hormones sur le métabolisme oxydatif dans le muscle utérin. Afin de mieux déterminer le devenir de l’acide adénosine triphosphorique (ATP), elle met au point, avec des collègues d’Oxford (où elle effectue plusieurs séjours), une méthode de dosage basée sur la luminescence émise par des extraits de vers luisants (Photinus pyralis). Devant un jury de la Faculté des sciences de Paris Sorbonne elle soutient le 21 mars 1957 une thèse de sciences physiques : Action de l’adrénaline et de l’hormone de croissance anté-hypophysaire sur le métabolisme d’un muscle lisse : l’utérus de rat. Quelques mois plus tard, elle devient chef de travaux pratiques à la Sorbonne, et Fromageot lui confie la lourde tâche de mettre en place un enseignement pratique de biochimie à l’intention de cent vingt étudiants inscrits au certificat de chimie biologique.
Elle conserve cet emploi jusqu’à sa nomination en octobre 1961 comme maître de conférences au laboratoire de chimie biologique de la Faculté des sciences de Lyon, où se déroule le reste de sa brillante carrière universitaire : professeur sans chaire (1963), puis titulaire, elle est chargée de la direction du Laboratoire de biologie et technologie des membranes, associé au CNRS, qui devient rapidement l’une des premières unités mixtes créées par le CNRS. Dans ce cadre, elle contribue à former de nombreux biochimistes qui ont effectué de brillantes carrières. Elle siège dans plusieurs commissions du CNRS et au comité des Sages de la DGRST (Délégation Générale à la Recherche Scientifique et Technique). De 1971 à 1974 elle dirige l’Unité d’Enseignement et de Recherche Chimie-Biochimie de l’université Claude Bernard Lyon 1. Elle est nommée officier des Palmes Académiques en 1975, officier dans l’ordre national du Mérite la même année et enfin chevalier de la Légion d’honneur en 1984. Elle décède à Lyon le 22 juillet 1995.
Après sa thèse, elle poursuit ses recherches sur le métabolisme oxydatif en se spécialisant sur les mécanismes moléculaires dont les mitochondries sont le siège. Elle met à profit les méthodes de fractionnement subcellulaire pour déterminer, sur différents modèles cellulaires les localisations membranaires et les interactions de plusieurs enzymes actifs dans le métabolisme oxydatif. Elle aborde également le domaine de la technologie en promouvant l’étude des enzymes greffés sur des membranes artificielles, dont elle compare les propriétés à celles qui sont observées dans les conditions naturelles. Ces travaux débouchent sur la réalisation d’électrodes employées dans les dosages enzymatiques de certaines molécules biologiques, par exemple le glucose. Sa réputation dépassait le cadre national. Elle entretenait des rapports suivis avec les biochimistes les plus éminents. L’un des signataires de cette notice peut attester que « Danièle » représentait en quelque sorte la biochimie française aux yeux de nombreux biochimistes américains des années 1970.
On ne saurait omettre sa passion pour la musique. Pianiste dans sa jeunesse, elle est assidue aux concerts donnés sous l’égide de la Société de musique de chambre, et elle anime pendant l’été des semaines musicales dans le Luberon ou en Ardèche, qui donnent lieu à des concerts publics.
Le président Maurice Jacob* présente Danièle Gautheron comme candidate à la titularisation dans la classe des sciences. Elle avait été élue membre correspondant le 3 décembre 1985, avant de devenir l’une des deux premières femmes élues membre titulaire, au fauteuil 8, section 1 Sciences, le 1er décembre 1987 (avec sa consœur Myriam Bros* élue dans la classe des lettres). Le 19 mars 1985 Danièle Gautheron présentait une conférence intitulée Les membranes et les enzymes, une coopération scientifique lyonnaise (MEM 40, 1986). Le 4 octobre 1988, elle consacre son discours de réception à La bioénergétique de Lavoisier à nos jours (MEM 43, 1989). Elle appartient à de nombreuses sociétés scientifiques françaises et étrangères, à commencer par la Société de chimie biologique et la Société chimique de France. L’éloge funèbre qui lui est consacré est prononcé par Jean-Eugène Germain*(MEM 50, 1996).
Notice sur les titres et travaux scientifiques de Danièle Gautheron, Lyon, 1963, 17 p. – Répertoire des scientifiques français, t. 3 : Biologie, Paris, DGRST, 1966, p. 128 – X., nécrologie, Regards sur la biochimie, 1995 ou 1996 (non retrouvé à ce jour) [Notes biographiques communiquées à par Catherine Godinot, CNRS, collaboratrice scientifique de Danièle Gautheron pendant de nombreuses années jusqu’à sa disparition].
Action de la nor-adrénaline et de l’hormone de croissance anté-hypophysaire sur le métabolisme d’un muscle lisse : l’uterus de rat, Paris, Impr. Foulon, 1959 – La recherche biologique en France, Paris : S.A.R.S.T., 1961).
Outre ces deux ouvrages, elle est l’auteur de nombreux articles, souvent avec ses collaborateurs, dans des périodiques scientifiques : Biochimie, Biophysica and biochimica acta (BBA), Journal of biological chemistry (JBC) ; citons : « Inhibition de la glycolyse anaérobie de l’utérus de rat par l’adrénaline et l’hormone de croissance antéhypophysaire. Influence de l’hypophysectomie », BBA 24, 1957, p. 385-388. – « Oxydation du glutamate dans des sarcosomes de cœur de porc : rôle respectif de la déshydrogénase directe et de la transaminase aspartique glutamique », CRAS 257, 1963, p. 2901-2903. – « Surface-bound aspartate amino-transferase on collagen films. Compared properties with native enzymes », BBA 391, 1975, p. 272-281. – « The markers of pig heart mitochondrial subfractions », Biochimie 60, 1978, p. 1289-1305. – « General and kinetic properties of pig heart rat mitochondrial adenylate kinase », BBA 611, 1980, p. 299-308. – « Coupled reactions of immobilized aspartate aminotransferase and malate dehydrogenase. A plausible model for the cellular behaviour of these enzymes », BBA 829, 1985, p. 58-68. – « Cyclic GMP, cyclic AMP, glucose at birth and maturation of rat liver mitochondria », BBA 936, 1988, p. 67-73. – « Structural mapping of catalytic site with respect to alpha-subunit and non-catalytical site in yest mitochondrial F1-ATPase using fluorescence resonance energy-transfer », JBC 268, 1994, p. 13178-13186.