Marc Antoine Louis est né le 11 août 1729 à Lyon, baptisé le 14 août 1729, appelé familièrement « le botaniste ». Il est conseiller du roi en la cour des monnaies (1749), sénéchal et sénéchal principal (charge acquise de Pierre Dareste le 30 août 1749 au prix de 19 600 livres). Son père, Jacques Annibal Claret* (1692-1776), président de la Cour des monnaies, trois fois prévôt des marchands, annobli par Louis XV en 1690 et membre de l’Académie, était marié à Agathe Gaultier de Dortan de Pusignan : ils eurent cinq filles et quatre fils. La famille des Claret de Fleurieu existe encore et possède le château de Laye à Saint-Georges-de-Reneins.
À Lyon, Marc Antoine a comme précepteur l’abbé J. Pernetti, étudie ensuite chez les jésuites, puis au collège d’Harcourt à Paris. Suivant la même voie que son père, il devient conseiller à la Cour des monnaies, charge qu’il occupera durant 20 années, puis président du bureau des finances, avant de se consacrer exclusivement à sa passion pour l’histoire naturelle. Zoologie et minéralogie l’attirent d’abord, puis la botanique sera l’objet des ses recherches favorites pour ne pas dire exclusives. C’est sur le terrain que se développent ses talents de naturaliste ; il parcourt le Lyonnais, le Dauphiné et l’Auvergne pour récolter roches et minéraux (mines du Lyonnais, du Forez et du Dauphiné), fossiles, insectes et, bien sûr, végétaux en un premier herbier. Ses collections de roches, minéraux, fossiles et coquilles rejoindront le muséum de Lyon en 1803. On retrouve cette passion de naturaliste collectionneur dans certaines publications comme le Voyage au mont Pilat (1770) où la moitié des 200 pages est consacrée à la botanique, l’autre étant partagée entre zoologie et géologie. Le récent article de C. Bange (MEM 14, 2015) donne toutes précisions utiles sur ses collections botaniques, sur sa contribution à la connaissance de la flore lyonnaise et à la diffusion du système linnéen en France.
En 1763, il installe le jardin botanique de la toute nouvelle école vétérinaire lyonnaise, avec les 600 plantes usuelles pour l’enseignement et aussi 1 200 plantes alpines ou étrangères ; il confie ensuite le jardin à son ami l’abbé Rozier. Ce sera l’occasion d’écrire un gros traité destiné aux élèves, Démonstrations élémentaires de botanique, rédigé en partie par Rozier (à qui on attribue souvent la paternité de tout l’ouvrage alors que le tome 1 appartient en totalité à La Tourrette ainsi que le plan, les préfaces et les tables) ; les éditions 3e et suivantes seront reprises et complétées par Gilibert*.
Il constitue et enrichit sans relâche un jardin aux Chazeaux sur les pentes de la colline de Fourvière et un autre, plus grand, dans la propriété de la Tourrette, avec plus de 3 000 espèces qu’il récolte en France et Europe (Italie, Angleterre) ou fait venir de pays lointains qu’il tente d’acclimater dans une pépinière. Il correspond avec Linné, Haller, Adanson, Villar, Jussieu, Voltaire et bien d’autres. Il herborise avec de nombreux confrères dont Jean-Jacques Rousseau (1768 en Chartreuse, 1770). Il avait publié de nombreux ouvrages de botanique, diverses notes de paléontologie, et laissé beaucoup de manuscrits à l’académie. En 1785, Chloris lugdunensis sera le catalogue des plantes lyonnaises (et régionales) en latin.
L’herbier de La Tourrette a été confié au Jardin botanique de la ville au cours du xixe siècle, malheureusement en majeure partie intégré à l’herbier général, sauf l’herbier des algues et fougères qui a pu être isolé. Un portrait de Marc-Antoine, âgé de 18 ans, a été peint par J. Valade, peintre du roi, et appartient à sa famille.
Décédé Claret Latourrette le 1er octobre 1793 à Lyon (EC, AM Lyon).
Alors que son père, Jacques Annibal, est membre des deux académies lyonnaises, Marc-Antoine est élu, lui aussi, à l’Académie des sciences et belles-lettres le 2 avril 1754 ; reçu en séance publique le 23 avril, il remercie et prononce son discours de réception sur Le sentiment dans les ouvrages d’esprit (2e lecture le 7 mai) ; Jacques Annibal est désigné dans les registres comme M. de Fleurieu, et son fils comme M. de La Tourrette. Après la fusion des deux académies (automne 1758), Marc-Antoine sera président en 1761, secrétaire général de la classe des sciences de janvier 1767 à 1793. Très actif, il rédige les registres, alternativement avec le secrétaire de la classe des lettres, tient la correspondance, classe et note les manuscrits, les pièces des prix, etc.
Membre correspondant de Fougeroux de Bondaroy à l’Académie des Sciences le 7 mars 1772, il était aussi membre des académies de Nancy 1761, Dijon 1776, Montpellier 1783 et Florimontane 1790 ; il appartenait à de nombreuses sociétés étrangères : Berne, Florence, Sienne, Bologne, Turin, (liste complète: AcMs352 f° 515).
La Tourrette a prononcé huit éloges de ses confrères titulaires ou associés : Dugaiby 1768, Deville 1771, Pouteau 1775, Noyel 1775, Crozet 1776, B. de Jussieu 1777, de Brosses 1777, Mathon de La Cour 1777, de Montmorillon 1780.
Michaud. – Dumas. – Hoefer 29, col.848-849. – A. Magnin, Claret de La Tourrette, sa vie, ses travaux, ses recherches sur les lichens du Lyonnais, Paris : Baillère, 1885, 242 p. – A. Locard, « Marc Antoine Claret de la Tourrette », Ac 1900, p.30, 58-59. – A. Magnin, « Prodrome d’une histoire des botanistes lyonnais », Bull. Soc. Bot. Lyon 31, 1906, p.1-72 (+ additions et corrections, 1907 et 1910, 70 et 67 p.). – E. T. Hamy : « A.-L. de Jussieu et Claret de la Tourrette (1773-1793) », MEM 10, 1910, p. 101-111. – H. Duval, « Nouveaux documents sur Claret de la Tourrette », ASLL 59, 1912, p. 227-239 (lettres de Romé de l’Isle 1874, p. 227-229 ; lettre de La Tourrette à La Croix, p. 229-231 ; catalogue des ouvrages imprimés et manuscrits de Claret, p.231-239). – P. Jacquet, « Un botaniste lyonnais méconnu du dix-huitième siècle : Marc-Antoine Claret de La Tourrette (1729-1793) », BSLL 68-4, 1999, p. 77-86. – C. Bange, « Claret de la Tourrette et la diffusion du linnéisme en France », MEM 14, 2015, p. 86-94. – www.inventaire-condorcet.com/Inventaire/Personnes_institutions?ID=462
Le dossier La Tourrette de l’Académie des Sciences comprend de nombreuses petites pièces, un portrait et surtout 17 lettres adressées par Claret à Bernard et Antoine Laurent de Jussieu.
Aucun inventaire complet des manuscrits ou de la correspondance de La Tourrette n’a été réalisé : on a des inventaires partiels à la BML, à l’Académie des sciences, à la bibliothèque de Genève, etc. Parmi les très nombreux manuscrits conservés à l’Académie on peut retenir : Dissertation sur la lithologie, 26 novembre 1749, Ac.Ms221 f°46-52 [sans grand intérêt]. – Observations sur l’histoire naturelle de la mer, 23 juillet 1736, Ac.Ms217 f°39-51 : présentation biographique de Louis Ferdinand comte de Marsilly qui était associé-correspondant de l’académie depuis 1715, suivie d’une analyse détaillée de son texte. – Mémoire en forme d’extrait sur l’ouvrage de Mr le comte de Marsilli et observations sur son système du corail, 22 juillet 1757, Ac.Ms217 f°53-64 : à la lumière des connaissances plus récentes, Claret montre qu’il s’agit d’un animal et non d’un végétal avec des « fleurs » comme le croyait l’auteur. – De l’histoire des gallinsectes... de M. de Réaumur avec des recherches sur le kermès, le Coccus polonicus [...] et la cochenille [...] leur utilité dans la médecine et la teinture..., 5 décembre 1758, Ac.Ms223 f°57-80 : il traite des gallinsectes et de diverses cochenilles utilisées en médecine et en teinture ; c’est à la fois un inventaire descriptif et surtout un catalogue de leurs très nombreuses utilisations. – Le pasteur suisse Élie Bertrand avait envoyé à La Tourrette le manuscrit de l’article « Bélemnites » de son futur Dictionnaire universel des fossiles (Dissertation sur les bélemnites, 1er avril 1759, Ms217 f°23-28) : ce dernier lui répond par une lettre qui reprend les connaissances sur ces fossiles et démontre qu’il ne peut s’agir d’animaux comparables aux holothuries contrairement à l’opinion de Bertrand (Lettre à M. Bertrand pasteur de Berne en réponse à sa dissertation sur les bélemnites, 12 janvier 1760, Ac.Ms 217 f°91-105) ; convaincu, celui-ci intègre in extenso la lettre de Claret dans le dictionnaire, soit vingt pages dans son article qui n’en comportait que sept (Dictionnaire, Avignon : Chambeau, 1763, 34 + 606 p., article p.73-100, Claret p. 80-100). – Description d’une production végétale extraordinaire, précédée de quelques réflexions sur les monstres végétaux, 1760, Ac.Ms222 f°92-107, 3pl. – De Fleurieu : Recherches sur la bonté de l’eau et la manière de la purifier (Ac.Ms154 f°121-128, s.d.). – Nouvelles réflexions sur les eaux de puits et en particulier sur celles de Lyon, 12 mai 1761, Ac.Ms273-I f°184-195, 2 fig. – Recherches et observations sur les os fossiles trouvés en Dauphiné dans une terre de Mr. de Valernod en 1762, Ac.Ms218 f°145-152 : notes de correction de la main de Claret ; envoyé à l’Académie des Sciences et publié dans les Mémoires en 1780). – Observations sur quelque bézoards tirés des animaux, 1762, Ac.Ms223 f°101-104 : ce sont des calculs pierreux dans rein, vessie, vésicule, mais aussi des pelotes de poils dans la panse des ruminants. – Tableau de l’analyse végétale ou abrégé du système chymique (extr. cours de chimie de M. de Vallernod 1763), Ac.Ms216 f°42-58. – Méthode pour faire l’huile de pépins, septembre 1771, Ac.Ms226 f°2-3. – Végétation observée dans le Lyonnois, année 1772, 16 janvier 1773, Ac.Ms120 f°207-208. – Époques de la végétation dans le Lyonnois, année 1774, Ac.Ms120 f°209-210. Il existe aussi un fonds spécial de papiers personnels dont la provenance n’a pas été élucidée (AcMs352).
En 1827 les Archives historiques et statistiques du département du Rhône, (t. V, p. 211-212) publient un extrait du procès-verbal de la séance de l’Académie du 4 août 1772 au cours de laquelle « M. de la Tourrette a lu un mémoire sur une mouche extraordinaire, du genre cinips, qu’il a trouvée dans la ville de Lyon » et que le chevalier Von Linné l’a invité à observer et décrire.
Une double liste dressée par Bollioud-Mermet un peu avant 1789 (AcMs271) comporte 16 titres (p. 165-167) et 45 titres (p. 208-211), mais les références sont trop souvent partielles ou inexistantes, et il n’est pas certain qu’il s’agisse toujours de vraies publications car articles de journaux, manuscrits et vraies publications sont mélangés (Ac.Ms 271). Nous retiendrons :
« Conjectures sur l’origine des bélemnites », in Élie Bertrand, Dictionnaire universel des fossiles propres et des fossiles accidentels […], 1763, La Haye : Gosse et Pinet, Avignon : Louis Chambeau, 34 + 606 p. ; article « Bélemnites » p. 73-100, lettre Claret p. 80-100. – Os fossiles... (voir titre du manuscrit 1762), Mém. présentés Acad. royale Sci. et lus dans assemblées 9, 1780, p. 747-767. – Avec F. Rozier, Démonstrations élémentaires de botanique, contenant les principes généraux de cette science, l’explication des termes, les fondemens des méthodes, et les élémens de la physique des végétaux [...], Lyon : Bruyset, 1766, vol. 1, XVI + 272 +XXVI p., vol. 2, VIII + 652 + XLIV p.; 2e éd., Lyon : Bruyset, 1773, vol. 1, XL + 316 p., 8 pl., vol. 2, VIII + 652 + XLIV p. ; 3e éd. corrigée et augmentée par Gilibert, Lyon : Bruyset, 1787, 3 vol. ; 4e et 5e éd. 1793, 1796. – Voyage au mont Pilat dans la province du Lyonnais, contenant des observations sur l’histoire naturelle de cette montagne, & des lieux circonvoisins ; suivi du catalogue raisonné des plantes qui y croissent, Avignon : Regnault, 1770, VIII+224 p. – « Lettre de M. de La Tourrette sur le variolites de la Durance », Journ. Physique, IV, 1774, p.320-330. – « Recherches et observations sur le Carpeau de Lyon », par M. de la Toursette [sic], Journ. Physique, octobre 1775, p. 271-280. – Articles « Carpeau » et « Carpio » (non signés, mais le manuscrit autographe existe dans AcMs352 f° 522-525) de l’Encyclopédie Diderot-D’Alembert, uniquement dans l’édition de La Serre, 1778, repris dans l’éd. Lausanne et Berne, 1779 6-1, p. 372-377. – « Lettre de M. de La Tourrette concernant les observations de M. Sage sur la mine rouge de cuivre », Journ. Physique 14, 1779, p. 489-491. – « Dissertation botanique sur le Fucus helminthocorthon ou vermifuge de Corse, improprement appelé Mousse, Coralline, etc., contenant des recherches sur quelques plantes cryptogames », Journ. Physique 20, 1782, p. 166-184, pl.1. – Chloris lugdunensis, Lyon : Bruyset, 1785, VIII + 44 p. (publié dans Gilibert, Systema plantarum europae, t. I). – Enumeratio Lichenum tractus lugdunensis, 1806, publié par Gilibert dans Histoire des plantes d’Europe, t. 3.