Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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La recherche est faite par sous chaîne, insensible à la casse et aux accents.

ROUGIER Jacques (1920-2005)

par Nicole Dockès-Lallement.

 Né à Lyon le 27 février 1920, dans une vieille famille lyonnaise, il est l’arrière arrière-petit-fils du docteur Louis-Auguste Rougier*, l’arrière-petit-fils de Paul Rougier*, professeur à la faculté de droit de Lyon. Son grand-père est Louis Antoine Rougier (Lyon 5e 26 février 1857-Lyon 1er 29 novembre 1939), médecin ORL. Son père est Antoine Marie Rougier (Lyon 2e 20 février 1897-Saint-Alban-de-Roche [Isère] 18 janvier 1985), industriel, marié le 2 avril 1918 Lyon 2e avec Louise David (1898-1993).

 Pendant la Deuxième Guerre mondiale, directeur des Établissements G. Durrschmidt, 14 chemin de Montbrillant à Lyon, Antoine Rougier fournit une bombe plastic pour faire sauter des installations. La Gestapo l’arrête le 9 décembre 1943, l’interne à Lyon à la prison Montluc. Faute de preuve, il est libéré le 31 décembre 1943. Comme son père, Jacques Rougier va entrer dans la Résistance. Après une seule année d’études de médecine, il est mobilisé en juin 1940 au Fort de la Duchère comme infirmier militaire de 2e classe, dans la 14e section des infirmiers militaires (S.I.M.). Il est ensuite versé aux chantiers de jeunesse à Rumilly, groupement n° 7, où il est alors nommé chef d’atelier ; son expérience du scoutisme et son caractère créent une atmosphère amicale et chaleureuse, selon le souvenir d’un de ses compagnons, Jules Traeger*. Après avoir repris la vie civile, il participe de différentes manières à la Résistance. Il commence par rendre quelques services demandés par l’un de ses amis scouts, René Aubertin ; puis, en mars 1943, il devient agent de liaison au sein du réseau Jade-Fitzroy. Il lui arrive de loger dans son appartement, 15 rue de Bonald, des clandestins, des blessés, des aviateurs anglais. Il fait un travail de traduction de français en anglais des informations sur le trafic des trains allemands qui passent par Lyon. Lorsque son ami René Aubertin est arrêté (déporté au camp de Dachau dont il reviendra), il n’a plus de contact avec le Réseau Jade-Fitzroy. Pour continuer, il aide le médecin Eugène Jeune comme agent recruteur du Service Périclès pour l’École nationale des cadres du maquis de Savoie, Haute-Savoie et Jura ; il dirige vers les maquis les jeunes gens qui veulent éviter le STO (Service du travail obligatoire) . À son tour, Eugène Jeune est arrêté et déporté (il ne reviendra pas) ; Jacques Rougier devient alors agent de liaison au sein du Comité national des médecins de la Résistance ; il organise l’évasion de personnel hospitalier, de blessés, de malades menacés d’arrestation. En 1945, alors que les armées alliées sont à Lyon, il est affecté comme médecin lieutenant dans la 7e armée américaine (médecin des displaced persons dans la région de Kassel). Il termine la guerre comme capitaine.

 Il épouse à Lyon le 19 juin 1943 Élisabeth dite Babet Garin (Lyon 21 décembre 1918-23 août 2012), fille du professeur Charles Garin* ; ils ont quatre enfants : Michel (né en 1944) ; Claude Odile (née en 1945) épouse Henri Dufer ; Denis (né en 1954, médecin) ; et Charles-Antoine (né en 1956).

 Après une longue maladie, Jacques Rougier décède le 14 septembre 2005.

 Après des études secondaires au lycée Ampère. il avait commencé en 1939 à Lyon des études de médecine, momentanément interrompues par la mobilisation et les chantiers de jeunesse. Il retourne à la faculté de médecine, passe l’externat à l’automne 1942. Interne en 1946, préparateur en anatomie en 1947, il choisit de se spécialiser en ophtalmologie et soutient en 1950 une thèse de médecine sur cinq cents cas de greffe de cornées lamellaires, méthode thérapeutique alors nouvelle pratiquée par Louis Paufique. En 1949, il fonde et devient le secrétaire de rédaction des Conférences lyonnaises d’ophtalmologie. Assistant-chef de clinique en ophtalmologie en 1952, il réussit le concours d’ophtalmologiste des hôpitaux de Lyon en 1961. De 1973 à 1981, il est chef du service de la consultation neuro-ophtalmologique à l’Hôpital neurologique et se spécialise dans les plaies, les traumatismes et les tumeurs de l’orbite. De 1981 à 1985, il dirige le service d’ophtalmologie du Centre hospitalier Lyon-Sud. En 1982, il lance, avec la collaboration de François Vital-Durand, un centre de dépistage des troubles de la vision chez le nourrisson, le centre Bébé-Vision, qu’il préside jusqu’à sa retraite en 1985.

 Médaille commémorative de la guerre de 1939-1945-mention Libération. Chevalier de l’ordre du Mérite (1975).


Académie

Membre correspondant le 11 juin 1991, il est élu titulaire le 1er décembre 1992 au fauteuil 1, section 3 Sciences, sur rapport de Paul Guinet* du 3 novembre 1992. Le 12 mars 1991, sa première conférence porte sur les membres de sa propre famille qui ont été membres de l’Académie : Une famille lyonnaise et l’Académie (MEM, 1992 ; le résumé publié comporte quelques erreurs) ; le 6 avril 1993, il prononce son discours de réception : La Pérouse, gentilhomme des mers (MEM 1994). Autres communications : 13 juin 1995, De l’œil, des dieux et des hommes (MEM) 1996 ; 13 octobre 1998, La bataille de Lépante, 1571 (MEM, 1999) ; 22 octobre 2002, Quelques borgnes célèbres de l’histoire (MEM 2005). J. Rougier a aussi prononcé l’éloge funèbre de Jacques-Michel Robert (MEM 1998), et de Jean Gaillard (MEM 2005).

Il fait partie de nombreuses sociétés d’ophtalmologie : président de la Société d’ophtalmologie de Lyon ; administrateur de la Société française d’ophtalmologie (1873-1981) ; président de la European Society of Ophthalmic Plastic and Reconstructive Surgery (1982-1988) ; membre de la Société d’oto-neuro-ophtalmologie de Lyon ; membre de la Société européenne d’ophtalmologie ; membre de la Royal Society of Medecine de Londres ; membre du Groupement francophone d’histoire de l’ophtalmologie.

Participe à de nombreux congrès internationaux d’ophtalmologie : communication à New York (1966), communication à Londres (1967), rapporteur à Amsterdam ( juin 1968), puis encore à Amsterdam (avril 1970), rapporteur à Bologne (avril 1972), à Trêves (sept. 1984), président de séance à Rhodes (mai 1987), président de séance à Bruxelles (mai 1988). Président du congrès européen de la Société européenne de chirurgie plastique oculaire. Missions à l’Institut du cancer de Milan (1965) et à l’Hôpital gouvernemental et militaire de Maadi au Caire (1970).

Bibliographie

J. Traeger*, « Éloge de J. Rougier », MEM 2005, p. 27-29. – B. Permezel*, Résistants à Lyon, Villeurbanne et alentours, Lyon : BGA Permezel, 2003. – Carole Burillon, « In memoriam Jacques Rougier », Rev. tonic, n° 116, 2016.

Publications

Dans sa spécialité médicale, il publie 171 articles et fait 350 communications référencées dans PubMed. « Statistique de 180 tumeurs de l’orbite ». – « Anatomie des artères ciliaires longues postérieures », Leçons d’anatomie et de physiologie ophtalmologiques, Monte-Carlo : Dulcis, s.d., 10 p.-2 pl. – Avec E. Marin, « Système artériel vertébro-basiliaire », Leçons d’anatomie et de physiologie ophtalmologiques, Monte-Carlo : Dulcis, 1968, 12 p., 13 pl. – Avec Ch. Boudet, « Les moyens de diagnostic de l’exophtalmie unilatérale », Cahiers médicaux lyonnais 49, 1973, n° 35, p. 4367-4380. – Rapport sur la chirurgie plastique orbito-palpébrale, Paris, New York, Barcelone, 1977, XVI + 498 p., [rapp. traduit en anglais]. – Avec Jean Maugery, Ophtalmologie pour le praticien, Villeurbanne : SIMEP, 1979, 167 p., ill. ; 2e éd., Villeurbanne : SIMEP, 1989, IX + 174 p., ill. – Avec Paul Tessier Plastic surgery of the orbit and eyelids, New York et Paris, XII + 402 p.

Publications historiques : « Cours d’opérations de chirurgie [paupières et cataracte] démontrées au jardin royal par M. Dionis, premier chirurgien de feues Mesdames les Dauphines et maître chirurgien juré du Roy à Paris (1672) », L’ophtalmologie des origines à nos jours 6, Annonay : Lab. H. Faure, 1990. – « Philippe II de Macédoine “le Borgne” », Coup d’œil, n° 33, août-sept. 1991.