René Henri Marius Chancrin est né à Villeurbanne, 9 bis rue de la Gare, le 2 avril 1911, fils de Noël Eugène Chancrin (Givors 16 juillet 1877-Riverie 5 février 1962), employé, puis inspecteur de l’OTL à Lyon, et de sa première épouse Henriette Françoise Granger (vers 1880-1927). Témoins : Claudius Davray, mécanicien, et François Rhonat, plâtrier.
Études secondaires chez les Lazaristes à Lyon. Son père tente de le convaincre de poursuivre des études d’ingénieur, mais sa mère discerne son talent et l’encourage à entrer à l’école des Beaux-Arts. En effet, dès son jeune âge, attiré par la peinture, il passe beaucoup de temps au palais Saint-Pierre. En 1927, entré à l’école des Beaux-Arts de Lyon, il bénéficie de l’enseignement d’Auguste Morisot et de Jacques Laplace, et il participe au Salon des Jeunes. En 1928, il est invité au salon d’Automne de Lyon où il exposera régulièrement par la suite. Il est alors peintre de paysage. En 1929, il achète un atelier 9 rue Tronchet. En 1931, il est invité au salon du Sud-Est et y présente des œuvres chaque année. Il y sera admis comme sociétaire en 1933. En 1934, il rejoint le groupe des Nouveaux fondé en 1930 avec Jean-Albert Carlotti, Antoine Chartres, Marc Aynard, Henri Vieilly et Pierre Pelloux*. Il expose aussi à Paris. En 1935, il est professeur-directeur de la classe de dessin du Clos-Jouve, dans des baraques Adrian laissées par l’armée. En 1937, il participe à l’exposition L’art lyonnais contemporain à la chapelle du lycée Ampère. Il rencontre Marcel Michaud qui devient son ami et l’expose dans sa galerie Folklore.
Mobilisé en 1939 dans l’artillerie coloniale, il est fait prisonnier et envoyé dans un camp en Bavière jusqu’en 1942. À son retour, il est nommé professeur de la classe de Principes à l’école des Beaux-Arts de Lyon. Il aura parmi ses élèves Jacques Lescoulié, Jacques Truphémus, Henri Lachièze-Rey, Pierre Doye, etc. En 1945, il expose au palais Saint-Pierre. En 1957, il fait partie de l’exposition Artistes lyonnais contemporains au musée d’Art Moderne de la Ville de Paris. De 1958 à 1977, il demeure avenue Vallioud à Sainte-Foy-lès-Lyon et devient président fondateur du Comité culturel communal fidésien. Il expose régulièrement à la galerie de Marius Mermillon, puis à la galerie Verrière. En 1968, il participe à l’exposition du musée de Saint-Étienne Nouvelle Figuration. En 1969, il devient membre de la commission d’achats du musée Saint-Pierre.
Peintre de la réalité, il passe sa vie à observer la nature avec patience et minutie, et exprime la vie silencieuse d’objets usuels, les vies « coyes » (« silencieuses » en vieux français) selon l’expression reprise par Chancrin à la suite de peintres du xvie s. comme Lubin Baugin par exemple. Il avait une collection d’insectes et de pierres qu’il mettait en scène avec une rigueur quasi scientifique. Il a peint des paysages, mais il est surtout connu pour ses tableaux d’objets peints sur des fonds unis sur lesquels ils se détachent de façon sculpturale. Sa technique à l’huile est très fine et serrée, très lisse, sans aucune visibilité du coup de pinceau. Son métier touche à l’hyperréalité. Marcel Michaud a joué un rôle dans son orientation vers le fini, l’inattendu, presque surréaliste. Il travaille lentement, ne réalisant que trois ou quatre tableaux par an, car il recherche la perfection d’un réalisme d’une profonde intériorité silencieuse. Il est mort à Fréjus le 12 juillet 1981, après avoir été atteint au début de la même année d’une paralysie du côté droit. Il a été inhumé à Veilly-la-Genète (Saône-et-Loire).
Villeurbanne avait organisé à l’Hôtel de Ville une grande exposition de ses œuvres, 50 ans de peinture, de novembre à décembre 1981, rétrospective qu’il avait commencé à préparer, mais à laquelle la mort l’empêcha d’assister.
Il avait épousé à Lyon 1er, le 6 juin 1931, Germaine Joséphine Claudia Lecollier : d’où Gilles (1933) et Dominique (1942). Divorcé en 1948, il s’était remarié le 28 avril 1950 à Lyon 3e avec Joséphine Marcelle Devin ; d’où Jean-Luc (1955) et Frédéric (1957).
Présenté par Louis Charrat*, qui le considère « comme le peintre le plus marquant de sa génération », il est élu le 10 juin 1969 au fauteuil 5, section 4 Lettres, libéré par Pierre Combet-Descombes*. Il prononce son discours de réception le 3 mars 1970 : Les constantes de la peinture lyonnaise de Berjon à Combet-Descombes (MEM 28, 1975). Aymé Camelin* a prononcé son éloge funèbre le 15 juillet 1981 lors des obsèques en l’église de Veilly-la-Genête (MEM 36, 1982, photo). Le 30 novembre 1982, il a donné une communication titrée René Chancrin et sa peinture (MEM 37, 1983), assortie de la présentation de diapos d’une grande partie des tableaux de l’exposition de Villeurbanne.
Membre de l’Académie du Gourguillon et des Pierres Plantées le 16 mars 1974, sous le pseudonyme de Géni Delarize, pour rappeler son enfance lorsqu’il descendait de la rue de la Gare jouer au bord du ruisseau.
Jean-Jacques Girard, René Chancrin, un grand peintre lyonnais, 1981, 22 p. – Bernard Gouttenoire, Dict. des peintres et sculpteurs à Lyon aux xixe et xxe siècles, Châtillon-sur-Chalaronne : La Taillanderie, 2000. – Jean-Claude Gauthier, Brigitte Roussey et Jean-Jacques Lerrant [qui a beaucoup soutenu Chancrin dans ses articles], René Chancrin, Hommage 1911-1981, catalogue des manifestations de la Maison Ravier et de Sainte-Foy-lès-Lyon, Lyon : éd. Stéphane Bachès, 2004, 80 p.
Musée Paul Dini à Villefranche-sur-Saône ; Fondation Léa et Napoléon Bullukian ; musée de Saint-Étienne ; musée d’art moderne de New York ; mairie de Sainte-Foy (nature morte de 1944) ; mairie de Villeurbanne, etc.
Une rétrospective s’est tenue à la Maison Ravier à Morestel (13 juin-5 septembre 2004), ainsi qu’à Sainte-Foy-lès-Lyon (17-26 septembre 2004).