Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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La recherche est faite par sous chaîne, insensible à la casse et aux accents.

CROZET Guillaume (1724-1775)

par Pierre Crépel.

 Né à Saint-Paul-en-Jarez, près de Saint-Chamond (Loire), le 23 novembre 1724, de Jean Crozet (1677-Saint-Paul-en-Jarez 20 mai 1741), marchand de fer, et de Catherine Dubost (Chazelles-sur-Lavieu 1688-Saint-Paul-en-Jarez

 22 février 1743), il est baptisé le 26. Parrain, Guillaume Morel, avocat en parlement ; marraine, Antoinette Cotte. Disposé d’abord par son père à suivre son commerce, il déclare son goût pour l’étude ; son père n’y porte pas obstacle et le met en 1738 au séminaire de Saint-Irénée de Lyon. Il écoute avec ardeur les leçons de ses maîtres et désire, dans un premier temps, prendre l’habit ecclésiastique. Ses supérieurs l’envoient en 1744 faire son cours de théologie à Valence, il y est reçu maître ès arts et bachelier en l’université. Aux études de son nouvel état, il joint celle des mathématiques et un attrait puissant l’élève vers l’astronomie. Il fait le voyage de Paris pour commencer son cours en Sorbonne, mais le penchant dominant pour les sciences l’entraîne aux leçons de mathématiques et d’astronomie que donnait l’abbé de La Caille au collège Mazarin ; il déserte alors l’école de théologie et l’état ecclésiastique. Ses talents et ses succès lui procurent en 1748, la chaire de professeur royal d’hydrographie à Rochefort-sur-Mer. Il y est agrégé en 1752 à l’Académie de marine, où il présente plusieurs mémoires dont un seul a été retrouvé : celui où, s’inspirant de l’abbé de La Chapelle, il préconise la forme du paraboloïde pour les porte-voix, préférable à la forme conique habituellement employée. En 1754, après un voyage d’observations astronomiques à Malaga, il quitte son poste pour rejoindre sa famille. Son père l’engage à s’établir à Lyon et à entrer dans le commerce tenu par Cochet, le mari de sa sœur. Avec exactitude et esprit géométrique, il supplée ce dernier, devenu aveugle en 1760 et décédé en 1762, en attendant que ses neveux soient en état de reprendre ce commerce. Il n’en continue pas moins ses travaux mathématiques et astronomiques, pendant une vingtaine d’années, mais sous l’anonymat, dans l’Almanach de Lyon. Il reprend ainsi le flambeau de l’abbé Cayer*, décédé en 1754. Il y donne des observations, mais aussi des explications des calculs, notamment pour les tables du soleil et de la lune, les cadrans solaires, les méridiennes, le mouvement des horloges, pour les passages de Vénus devant le disque du Soleil de 1761 et 1769, pour l’éclipse de Soleil de 1764, la comète de 1769. Ainsi l’Almanach devient, grâce à lui, un vrai traité d’astronomie en feuilleton et une leçon de la raison face aux préjugés. C’est seulement en 1768 qu’il est élu à l’Académie ; le public est étonné d’y voir entrer un négociant, car ses travaux scientifiques anonymes sont ignorés. En 1769, il effectue un voyage en Hollande et en Angleterre, puis dans le midi de la France. Il observe diverses comètes et en calcule les trajectoires, notamment celles qu’a découverte Messier le 14 juin 1770 (D/ 1770 L1, dite aussi comète de Lexell) et le 10 janvier 1771 (C/1771 A1). En 1771, il a une polémique publique avec l’architecte Terrier à propos de la méridienne des Cordeliers. Lalande est sollicité comme arbitre. Attaché à la vie rurale, il se retire peu après alternativement à Saint-Chamond et près de Rive-de-Gier, au village de Grand-Croix (Saint-Paul-en-Jarret, auj. -en-Jarez, par décret du 23 décembre 1914.). Il envoie des notes sur les carrières de charbon de Rive-de-Gier à Jean François Clément Morand (membre de l’Académie des sciences de l’Institut de France, et associé de l’Académie de Lyon), que celui-ci publie « dans ses cayers des arts », c’est-à-dire l’Art d’exploiter les mines de charbon de terre (1768-1779, 6 parties in-fol.). Il contribue à éteindre l’incendie des carrières bitumeuses du Mouillon, près de Rive-de-Gier, qui a pris le 2 décembre 1771 (Gazette de France, 27 décembre 1771).

 Sa santé s’altère tout à coup en juin 1775, il crache du sang et meurt chez lui le 30 août. Il est inhumé le 31 dans l’église de Saint-Paul-en-Jarez. La Tourrette*, dont il était ami, décrit longuement sa vie privée, son caractère, sa franchise, son attachement à la campagne, aux travaux manuels, à la musique, sa bibliothèque...


Académie

Le 10 mai 1768, La Tourrette annonce que Crozet « avoit eu l’honneur de se présenter chès M.M. les officiers de l’académie pour témoigner le desir d’être admis à la place vacante (12 janvier 1768) dans la classe des sçiences, par la mort de M. L’abbé Dugaibi* », spécialiste de géométrie pratique. Il est élu le 7 juin « pour être reçu dans la plus prochaine séance publique », c’est-à-dire le 6 décembre. Ce jour-là, après son remerciement, il lit une Dissertation, ou Abrégé historique sur l’origine, les progrès & l’utilité de l’Astronomie. Il est ensuite assidu quelques années, mais son nom n’apparaît plus qu’épisodiquement (10 décembre 1771, 23 juin 1772...) à partir du moment où il se retire dans la région de Saint-Chamond. Il garde néanmoins des contacts avec l’Académie et assiste parfois à ses séances. Il n’a pas été directeur semestriel. Son éloge est prononcé par La Tourrette le 3 décembre 1776.

Bibliographie

Bollioud, p. 235-237. – Dumas I, p. 312. – Éloge, par La Tourrette, AcMs124 f°224-236. – Gutton 1985. – François Casati-Brochier, « Un négociant académicien : Guillaume Crozet (1724-1775) », Rive Gauche 144, mars 1998, p. 25-26.

Manuscrits

Mémoire sur les portevoix, lu à l’Académie royale de marine en 1752, transmis par une lettre du 28 mai 1756 (Ac.Ms228 f°56-61) [dont nous n’avons pas trouvé trace de lecture à Lyon]. – Dissertation historique sur l’origine, les progrès et l’utilité de l’astronomie, 6 décembre 1768 (registres). – Observations sur la Théorie des comètes et spécialement sur celle de 1769 (28 novembre 1769) et sur une autre sans queue aperçue en 1770 (3 et 10 juillet 1770), éléments et calculs sur ces phénomènes (31 juillet et 7 août 1770) (Ac.Ms205 f°89-95). – Expositions, calculs et résultats des opérations astronomiques faites à l’observatoire du Collège de la trinité, 29 novembre et 4 décembre 1770 (Ac.Ms307 f°176-187). – Mémoire sur l’apparition de la Comète du mois de janvier 1771 que les calculs font soupçonner n’être pas connue, 12 mars et 9 avril 1771. (Ac.Ms205 f°97-99). – Mémoire sur la parallaxe du soleil, 6 août 1771 (publié dans Almanach 1773). – Construction du paraboloïde en bois de chêne et Projet de perfectionner les lampes à Réverbère, les portevoix, 28 août 1771. – Dissertation sur les progrès de l’astronomie sous le règne de Louis XV, 6 décembre 1774 (séance publique).

Publications

Réponse du sieur Terrier, Architecte à Lyon, au Mémoire, lu à la séance publique de l’ASBLA, le 4 Décembre 1770 [...], Lyon : Aimé de la Roche, 8 février 1771. – Réfutation du mémoire imprimé de M. Terrier au sujet de la Méridienne de la Place des cordeliers, Lyon : Aimé de la Roche, 13 mars 1771. – Lettre anonyme à l’éditeur de la feuille hebdomadaire de Lyon sur les défectuosités de la méridienne de la place des cordeliers, Lyon 1771, imprimée (lu le 11 juin 1771) [non trouvée dans les Affiches de Lyon de 1771]. – Divers articles sur l’astronomie, la gnomonique, la géographie, la physique et autres sujets insérés dans les almanachs de Lyon depuis 1756 jusqu’en 1776.