Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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La recherche est faite par sous chaîne, insensible à la casse et aux accents.

BOULARD Catherin François (1749-1793)

par Jean Burdy.

 Catherin François est né à Lyon, paroisse Saint-Paul : « Le 17 mars 1749 a été baptisé Catherin François né hier fils légitime d’André Boulard bourgeois de Lyon et de dame Claudine Favre, parrain Catherin Boulard oncle paternel et marraine dlle Françoise Favre tante maternelle. » Le cousin Simon Claude Boulard de Gatellier, échevin de Lyon en 1778-1779, est présent au baptême. Le père, André Boulard, né en 1723, architecte, domicilié près du Change puis rue de la Vieille-Monnaie, est parti pour Saint-Domingue en 1771, puis on perd sa trace. Catherin François épouse le 9 janvier 1785 Claudine Aimée Michalant, en présence des témoins requis parmi lesquels Simon Claude Boulard de Gatellier. L’ex-libris de Catherin François est aux armes des Boulard.

 Catherin François Boulard apparaît dans les almanachs de la ville en 1774 comme architecte, rue de la Vieille-Monnaie. Il a été formé par Guillaume Marie Delorme* dont il sera l’héritier. Il a été employé au canal de Givors, à l’église de Pérouges et en divers châteaux et bâtiments à Lyon et dans la région. Selon G. Bruyère*, il est adjoint à l’inspection de la voierie pour le bureau des finances de Lyon en 1780, voyer-inspecteur du bureau des finances de 1783 à 1790. C’est à ce titre qu’il lève, avec son collègue Cl. Gros, un certain nombre de plans d’alignement que conservent les Archives municipales : rue de la Tourrette, 8 mars 1780 (3 S 162) ; rue Dubois et rue Chalamont, 25 juillet 1780 (3 S 738) ; rue du Puits-du-Sel, 20 octobre 1781 (3 S 756) ; rue Sainte-Hélène, 1783 (3 S 763). Voir également aux archives du Rhône : ADR 2 Pl 149/a-b (1780), 2 Pl 144 (en collaboration avec Gros et Maigre, 1780, 1783 et 1785).

 Vient l’époque de la Révolution. En 1790, le 11 janvier, Boulard participe à une vente et à l’expertise de biens nationaux. (P.V. des séances des Corps municipaux…, BML 126347). Avec Baffert et Buisson, il est l’un des trois voyers inspecteurs nommés par le conseil général de la commune de Lyon, le 7 mars 1792. Il prête serment, le 12 mars, devant le Bureau municipal. Il effectue de nombreuses expertises avec son confrère É.G. Buisson (ADR Bp 2599, année 1790, passim), notamment : Expertise des architectes-voyers-inspecteurs de la commune de Lyon, Baffert, Boulard et Buisson, sur l’état de solidité de la salle de spectacle nouvellement établie dans la ci-devant église de Saint-Charles. 12 octobre 1792 (BML Fonds Coste Ms51).

 Le 28 août 1792 il distribue à MM. les académiciens sa proposition pour sauver en partie la statue de la place de la Fédération [Bellecour], en supprimant le monarque et en conservant le cheval symbole de liberté, comme à Carthage. L’œuvre architecturale la plus remarquable de Boulard est le dessin d’un « Monument commandé par J. Coindre, maire, pour les victimes de la journée du 29 Mai, devant être exécuté aux Brotteaux par Boulard, Architecte sur la demande gle des sections et des familles du bataillon de Brutus », une chapelle expiatoire, à l’arrière d’une pyramide (BML Fonds Coste 454 et musée des Beaux-Arts inv. 1962-544) : proposition abandonnée, mais dont s’inspirera Cochet en 1819 pour les victimes du siège de Lyon.


Académie

Le 24 octobre 1789, Boulard fait acte de candidature, en présentant quatre mémoires techniques, deux couronnés par l’académie de Lyon, en 1780 et en 1781 (Ac.Ms50 f°121 et f°213), un autre par l’académie de La Rochelle en décembre 1784 sur le sujet : La voiture de transport la plus forte, la plus légère, la plus roulante & la moins capable de dégrader les chemins. Il reçoit un autre prix à Amiens en 1787. Élu dans la classe des sciences le 23 mars 1790, il prononce son discours de réception, en séance publique le 4 mai 1790 : Sur les moyens de prévenir les incendies dans les villages. D’une grande assiduité (onze absences sur cent vingt-sept séances jusqu’au 6 août 1793), ses interventions, mentionnées dans les Registres (Ac.Ms266, passim), sont de plus en plus fréquentes, et les nombreux manuscrits de ses communications et rapports présents dans la bibliothèque portent des dates toujours plus rapprochées. Plus de quinze mémoires témoignent de l’étendue de ses intérêts et de ses compétences. L’architecte est aussi ingénieur, il invente ou perfectionne des appareils de mesures et d’arpentage, s’intéresse à des mécaniques et machines variées, se montrant aussi physicien dans la théorie et dans la pratique, en métrologie et en hydraulique, et allant jusqu’à aborder des questions inattendues, qui touchent à l’archéologie à plusieurs reprises : à propos d’un taurobole, d’une maçonnerie en rapport avec l’aqueduc du Mont Pilat, de plusieurs inscriptions.

Durant ces années agitées, l’Académie a connu quelques difficultés : fermeture de l’Hôtel-de-ville, déplacement de la bibliothèque et expulsion des lieux, état des finances exigeant une nouvelle contribution personnelle des académiciens, etc. Boulard est élu directeur le 25 juin 1792 pour le second semestre de l’année, et reconduit en 1793 devant les difficultés de l’époque. Un nouveau règlement est adopté en mars 1793. Le décret de la Convention du 8 août supprime les sociétés savantes : c’en est fini de l’Académie. Ce même jour commence le siège de Lyon. En octobre 1793, Lyon fait place à « Ville Affranchie ». La Commission de justice populaire est installée, son jugement est sans appel ni recours. Boulard est dénoncé le 23 octobre au comité de surveillance de la section Rue Neuve par Joseph Carrel. Le 10 novembre, son frère cadet Jean Marie demande vainement sa libération. Il est accusé d’avoir observé l’ennemi aux Brotteaux, et commandé des ouvrages de défense du siège. Il se défend, disant « n’avoir point porté les armes, avoir été forcé par la municipalité de payer les ouvriers qui ont travaillé à une redoute, fait étayer les maisons qui menaçaient ruine en qualité de voyer inspecteur, et fait enlever les livres précieux de la bibliothèque du grand collège. » Le 29 novembre, son interrogatoire au tribunal révolutionnaire est immédiatement suivi de sa condamnation à la peine de mort. Il est le jour même « conduit sur la place ordinaire des exécutions pour avoir la tête tranchée. » (ADR 42L12, 15, 45, 67 et 166).

Les biens, aussitôt saisis, sont connus par le procès-verbal de leur enlèvement le 1er septembre 1794, la main levée du séquestre le 9 novembre et la restitution à son frère Jean Marie le 10 février 1795 : une quantité de meubles, coffres et malles, une armoire bibliothèque, des secrétaires avec leurs papiers, une caisse de 22 volumes reliés, et 26 portefeuilles couverts en parchemin contenant divers papiers parmi lesquels se trouvait probablement l’héritage de G. M. Delorme avec ses dessins des aqueducs romains. Dans l’éloge funèbre de Delorme prononcé à l’Académie le 4 décembre 1787, M. Deschamps déclarait que « ses travaux [de Delorme], nous en avons la confiance, ne seront pas perdus pour les sciences ; M. Boulard, qui depuis y a beaucoup ajouté, est digne de les terminer » (Ac.Ms124). Les vicissitudes de l’histoire ne l’ont pas permis.

Bibliographie

Dumas. – A. Portallier et F. Vindry dans Victimes et martyrs de la Révolution, Supplément, 1928. – M. Audin et E. Vial (avec des dates erronées). – J. Burdy, « G.M. Delorme, C.F. Boulard et le canal de Givors, 1771-1780 », USHR, 25, Actes des journées d’études 2012. – J. Burdy, « Catherin François Boulard (1749-1793), architecte et académicien lyonnais », MEM 12, 2012. – Gérard Bruyère, « Les hommes du plan à Lyon », dans Forma urbis, Les plans généraux de Lyon xvie-xxe siècles, Lyon : AML, 1997, p. 217.

Manuscrits

Ac.Ms118 f°114 : Observations sur un massif de maçonnerie d’une grande étendue découvert à Lyon en1792, lu le 6/3/1792. – Ac.Ms129 f°24-25 : Réflexions sur l’utilité des Académies ou sur la réunion des savants pour les départements où ils sont établis, 1792. – Ac.Ms174 f°193 : Rapport sur les trois mémoires reçus, lu dans la séance du 31/7/1793 (concours de 1793). – Ac.Ms174 f°239, avec Loyer et Willermoz : Rapport sur le moulin du Sr Grinau, 15/5/1792. – Ac.Ms178 f°17 : Mémoire sur l’architecture militaire et les fortifications, 3/7/1792. – Ac.Ms186 f°2 : Mémoire sur la machine hydraulique à corde inventée par Véra, 24/8/1790. – Ac.Ms190 f°2 : Mémoire sur le perfectionnement de la perche à niveler, 23/8/1791. – Ac.Ms190 f°73 : Sur les moyens de prévenir les incendies dans les villages, Discours de réception, 1790. – Ac.Ms190 f°57 : Mémoire sur quelques additions au niveau à bulle d’air 1791. – Ac.Ms190 f°59 : Mémoire sur le moyen le plus simple et le moins dispendieux de prévenir les incendies et les secours qu’on peut y apporter, a partagé le prix de l’Académie d’Amiens en 1787. – Ac.Ms191 f°3 : Dispositif propre à diminuer des 2/3 la dépense de l’eau dans les machines mues par son choc, 13/8/1776. – Ac.Ms194 f°24 : Discours sur la dilatation et la condensation du bois dans sa longueur, 8/3/1781 et 27/3/1792. – Ac.Ms194 f°140 : Mémoire sur les moyens de construire et d’entretenir les grandes routes dans les pays sablonneux où les pierres manquent, 7/8/1792. – Ac.Ms202 f°109, avec Loyer : Rapport sur un graphomètre perfectionné de M. Tourreau. 23/2/1791. – Ac.Ms208-2 f°64 : Mémoire sur une perche ou toise invariable dans sa longueur appelée par son auteur garde mesure, 1792. – Ac.Ms208-2 f°141 : Réflexions sur la réforme des poids et mesures, 3 mai 1791. – Ac.Ms260 f°49 : Moyens d’expulser les cors et les durillons, 1793. – Ac.Ms263 f°202, avec Claret de La Tourette : A MM. les députés du département de Rhône et Loire, Réunion des bibliothèques, août an II de la liberté. – Ac.Ms266 non folioté : Perfectionnement du jalon, 9/7/1793. – ibid. : Description et usage d’un instrument en bois très simple propre à mesurer les petites distances ou hauteurs inaccessibles, 30/7/1793. – ibid. : Moyen d’avoir un mouvement en ligne droite quoique le levier qui le provoque décrive une courbe, 6/8/1793. – Ac.Ms307 f°23 : Réflexions sur les atterrissements de gravier qui se forment au devant des quais du Rhône. – Ac.Ms307 f°203 : Observations sur la débâcle des glaces du Rhône et de la Saône en 1789, 1792.

D’autres manuscrits, autrefois à l’Académie, se trouvent à la BNF ou à la BML. BNF Ms PA 307 f°23 : Réflexions sur les atterrissements ou graviers qui se forment au devant des quais du Rhône. – BNF Ms 2105 f°11 : Pétition de M. Boulard de Gatelier [s’agit-il bien de notre Catherin François ou de son cousin « de Gatelier »… ?] au maire de Lyon au sujet de sa maison et de la pile du Pont du Change sur laquelle elle reposait, 1790. – BML Ms PA173 : Des écluses (portefeuille contenant deux lettres, quatre rapports et vingt mémoires accompagnés de nombreux dessins au lavis, sur la question des écluses mise au concours en l’année 1778. Les mémoires nos 3 et 5, dus à MM. Bernard et Boulard, ont été couronnés). – BML Ms 1515-1516 : Le P. Laurent Béraud, jésuite, professeur de mathématiques au collège de la Trinité de Lyon, directeur de l’Observatoire, correspondant de l’Académie des Sciences.

Publications

« Mémoires sur les moyens de garantir les Écluses des graviers […] et les canaux des pierres, sable & gravier… », Journ. Physique de l’Abbé Rozier, septembre 1780. – Avec M. Margueron, « Mémoire sur les avantages des Roues à larges jantes », Journal de Lyon 14, 7 juillet 1784, p. 222-223 ; et Journ. Physique de l’Abbé Rozier, décembre 1785. – Idée patriotique d’un citoyen ami des arts relativement à la statue de bronze de la place de la Fédération, le 22 Août 1792.