(Il signe toujours Victor de Laprade ; son deuxième prénom, Marin, a été par erreur transformé dans plusieurs documents en « Martin »). Né le 13 janvier 1812 à Montbrison (Loire), il est le fils du médecin Jacques Richard de Laprade* et de Victoire Chavassieu. Il fait ses études à Lyon, où son père est nommé médecin de l’Hôtel-Dieu.
Au lycée national de Lyon (act. Lycée Ampère), dont l’internat lui a laissé de mauvais souvenirs (son livre L’Éducation homicide, 1867, y fait écho), il a pour professeur de philosophie l’abbé Noirot*, qui est aussi le maître de F. Ozanam et d’Antoine Blanc Saint-Bonnet*. En 1833, il commence des études de droit à Aix. Après un séjour à Paris, il devient avocat stagiaire à Lyon, puis il se consacre à la poésie et à la littérature.En 1847, il remplace Jean Baptiste Monfalcon* comme conservateur de la bibliothèque du Palais des arts. De 1847 à 1861, il est professeur de littérature française à la faculté des lettres de Lyon. Sa leçon inaugurale, le mardi 7 décembre 1847, portait sur le génie littéraire de la France.
Le 27 août 1851 à Aurillac, il épouse Marie Louise Stéphanie Hélène (dite Nelly) Esquirou de Parieu (château de Fabrègues à Aurillac 21 avril 1826-Lyon 26 avril 1893), sœur de Félix Esquirou de Parieu, qui sera ministre de l’Instruction publique et des Cultes de 1849 à 1851. Le 10 mai 1853, naissance d’Hippolyte François Victor ; la famille habite alors 15 rue Saint-Dominique (act. rue Émile-Zola), où habite aussi le grand-père, Jacques Richard de Laprade, ancien professeur de médecine ; deux filles naissent 15 rue Saint-Dominique : le 18 octobre 1854 Marie Élisabeth Hélène, en décembre 1856 Marie Victoire Laurentine Adélaïde ; le grand-père, âgé maintenant de 75 ans, est encore témoin. Le 15 août 1861, naissance de Pierre Paul Julien ; la famille habite maintenant 10 rue de Castries. Le 25 novembre 1861, Victor de Laprade publie dans Le Correspondant un poème satirique, Les Muses d’État :
« […]
O grand siècle! O bonheur dont nous ferons l’épreuve
Un jour viendra, ce jour rêvé par Sainte-Beuve,
Où les Muses d’État, nous tenant sous la main,
Enrégimenteront chez nous l’esprit humain.
Les dieux sur le retour entrent dans la police.
O groupe des neuf sœurs, si vieux et si novice,
Qui descendez du Pinde en rêvant d’un héros,
Allez chez l’inspecteur prendre vos numéros !
[…] »
Un décret impérial de révocation met aussitôt fin à ses fonctions à la faculté des lettres. Il met à profit ces loisirs forcés en amplifiant sa production littéraire, qui s’écarte alors du courant romantique pour adopter l’esthétique parnassienne. Il est élu député du Rhône en 1871 (11e sur 13 par 58 587 voix sur 117 523 votants et 185 134 inscrits) ; sa mauvaise santé l’oblige à démissionner en 1873. Il siégeait au centre droit.
Chevalier de la Légion d’honneur (décret du 6 mai 1846).
Il meurt le 13 décembre 1883 à Lyon 2e 10 rue de Castries. Le décès a été déclaré le 14 décembre par son fils Jacques Joseph Norbert Félix Richard de Laprade, âgé de 31 ans, rentier, demeurant 10 rue de Castries, et par son gendre Charles Antoine Armand Berger de La Villardière, même profession, 43 ans, demeurant 14 rue Bourbon (actuelle rue Victor Hugo). Il a été inhumé au cimetière de Montbrison.
Il est élu le 7 juin 1842 au 2e tour, au fauteuil 6, section 1 Lettres. Le comité de présentation l’ont placé sur la même ligne que le graveur Vibert*, qui sera élu en 1844 ; Ruolz*, Tabareau* et Jourdan* insistent pour que la gravure soit représentée à l’Académie, tandis que Guerre* et Grandperret* (rapporteur) précisent qu’il n’y a pas de subdivisions dans la section des lettres et qu’on doit ainsi mettre les deux candidats sur la même ligne. Il y avait été précédé par son père, le médecin Jacques Richard de Laprade*, président de l’Académie en 1823, et par son grand-père, lui aussi médecin, Marin Richard de Laprade, accueilli par l’Académie en 1774 comme membre associé. Discours de réception le 31 août 1842 sur La philosophie de la poésie. Il est émérite en 1875. Lors de ses funérailles, Paul Rougier, président de l’Académie, prononce son éloge funèbre.
Le 11 février 1858, Victor de Laprade a été élu à l’Académie française, au fauteuil d’Alfred de Musset, et il prononce son discours de réception le 17 mars 1859 ; le 4 mars 1868, pour fêter cette élection, l’Académie de Lyon lui offre un banquet, au cours duquel des discours ont été prononcés par P. Rougier*, A. Blanc-Saint-Bonnet*, J. A. Gilardin*, avec des réponses de Victor de Laprade et de Jacques Richard de Laprade, et un hommage en vers par Anthelme Gunet*.
François Coppée, Discours de réception à l’Académie française, 18 décembre 1884. – G. A. Heinrich*, Notice sur M. Victor de Laprade, de l’Académie française, membre émérite de l’Académie de Lyon, séances des 11, 18, 25 mars et du 1er avril 1885, MEM, 1885-1886, 114 p. – Edmond Biré, Victor de Laprade, sa vie et ses œuvres, Paris : Perrin, 1886, 402 p. – James Condamin, La Vie et les œuvres de V. de Laprade, Lyon : Vitte et Perrussel, 1886, 451 p. – Camille Latreille, Victor de Laprade (1812-1882), Lyon : Lardanchet, 1912, 149 p. – C. Latreille, « Le Romantisme en Provence. Souvenirs d’étudiants lyonnais, Barthélémy Tisseur et V. de Laprade », MEM, 1915, p. 21-174. – H. Rambaud, Un poète lyonnais, Victor de Laprade, Lyon : La Revue fédéraliste, 1921, 46 p. – P. Séchaud, Victor de Laprade, l’homme, son œuvre poétique, Paris : Picard, 1934, 552 p. – J. Buche, L’École mystique de Lyon, 1776-1847, Paris : Alcan, 1935, 306 p. – J. Guitton, Discours pour le centième anniversaire de la mort de Victor de Laprade, Montbrison, 22 septembre 1983, Paris : Institut de France, 1983, 8 p. – T. de Morembert, DBF.
Alors que certains de ses contemporains le mettaient à l’égal de Lamartine et de Musset, il est aujourd’hui bien oublié. Toutefois, son souvenir est conservé par quelques œuvres, par exemple une statue par Jean-Marie Bonnassieux (1810-1892) dans le jardin d’Allard, à Montbrison. – Une statue par Louis Cosme Demaille se trouve dans le jardin de la Préfecture du Rhône (1898). – Il est représenté dans la grande peinture de Louis-Édouard Fournier, Aux gloires du Lyonnais et du Beaujolais (1896), à l’hôtel du département du Rhône, où se trouve aussi son buste. – Le musée de Roanne conserve la photographie d’un médaillon en galvanoplastie d’Élise Doucet. – Le saint Thomas de La Cène (1845) de Louis Janmot, tableau peint pour l’hôpital de l’Antiquaille, est en fait un portrait de Victor de Laprade. – Portrait : Tirage figurant dans les albums de référence de l’Atelier Nadar, dans la série « Visites anciennes. Contemporains », nos 55, 95, 96, 178.
Un amphithéâtre de l’université Lyon-2 porte son nom. On trouve des rues Victor de Laprade à Lyon, à Montbrison, à Saint-Étienne, à Feurs et à Saint-Cyprien (Loire).
Sur De l’unité spirituelle d’Antoine Blanc Saint-Bonnet, Ac.Ms279 I pièce 45, 25 novembre 1845. – La Cène, peinture ou fresque de L. Janmot dans la chapelle de l’Antiquaille, Revue du Lyonnais 1846, Ac.Ms279 II pièce 1, 21 p. – Sur Platon [en vers], Ac.Ms279 II pièce 6, 3 p.
Les Parfums de Magdeleine, Lyon : Boitel, 1839, 26 p. – La Colère de Jésus, Lyon : Boitel, 1840, 20 p. – Des habitudes intellectuelles de l’avocat, Discours prononcé à la rentrée de la Conférence des avocats de Lyon, Lyon : Boitel, 1841, 24 p. – Psyché, Paris : Labitte, 1841, 294 p. – Odes et poèmes, Paris : Labitte, 1843, 311 p. – L’Âge nouveau, Lyon : Boitel, 1847, 23 p. – Du génie littéraire de la France: discours prononcé à l’ouverture du cours de littérature française à la Faculté des lettres de Lyon, Lyon : Boitel, 1847, 38 p. – Ballanche. Sa vie et ses écrits, Lyon : Boitel, 1848, 67 p. (lue à l’Académie de Lyon le 25 janvier 1848). – Du principe moral dans la République. Discours prononcé à la Faculté des lettres de Lyon, le 11 mars 1848, Lyon : Boitel, 1848, 16 p. – Du sentiment de la nature dans la poésie d’Homère, Paris : Comon, 1848, 137 p. – La Tentation, Lyon : Boitel, 1848, 48 p. – Poèmes évangéliques, Paris : Charpentier, 1852, 350 p. – Les Symphonies, Paris : Michel-Lévy, 1855, 344 p. – Idylles héroïques, Paris : Michel-Lévy, 1858, 264 p. – Discours de réception à l’Académie française, 17 mars 1859, Paris : Didier, 1859 (éloge d’Alfred de Musset). – Pro aris et focis, Paris : Douniol, 1860, 16 p. (publié dans Le Correspondant, ce poème contestataire annonce déjà Les Muses d’État). – Résurrections. Aux Polonais, Paris : Douniol, 1861. – Questions d’art et de morale, Paris : Didier, 1861, 449 p. – Les Muses d’État, Le Correspondant, 25 novembre 1861. – Les Arbres du Luxembourg, Paris, Marpon. 1865. – La Voix du silence, Paris : Dentu, 1865, 280 p. – Le Sentiment de la nature avant le christianisme, Paris : Didier, 1866, 430 p. – L’Éducation homicide. Plaidoyer pour l’enfance, Paris : Didier, 1867, 143 p. – Le Sentiment de la nature chez les modernes, Paris : Didier, 1868, XI + 528 p. – Pernette, Paris : Didier, 1868, 304 p. [on y a vu longtemps un chef-d’uvre de la poésie régionaliste]. – Le Baccalauréat et les études classiques, pour faire suite à L’Éducation homicide, Paris : Didier, 1869, 205 p. – Lamartine. Discours prononcé a la réunion publique du 2 mai 1869 au profit de la souscription pour la statue du poète, Paris : Didier, 1869, 32 p. – Harmodius : tragédie, Paris : Didier, 1870, 404 p.). – L’Éducation libérale : l’hygiène, la morale, les études, Paris : Michel-Lévy, 1873, 360 p. – Poèmes civiques, Paris : Didier, 1873, 404 p. – Tribuns et courtisans, Paris : A. Lemerre, 1875, V + 180 p. – Le Livre d’un père, Paris : Hetzel, 1876, 239 p. – Voix gallo-romaines, Paris : A. Lemerre, 1877, 60 p. – Œuvres poétiques, Paris : A. Lemerre, 1878-1881, 6 vol. – Contre la musique, Paris : Didier, 1880, 362 p. – Essais de critique idéaliste, Paris : Didier, 1882, 391 p. – Histoire du sentiment de la nature, Paris : Didier, 1882, 349 p.