René Jean Baptiste François Koehler est né le 7 mars 1860 à Saint-Dié (Vosges) ; témoins : François Rodolphe Grandjean, inspecteur des forêts, et Achille Koehler, employé de fabrique, oncle de l’enfant. Issu d’une famille de teinturier installé à Saint-Dié à la fin du xviiie, son père Gustave Adrien Koehler, industriel, devient en 1883 conseiller général de ce canton. Il a, de sa femme Catherine Eulalie Grandjean, deux fils : René l’aîné, et Marie Gustave Albert (Saint-Dié 1861-Lyon 1916), ingénieur.
René Koehler est mort le 19 avril 1931 à Lyon.
Dès sa plus jeune enfance René se fait remarquer par son sérieux, son intelligence et son ardeur au travail. Après le collège à Saint-Dié, il entre à l’université à 17 ans et fait des études de sciences et de médecine. Le 1er novembre 1879, il est préparateur de zoologie à la faculté des sciences de Nancy. En 1881, il entre au laboratoire de zoologie maritime de Marseille pour préparer ses thèses. À 23 ans il est, en mai 1883, docteur ès sciences naturelles avec une thèse intitulée Recherches sur les échinides des côtes de Provence, et en juillet, docteur en médecine avec une thèse : Physiologie comparée sur l’action des poisons sur les invertébrés. De 1884 à 1886, il sillonne les eaux des îles anglo-normandes pour y étudier la faune marine. Le 1er novembre 1889, il est chargé d’un cours complémentaire de zoologie à Nancy, mais dès le 18 du même mois, il occupe un poste vacant de chargé de cours de zoologie à la faculté des sciences de Lyon. En 1894, il est nommé professeur titulaire.
Par son mariage à Lyon 3e, le 25 septembre 1890, avec Jeanne Claudine Odette Lumière (Besançon 2 avril 1870-Lyon 7e 24 novembre 1926), sœur d’Auguste* et de Louis Lumière, il bénéficie d’une aide précieuse pour les photographies de ses échantillons de recherche. En contrepartie, il prend part aux activités industrielles de sa belle-famille, ce qui lui vaut une certaine hostilité de la part de ses collègues ; il s’impliquera en particulier dans la mise au point de certains médicaments créés par son beau-frère Auguste Lumière et participera efficacement à l’activité hospitalière développée par les Lumière ainsi que par sa femme pendant la guerre de 1914. Ses recherches le conduisent à l’étude de la faune marine et il peut l’étudier en demandant, pendant ses vacances, un poste de médecin à bord d’un paquebot, ce qui lui permet, soit en pleine mer, soit aux escales, d’étudier en particulier les Échinodermes. Sa compétence lui vaut d’être agréé comme collaborateur du prince Albert Ier de Monaco, et il se voit confier en 1895 l’étude des Échinodermes provenant des campagnes des yachts Hirondelle II et Princesse-Alice. Il obtient du ministre de l’instruction publique d’être « chargé d’une mission scientifique dans le golfe de Gascogne à l’effet d’y recueillir des collections zoologiques ». Le ministre de la Marine décide que « moyennant remboursement des frais d’installation et de navigation, l’aviso Caudan, stationnaire du port de Lorient, serait mis, du 20 août au 2 septembre (1895) à la disposition d’une commission qui exécuterait des sondages et des dragages et ferait des observations océanographiques dans le golfe de Gascogne ». Des subventions supplémentaires sont obtenues, et notamment une somme de 2 500 francs offerte par Auguste et Louis Lumière. Après la campagne du Caudan dont il publie les résultats en 1896, il n’effectue plus de récoltes lui-même et se contente d’étudier le matériel envoyé par les chercheurs. En 1908 cependant, il se trouve dans l’océan Indien sur l’Investigator et publie Les holothuries littorales à Calcutta. Il retourne sur le yacht du prince de Monaco la Princesse-Alice, puis se rend à nouveau aux Indes, publie à Hambourg en rentrant en 1914 Échinodermes astéroïdes, ophiuroïdes et échinoïdes. Par la suite, il se rend en Australie et publie ses travaux à Sidney. Les monographies qu’il publie durant trente-cinq ans sont rehaussées par des illustrations où l’exactitude scientifique va de pair avec la recherche esthétique. Tout ceci est dû au matériel photographique mis à sa disposition par les frères Lumière. Il décrit près d’un millier d’espèces nouvelles et apporte une contribution exceptionnelle à la connaissance de l’embranchement des Échinodermes. Les livres qu’il publie à la fin de sa vie (1er volume de La Faune de France et les Échinodermes des mers d’Europe en 2 volumes) demeurent des ouvrages de référence. Il est un grand zoologiste de réputation internationale.
Nommé chevalier de la Légion d’honneur en 1909, puis officier en 1923, les insignes lui sont remis par Louis Lumière (LH/1405/40). Son épouse est également chevalier de la Légion d’honneur par décret du 29 décembre 1924 (LH/1405/37) car « elle a rendu aux œuvres d’hygiène sociale et de puériculture auxquelles elle se consacre depuis de longues années des services considérables, donnant un magnifique exemple d’activité, de dévouement et d’abnégation - 30 ans de service ». Elle avait été infirmière bénévole pendant toute la durée de la guerre. C’est son frère Auguste qui lui remettra ses insignes.
En 1929, la rue Saint-Marc à Lyon 3e, qui aboutit rue Guilloud où le couple habitait au n° 29, a reçu le nom de « rue Jeanne-Koehler ».
Il entre à l’Académie de Lyon en 1896 : présenté le 27 novembre par Arnould Locard*, il est élu le 1er décembre au fauteuil 8, section 2 Sciences. Le 15 mars 1898, il montre des photographies en couleurs naturelles obtenue par les frères Lumière. Membre émérite le 20 avril 1920. Le 28 avril, C. Germain de Montauzan* lit le discours qu’il a prononcé à ses obsèques.
René Koehler a été président de la Société zoologique de France en 1911. Il est nommé officier de l’ordre de Saint-Charles de Monaco en 1910, à l’occasion de l’inauguration du Musée océanographique. Il a reçu plusieurs prix de l’Académie des Sciences (en 1918 le prix Saintour, et en 1922 le prix Cuvier). Il était correspondant du Muséum national d’histoire naturelle de Paris depuis 1906 et a été élu le 16 mars 1925 membre correspondant de l’Académie des Sciences dans la section d’anatomie et zoologie.
G. Acker, À la gloire du Professeur René Koehler, savant zoologiste de renommée universelle et collaborateur permanent de S.A.S. le Prince Albert 1er de Monaco, créateur du célèbre Musée océanographique de Monaco, s.l., s.n., 1980, 10 p. multigraphiées, portrait. – J. Carpine-Lancre, « Le Professeur René Koehler (1860-1931) », Actes 112e Congr. nat. Soc. Sav. Lyon, 1987, p. 287-297. – C. Germain de Montauzan, « Éloge funèbre de M. René Koehler », MEM 21, 1933, p. 135-138. – L. Joubin, « Notice sur M. René Koehler », CRAS 192, 1931, p. 903-904. – L. Roule, « L’œuvre zoologique du Professeur René Koehler (1860-1931) », Rev. Gén. Sc. 43, 1931, p. 402-406. – T. de Morembert, DBF.
Après sa mort, une plaquette à son effigie fut gravée par Louis Bertola* (conservée au Médaillier de l’académie de Lyon, n° Drevon 05). Au revers, une sirène qui relève un filet plein d’échinodermes rappelle sa campagne d’exploration scientifique à bord du Caudan (Lannois 1934).
Lettre adressée au ministère de l’Instruction publique du 3 juillet 1886, pour solliciter une subvention pour visiter des laboratoires méditerranéens, Archives nationales, dossier F17 24147. – Manuscrit sur le ver à soie et le Bombyx utilis, ADR, registre 583 W. – Plus de 300 lettres, datées de 1895 à 1931, envoyées par R. Koehler à Jules Richard [qui en 1900, a été le premier directeur du Musée océanographique de Monaco], conservées dans les archives du musée.
L’ensemble de ses études comporte 332 titres, parmi lesquels on citera : « Recherches sur les échinides des côtes de Provence », Ann. Mus. Hist. Nat. Marseille 1, mém. 3, 1883, p. 1-167, 7 pl. – « Contribution à l’étude de la faune littorale des Iles Anglo-Normandes », Ann. Sci. Nat. Zoo, 1885, p. 1-62, 1 pl. – « Supplément aux recherches sur la faune marine des iles Anglo-Normandes », Bull. Soc. Sci. Nancy, 1886, 27 p. – Les applications de la photographie aux sciences naturelles, Paris : Gauthier-Villars, 1893, 199 p. – « Dragages profonds exécutés à bord du Caudan dans le golfe de Gascogne (août-septembre 1895). Rapport préliminaire sur les Échinodermes », Revue Bio. Nord France 7, 1895, p. 439-496, 16 fig. – « Note préliminaire sur les Ophiures recueillis pendant les campagnes de l’Hirondelle », Mém. Soc. Zool. France 9, 1896, p. 203-213. – « Résultats scientifiques de la campagne du Caudan dans le golfe de Gascogne (août-septembre 1895) », Ann. Univ. Lyon 26, 1896, fasc.1, p. 1-270, 7 fig., pl. 1-7 ; fasc. 2, p. 273-437, pl. 8-18 ; fasc. 3, p. 439-741, pl. 19‑40. – « Ophiures nouvelles ou peu connues », Mém. Soc. Zool. France, 1904, p. 54‑119. – « Révision de la collection des Ophiures du Muséum d’histoire naturelle de Paris », Bull. Sci. France Belgique 41, 1907, p. 279-351, pl. 10-14. – Avec C. Vaney, Holothuries recueillies par l’Investigator dans l’Océan indien : les Holothuries littorales. Partie 4 de Echinoderma of the Indian Museum, Calcutta : the Indian Museum, 1908, 54 p. – « Arcturides nouveaux provenant des campagnes de la « Princesse Alice » ou appartenant au Musée océanographique de Monaco », Bull. Inst. Océanogr., Monaco, 1911, 214 p. – Faune de France, 1, Échinodermes, Paris : Lechevalier, 1921, 210 p., 153 fig. – « Ophiurans of the Phillipineseas and adjacent waters », U.S. National Museum, Bull. 100, 1922, Washington, p. 1-486. – Les Échinodermes des mers d’Europe, Paris : Doin, t. 1, 1924, 362 p., 9 pl. ; t.2, 1927, 339 p., 9 pl. – « Anomalies, irrégularités et déformations du test chez les Échinides », Ann. Inst. Océanogr. Paris 1, fasc. 5, 1924, 480 p.