Louis Aimé Stéphane Revol est né à Lyon 6e, 124 rue Cuvier, le 1er août 1905, fils unique de Louis Joseph Revol (Hauterives [Drôme] 1875-Lyon 1955), pharmacien d’officine rue Bugeaud à Lyon et d’Angèle Philomène Chancrin (Hauterives 1881-Lyon 1978). Ses parents, issus de la vallée de la Galaure, dans le nord du département de la Drôme, et très attachés à leur site d’origine, avaient acquis une maison à Châteauneuf-de-Galaure, peu avant la guerre de 1939. Louis Revol poursuit des études de pharmacie et obtient son diplôme en 1928 ; il suit parallèlement une scolarité à la faculté des sciences de Lyon et acquiert sa licence de sciences naturelles en 1925. Interne en pharmacie des Hospices civils de Lyon en 1926, il soutient, en 1931, une thèse de doctorat ès sciences naturelles titrée : « Contribution à l’étude biochimique des glandes surrénales de quelques mammifères » sous l’autorité du professeur Leulier.
Au cours de sa scolarité, Louis Revol rencontre Jeanne Madeleine Bretin (1906-1992), fille du professeur de matière médicale et botanique, Philippe Bretin (né à Pont-Aubert [Yonne] le 20 février 1874), qui était également pharmacien en chef de l’asile d’aliénés de Bron, futur hôpital psychiatrique du Vinatier. Ils se marient à Bron le 8 juillet 1929. Ils ont quatre enfants : Hélène (18 avril 1931-2008) ; André (9 octobre 1932)* ; Michel (8 novembre 1934) ; et Claire (22 avril 1947). Philippe Bretin décède prématurément, le 30 avril 1931. Louis Revol se présente au concours de recrutement et devient le successeur de son beaupère ; à partir de juillet 1931 le couple réside à l’hôpital du Vinatier. La même année, Louis Revol est admissible au concours d’agrégation de pharmacie, dans la section d’histoire naturelle pharmaceutique. Il est recruté comme chef de travaux pratiques en matière médicale et botanique et est chargé des fonctions d’agrégé de 1931 à 1934, date à laquelle il est nommé professeur agrégé.
Louis Revol effectue ses premières années d’enseignement en botanique et cryptogamie et complète son enseignement par des herborisations effectuées autour de Lyon. Il assure l’enseignement dans ces deux disciplines jusqu’en 1947. Il est nommé professeur sans chaire en 1945 et est titularisé en 1947 dans la chaire de pharmacie galénique, nouvellement créée. L. Revol assure un enseignement d’initiation pharmaceutique aux étudiants de première année à partir de 1963 et celui de pharmacie galénique aux étudiants de seconde et troisième années ; il participe à l’enseignement de cinquième année dans les options « officine » et « industrie » et, dès sa création en 1962, contribue à la formation des étudiants de l’Institut de pharmacie industrielle de Lyon (I.P.I.L.). Enfin, il organise à partir de 1970, un enseignement de pharmacie galénique appliquée jusqu’à sa retraite en 1975. Son cours de pharmacie galénique le conduit à avoir de fréquents contacts avec l’industrie pharmaceutique qui facilite l’accueil des étudiants ayant choisi cette option, au sein de laboratoires (Unités de fabrication, laboratoires de contrôle...).
Il assume aussi des charges administratives. Il représente la faculté au conseil régional de l’ordre des pharmaciens (1948-1975). Il est assesseur du doyen de la faculté de médecine et pharmacie (1960-1965) et membre du conseil de l’université Lyon-1 (1971-1975). Sur le plan national, il est membre du Comité consultatif des universités (1962-1972) et participe à différentes commissions professionnelles : commissions de la pharmacopée, du formulaire national. Sa carrière hospitalière débute en juin 1931 se déroule intégralement à l’asile de Bron, qui devient ensuite l’hôpital psychiatrique du Vinatier où il assume les fonctions de pharmacien chef ; il se passionne pour cette activité. Habitant dans l’hôpital, il est le plus souvent dans son service avant 8 h du matin. Il travaille en relation étroite avec ses collègues médecins. Il passe quarante années à la tête de son service qui, non seulement assure la distribution nominative des médicaments destinés aux malades internés dont le nombre alors avoisine deux mille, mais aussi effectue les dosages des paramètres biochimiques sanguins et urinaires nécessaires à l’exploration des malades et les dosages de certains médicaments pour contrôler leur suivi thérapeutique ainsi que des recherches sur les maladies métaboliques associées à des troubles mentaux.
La période de la guerre de 1939-1945 a des conséquences dramatiques sur la population hospitalisée au Vinatier. Les malades sont agités et dépensent plus de calories que les sujets sains ; les médicaments neuroleptiques n’existent pas encore ; les rations alimentaires sont insuffisantes et entraînent le développement d’œdèmes de la faim et la mort des malades. Malgré sa grande surface au sol, ses cultures, son élevage d’animaux de ferme, l’hôpital est incapable d’assurer une alimentation calorique suffisante aux nombreux malades hospitalisés, d’où l’apparition chez ceux-ci de ces œdèmes de famine. Louis Revol a le grand mérite dès 1940 de s’investir dans la recherche de solutions à la sous-alimentation qu’il a mesurée rigoureusement, d’abord par la distribution de levures fraîches pour pallier l’avitaminose B1, ensuite par des apports supplémentaires en lipides et protéines (lait entier, huile d’olive, farine de soja), enfin par des ingestions ou des tentatives d’injection de sérum de bovidé. Cette question au centre des préoccupations du service pharmaceutique donne naissance à plusieurs communications devant la société de pharmacie et la société de biologie de Lyon ainsi qu’à plusieurs thèses de recherche appliquée dont celles de Louis Trouillas (1942) et de Georges Fredric (1944).
Dans les années d’après-guerre, Louis Revol s’intéresse avec ses collègues médecins (notam-ment André Requet) à un produit « anti-alcool » étudié au Danemark par le docteur Erick Jacobsen, l’Antabus ou Disulfirame, qui permet de « déconditionner » des sujets alcoolo-dépendants en déclenchant de fortes réactions vasomotrices à la prise d’alcool. Dans son laboratoire, il purifie le produit, jusque-là utilisé dans la vulcanisation du caoutchouc, pour le mettre à la disposition des malades.La thérapeutique psychiatrique connaît dans l’après-guerre une évolution considérable, avec l’arrivée des médicaments neuroleptiques tel que la chlorpromazine (Largactil) expérimentée en psychiatrie dès 1952, médicaments qui transforment le comportement des malades et font disparaître les cris qui résonnaient parfois dans l’environnement hospitalier. Du fait de sa proximité avec la société Rhône Poulenc qui fabrique la molécule, l’hôpital du Vinatier s’impose alors en leader national et international dans l’étude des psychotropes. La publication princeps, « La Thérapeutique par la Chlorpromazine en Thérapeutique Psychiatrique (1956) » – ouvrage écrit en étroite collaboration avec les médecins de l’hôpital du Vinatier –, témoigne alors de la transformation comportementale majeure des malades hospitalisés au Vinatier. En 1960, Pierre Lambert et Louis Revol proposent une classification bipolaire des médicaments neuroleptiques : d’un côté les neuroleptiques les plus sédatifs agissant sur l’anxiété, de l’autre les neuroleptiques, les plus incisifs, agissant davantage sur l’agitation, les hallucinations et le délire. L’étude de l’action de ces nouvelles drogues constitue l’objectif principal de travail de Louis Revol, en association avec ses collègues médecins ; ils créent ensemble le Comité lyonnais de recherches thérapeutiques en psychiatrie (CLRTP). Les nombreuses publications de ce Comité concernent les différentes activités de chaque structure chimique étudiée, leur mécanisme d’action et leurs effets secondaires ainsi que leur incidence sur les paramètres biochimiques sanguins ou urinaires des patients traités. Des médicaments autres que les neuroleptiques, agissant sur le système nerveux central font également l’objet d’études. Les applications thérapeutiques des nouvelles molécules médicamenteuses donnent naissance à des thèses de doctorat pharmaceutique en recherche appliquée ainsi qu’à des thèses de médecine. Le CLRTP s’est maintenu au-delà du décès de Louis Revol qui, en 1971, avait, dans une conférence devant la Société d’histoire de Lyon relaté tous les changements intervenus à l’hôpital psychiatrique au cours de sa longue carrière.
Louis Revol a participé aux activités de différents organismes professionnels nationaux et internationaux : membre de sociétés savantes tant dans le domaine des plantes que dans celui de la chimie biologique, il est membre correspondant national de l’Académie de pharmacie et assiste aux congrès de la Fédération internationale pharmaceutique (F.I.P.). Ses relations amicales avec ses anciens internes ou thésards le conduisent à la création de l’APAL (Association des pharmaciens anciens élèves de Lyon). Il participe à la vie de la profession en Rhône-Alpes en étant membre, depuis sa création en octobre 1945, du conseil régional de l’ordre des pharmaciens où il siège jusqu’à son départ en retraite en 1975.
Louis Revol meurt le 3 avril 1981 à Châteauneuf-de-Galaure. Travailleur infatigable, il laisse le souvenir d’un homme ouvert, portant attention à autrui et sachant écouter. En dehors des vacances, il ne pouvait consacrer que peu de temps à sa passion pour la nature que toutefois il pouvait mettre au service de sa tâche de pédagogue, à l’époque où il enseignait la botanique en pratiquant des herborisations. Passionné de haute montagne, dans sa jeunesse, il aimait évoquer le souvenir des ascensions qu’il avait réalisées dans le massif de l’Oisans.
Chevalier de la légion d’honneur
Louis Revol est élu le 10 juin 1952 membre de l’Académie, au fauteuil 5, section 2 Sciences, sur rapport de Marcel Josserand*, succédant à Jules Guiart* admis à l’éméritat. Le 11 mars 1958, il prononce son discours de réception : Sous le signe de la mandragore. Il assure la présidence en 1975 et prononce son discours d’entrée en fonction le 4 février devant le maire de Lyon, lors de la première séance tenue dans les nouveaux locaux du Palais Saint-Jean. Il continue à suivre avec assiduité ses séances jusqu’à son décès en 1981. On trouve plusieurs articles de lui dans les Mémoires : Le Vinatier (1975), deux autres sur Le plaisir de voyager en Roumanie à une époque où ce pays était encore peu ouvert au tourisme (1975 et 1977), sans oublier le Rapport sur l’activité de l’Académie sous sa présidence (1977). Il fait aussi l’Éloge funèbre de Marcel Chamaraud* (1978). C’est Aymé Camelin* qui prononce son éloge funèbre.
P. Mathieu, P. Balvet, « Le Professeur Revol quitte l’Hôpital du Vinatier », Lyon Pharm. 23, 1972, p. 57- 62. – J. Boiron, J. Cotte, J. Dorche, R. Evreux, R. Marsot, P. Mathieu, L. Oddoux, N. Robelin, M. Rollet, M. Thévenet, Hommage au Professeur Louis Revol, Assoc. Corpo. ét. en médecine de Lyon, 1976 (07), 225 p. – A. Camelin, « Le Professeur Louis Revol 1905-1981 », Lyon Méd. 30 sept. 1981, p. 109. – A. Camelin, Éloge funèbre de Louis Revol, MEM 1982. – R. Fouilly, J. Greffe, R. Marsot, P. Mathieu, G. Roussille, N. Robelin, « Hommage au Professeur Louis Revol », Lyon Pharm., 1982, 33, 7-13. – I. von Bueltzingsloewen, L’hécatombe des fous, la famine dans les hôpitaux psychiatriques sous l’occupation, Paris : Aubier, 2007.
Médaille à son effigie, avec un plant de mandragore au revers, gravée par Robert Rebatet et frappée par FIA, offerte par ses élèves le 1er juillet 1976.
Les publications de Louis Revol et de son équipe sont très nombreuses. On citera les principales : Contribution à l’étude biochimique des glandes surrénales de quelques mammifères : étude comparée des zones corticale et médullaire, (thèse sciences), Lyon, Bourg : Berthod, 1931, 326 p. – Avec M. Ferrand, « Sur une méthode de minéralisation applicable au microdosage benzidinique du soufre organique en biologie », Bull. Soc. Chim. Biol. 17, 1935, p. 1451-1454. – L’exploration de la moelle osseuse par ponction sternale : myélogrammes normal et pathologiques, Paris : Baillière, 1938, 405 p., ill. – Avec A. Leulier, Précis de pharmacie chimique, Paris : Maloine, 1948, XXXI + 1069 p. – Avec A. Achaintre, P. Balvet, M. Beaujard, C. Berthier, P. Broussolle, P. Lambert, J. Perrin et A. Requet, La thérapeutique par la chlorpromazine en pratique psychiatrique, Paris : Masson 1956, 151 p. – Avec P.-A. Lambert, « Classification psychopharmacologique et clinique de différents neuroleptiques, indications thérapeutiques générales dans les psychoses », Presse Méd. 68, 1960, p. 1509-1511. – « Actions de divers neuroleptiques sur la toxicité de l’amphétamine pour la souris isolée ou groupée », Bull. Trav. Soc. Pharm. Lyon 5, 1961, p. 69-76. – Avec S. Miachon, « Action de quelques drogues psychotropes sur la glycémie du lapin », Bull. Trav. Soc Pharm. Lyon 7, 1963, p. 70-76. – « L’alimentation parentérale, émulsions lipidiques », Ann. pharmaceutiques françaises 21, 1963, nos 3-4, p. 245-253, 331-344. – Avec P. Croizat, Savoir interpréter un examen hématologique, Paris : Maloine, 1966, 187 p. – Avec M. Miachon et P. Mathieu, Recherches sur le mécanisme de l’hyperglycémie par la chlorpromazine chez le lapin », Bull. Trav. Soc. Pharm. Lyon 7, 1963, p. 95-104. – Avec M. Enkin et A. Becache, « Étude de l’excrétion urinaire de l’acide 5-hydroxy-indol-acétique endogène dans la psychose maniaco-dépressive », Encéphale, 1963, n° 4, p. 321-365. – « Regards sur l’Hôpital du Vinatier, hier l’Asile, aujourd’hui l’Hôpital, demain… ? », Conférence à la Société d’Études d’Histoire de Lyon, 16 février 1971, Lyon Pharm. 22, 1971, p. 199-228. – « De l’ “Enfermerie” de la Quarantaine à l’hôpital psychiatrique du Vinatier, l’émancipation du malade mental », Lyon Méd. 231, 1974, p. 904-914.