Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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HERRIOT Édouard (1872-1957)

par Louis David, Dominique Saint-Pierre.

 Marie Édouard est né à Troyes le 5 juillet 1872, de François Nicolas Herriot (Rouen 1836-Oran 1899), alors lieutenant au 93e Régiment d’infanterie de ligne (il terminera sa carrière à Oran comme commandant au 2e régiment de zouaves), et de Jeanne Eugénie Collon (Mostaganem 1852-Oran 1896). Leurs cendres ont été transférées du cimetière d’Oran à l’ancien cimetière de la Croix Rousse le 24 juin 1967. Baptisé le 13 octobre à Saint-Pouange par son grand-oncle Victor-Eugène Collon, curé du village. Suite aux affectations de son père, c’est au lycée de La Roche-sur-Yon qu’il suit ses études secondaires. Il entre à l’École normale supérieure en 1891, est agrégé de lettres en 1894, docteur ès lettres avec une thèse qui sera publiée en 1909 à Paris chez Plon-Nourrit, sous le titre Madame Récamier et ses amis.

 Il épouse à Lyon, le 28 octobre 1899, Marie Blanche Rebatel (Lyon 2e 4 août 1877-Saint-Baudille-de-La-Tour [Isère] 25 septembre 1962) fille du docteur Fleury Rebatel (Lyon, 1845-1905), président du conseil général du Rhône (1883-1885, et 1889-1891), et de Louise Élisabeth Monin (Chalon-sur-Saône 1843-Lyon 1918) ; contrat du 21 octobre chez Me Charding notaire ; témoins, Louis Million sénateur du Rhône, Louis Patel médecin, Albert Daudin proviseur et Florestan Bachod professeur lycée Ampère.

 Décédé à Saint-Genis-Laval, hôpital Saint-Eugénie (Hospices civils de Lyon), le 27 mars 1957 ; inhumé à Loyasse le 30 mars (voir notice Gerlier*).


Académie

Lors de la cérémonie commémorative du centenaire d’Ampère au Grand Théâtre, Herriot exprime à Antoine Sallès* le regret de ne pas faire partie de l’Académie. Le 18 mai 1936, Sallès écrit à Joseph Buche* pour approuver sa démarche de présenter la candidature du maire de Lyon : « On peut ne pas partager ses opinions politiques, qui du reste, ne doivent pas entrer en ligne de compte ; mais on ne peut avoir que de la sympathie et de l’estime pour la personne. Quant à son talent d’orateur et d’écrivain, à sa haute et profonde érudition, à sa rare valeur intellectuelle, tout cela est hors de contexte. L’Académie de Lyon s’honorerait, me semble-t-il, en suivant l’exemple de son aînée l’Académie Française, qui ne considère chez ses candidats à ses fauteuils que l’honorabilité personnelle et le mérite littéraire ». Joseph Buche avait connu Herriot en 1906 à une distribution de prix sur l’Ile Barbe et avait obtenu de lui une préface pour son livre L’École mystique de Lyon. Herriot est candidat à l’Académie par courrier du 26 juin 1936, au fauteuil 4, section 1 Lettres, laissé vacant par Louis Falcon de Longevialle*. Buche lit son rapport le 24 novembre 1936. Herriot est élu à la séance du 1er décembre, à laquelle n’a pu se rendre le ministre Auguste Isaac*, membre émérite, qui, « retenu au lit par ordonnance du médecin, regrette de ne pouvoir apporter sa voix à M. Édouard Herriot, président de la Chambre des députés ». Herriot remercie par courrier du 7 décembre, s’excuse de ne pouvoir se rendre à la séance du 8 décembre, car il préside ce jour-là la Chambre des députés. Il ne figure pas dans les présents pour les années 1937 et 1938.

Le 7 décembre 1948, il est élu président de la classe des lettres pour 1950 (par erreur : 1939-1940 dans le texte du secrétaire général, Martin-Basse*). Il préside effectivement la séance du 23 janvier 1950. Le registre porte : « M. Édouard Herriot ayant exprimé le désir de recevoir l’Académie à l’Hôtel de Ville, la séance eut lieu dans le grand salon illuminé et fleuri. Les membres de notre compagnie vont avoir l’illusion de revivre une séance tenue par leurs prédécesseurs du dix-huitième siècle dans la salle des Portraits, en présence du prévôt des marchands, de l’Archevêque, de l’ensemble des échevins et officiers du roi ». Suit un discours de Maurice Patel* évoquant l’œuvre d’Édouard Herriot. Celui-ci répond en évoquant son arrivée et ses débuts à Lyon. La seconde séance à l’hôtel de Ville a lieu le 6 février 1950, dans une salle pleine, en présence des autorités représentant le préfet, le gouverneur militaire, des consuls généraux des États-Unis et de Grande-Bretagne et de leurs confrères, des autorités judiciaires et commerciales… Prennent la parole Jean Dufourt*, « l’auteur de Calixte », qui parle des écrivains lyonnais, et André Latreille* qui évoque le cardinal Fesch.

Herriot réapparaît pour présider les séances du 19 juin 1950, et du 20 novembre 1950. Cette dernière séance est tenue à l’Hôtel de Ville, en présence des autorités, notamment le cardinal Gerlier*, le préfet, le vicaire général, Mgr Gardette* recteur des facultés catholiques, et le prince Xavier de Bourbon, de passage à Lyon. Suit une communication de J. Tricou* sur les armoiries de Lyon. Herriot n’a ni écrit, ni prononcé de discours de réception ; il n’a pas laissé de manuscrits.

Son éloge a été prononcé le 4 décembre 1973 par Georges Cohendy* dans une communication intitulée : Édouard Herriot, un homme d’État qui demeura un élu local exemplaire (MEM 29, 1975). Ennemond Trillat* a présenté le 21 février 1978 : Souvenirs autour d’Édouard Herriot et la musique (MEM 33, 1979). Paul Trillat*, le 12 décembre 1961, a évoqué : La jeunesse religieuse d’Édouard Herriot.

Herriot est élu membre de l’Académie française le 5 décembre 1946, au fauteuil n° 8.

Il est officier de la Légion d’honneur.

Le nom de « rue Président Édouard Herriot », dans le 1er arrondissement de Lyon, a été attribué le 17 juin 1957.

Bibliographie

Pierre Gric, Les courants politiques du Rhône, types et silhouettes 1870-1934, Lyon : Impr. Gén. Lyonnaise, 1934 (E.H. p. 83-87, portrait). – Ville de Lyon, Jubilé municipal de M. le Président Édouard Herriot, maire 1905-1955, 47 p. ill. – Louis Muron, Édouard Herriot, Lyon : ELAH, 1977, 270 p. – Jacques Bruyas, Édouard Herriot, Roanne : Éd. Horvath, 1985, 143 p., ill. – Jacques Prévosto, « Édouard Herriot, un demi-siècle à l’hôtel de ville (1905-1957) », in Collectif, 24 maires de Lyon pour 2 siècles d’histoire, Lyon : Lugd, 1994, p. 190-213, ill. – H. Hours, « Treize Lyonnais célèbres (entretiens) », Lyon : Lyon Mag’ Éditions, 1997, p. 152-175, ill. – L. Muron, « Édouard Herriot, maire républicain et radical-socialiste (1905-1957) », in M. Ruby dir., Lyon radicale, un siècle de maires radicaux, Lyon : ELAH, 2001, p. 37-74, ill.

Iconographie

Son tombeau, au cimetière de Loyasse, montre une sculpture de sa tête par Georges Salendre. – Un monument avec son buste en bronze par André Tajana orne le square Jussieu (Lyon 3e). – Une médaille par le sculpteur et graveur-médailleur Marcel Renard (Lyon 1893-Paris 1974) a été frappée pour son 80e anniversaire (au musée des Beaux-arts) : le droit montre le buste de profil avec l’inscription « Édouard Herriot » ; le revers porte au centre « Hommage de ses amis, de ses admirateurs à l’occasion de ses 80 ans » avec en arrière-plan un lion très stylisé ; trois petits reliefs symbolisent l’Hôtel-de-ville de Lyon, le palais Bourbon et l’Institut de France, ainsi que la date MCMLII ; la médaille lui a été remise le 8 décembre 1952, et une plaquette de 29 pages illustrées consacre la cérémonie.

Parmi bien d’autres hommages, de nombreux établissements lyonnais (écoles, lycée…) portent son nom, en particulier l’hôpital du 7e arr. (Grange-Blanche) Un timbre commémore le 20e anniversaire de sa mort (1977). Il existe à Oran un boulevard Édouard-Herriot.

Publications

Outre ses interventions politiques, ses innombrables discours, ses introductions, ses préfaces et ses articles, retenons : Philon le Juif, essai sur l’école juive d’Alexandrie, couronnépar l’Académie des sciences morales et politiques, Paris : Hachette, 1897, XIX + 366 p. – Précis de l’histoire des lettres françaises, Paris : Rieder, s.d., puis 1900, 992 p. – Lettres choisies du xviie siècle, Paris : Delagrave, [1900], 531 p. – Un ouvrage inédit de Mme de Staël. Les Fragments d’écrits politiques (1799), thèse complémentaire, Paris : Plon-Nourrit, 1904, 103 p. – Madame Récamier et ses amis d’après de nombreux documents inédits, Paris : Plon-Nourrit, 1905 ; 125 rééd. en quatre langues. – La vie et la passion de Michel Servet, conférence faite à Vienne le 10 mars 1907, Paris : Collection rationaliste, 1907. – Vieille et jeune Turquie, Paris : Rousseau, 1911. – L’effort russe, Paris, Barcelone : Bloud et Gay, 1916, 29 p. – Les sonnets de la guerre, aux soldats mutilés, Paris : Émile-Paul frères, 1916, 229 p. – Agir, Paris : Payot, 1917, 471 p. – Créer, 2 vol., Payot, 1919, 346 p. – La Vie de Beethoven, Gallimard : Paris, 1921, 303 p. ; 74 éd. en 11 langues. – La Russie nouvelle, Paris : Ferenczi, 1922, 302 p. – Impressions d’Amérique, Lyon : Audin, 1923, 128 p. – Lyon pendant la guerre, Paris : PUF, 1923, 99 p. – Sous l’olivier, Paris : Hachette, 1925, 324 p. – Dans la forêt normande, Paris : Hachette, 1925, 369 p. – Pourquoi je suis radical-socialiste, Paris : Les éditions de France, 1928, 181 p. – Esquisses, Paris : Hachette, 1928, 242 p. – Europe, Paris : éd. Redier, 1930, 280 p. – Normale, Paris : Nlle soc. d’éd., 1932, 199 p. – La porte océane ; Sur les terres des abbayes ; Les foyers spirituels de Rouen, Paris : Hachette, 1932, 177 p. – La France dans le monde, Paris : Hachette 1933, 247 p. – Le Problème des dettes, Paris : Fasquelle, 1933. – Orient, Paris : Hachette, 1934, 418 p. – Lyon, lithographies originales de Reine Cimiere, [Paris : Club de France, 1936]. – « Lyon n’est plus », t. 1, Jacobins et Modérés, Paris : Hachette, 1937, 407 p., 1 plan de Lyon en 1789, h.t. couleurs ; t. 2, Le siège, Paris : Hachette, 1938, 514 p., ill., 1 plan de Lyon du siège, h.t. couleurs ; t. 3, La répression, Paris : Hachette, 1939, 507 p., ill. ; t. 4, La réaction, Paris : Hachette, 1940, 463 p., ill. [en 1993, les éditions ELAH ont repris le même titre général pour un t. 5 en deux volumes, d’après des notes inédites d’Herriot]. – Sanctuaires, Paris : Hachette, 1938, 256 p. – Aux sources de la liberté, Paris : Gallimard, 1939, 210 p. – Message aux pays libres, New York : éd. Didier, 1942, 42 p. – La Triple Gloire de Lyon, Lyon : Audin, 1946, 28 p. – L’âme de la France et la leçon de Port-Royal, discours à l’Académie française, Conferencia, 1947, et Lyon : Georges Bouvet, 64 p. – Jadis, avant la première guerre mondiale, Paris : Flammarion, 1948, 268 p. – Pages immortelles de Diderot, choisies et expliquées, Paris : éd. Correa, 1949, 226 p. – Lyon, lithographies de René Aubert, éd. Pierre de Tartas, 1949. – Études françaises, éd. du Milieu du monde, 1950, 270 p. – Épisodes, 1940-1944, Paris : Flammarion, 1950, 207 p. – Jean Giraudoux. Avec une étude par Louis Joxe, Paris : La passerelle, 1951, 57 p. – Notes et Maximes inédits (posthume), Paris : Hachette, 1961, 141 p.

Vie nationale et vie lyonnaise

Herriot rejoint très jeune le parti radical ; il en va de même pour Justin Godart*. Lors des élections municipales de 1904, tous deux sont élus, et le maire, Victor Augagneur, les choisit tous deux comme adjoints. En novembre 1905, Augagneur choisit Herriot pour lui succéder pendant son absence comme gouverneur de Madagascar, mais celui-ci conservera la charge de maire jusqu’en 1940, puis, après une interruption sous le régime de Vichy, de 1945 à sa mort. Il est sénateur de 1912 à 1919, puis député du Rhône de 1919 à 1940 et de 1945 à 1957.

La carrière nationale d’Édouard Herriot est tout à fait exceptionnelle : président de l’assemblée nationale puis de la chambre des députés, ministre sous divers gouvernements y compris ministre d’État, lui-même président du Conseil à plusieurs reprises… On trouve des historiques de cette carrière dans de nombreux ouvrages bien connus (voir plus loin : Bibliographie).