Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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La recherche est faite par sous chaîne, insensible à la casse et aux accents.

FOURNET Joseph (1801-1869)

par Louis David.

 Joseph Jean Baptiste Xavier Fournet est né à Strasbourg, 26 rue des Dentelles, le 25 floréal an IX [15 mai 1801]. Témoins : Chrétien Xavier Thurman son grand-père, chef d’escadron de gendarmerie, et Antoine Beck, conducteur principal des ponts et chaussées. Sa famille est originaire du Dauphiné. Son père, Joseph Jean Baptiste Fournet, ingénieur ordinaire des ponts et chaussées, né à Strasbourg le 12 mars 1766 – fils de Jean Baptiste Nicolas Fournet « citoyen français » (Grenoble vers 1733-Liverdun [Meurthe-et-Moselle] 4 janvier 1804), et de Marie Anne Reynaud (Mirabeau [Vaucluse] 1734-1813), mariés à Strasbourg le 23 avril 1765 –, s’occupait des travaux du canal du Rhône au Rhin, quand il fut recruté dans l’armée pour faire les campagnes des bords du Rhin comme capitaine du Génie ; en 1804 il poursuit aux ponts et chaussées comme ingénieur en chef de Rhin-et-Moselle, puis du Haut-Rhin en 1814.

 Il était domicilié à Haguenau lorsqu’il avait épousé le 30 germinal an VIII [20 avril 1800] Catherine Caroline, dite Charlotte Thurman, née le 4 octobre 1774 fille de Simon Xavier Thurman, et de Jeanne Caroline Malphelatre ; elle aurait au cours de la Révolution arraché son père à l’échafaud ; Simon Xavier Thurman, toujours affublé de deux -n- (Thurmann) par l’état civil, signe les actes Thurman, avec un seul -n-, et substitue à son prénom Simon celui de Chrétien.

 À l’âge de douze ans, Joseph est élève au lycée de Bonn, mais vers la fin de 1813, le général Sébiastani est obligé d’évacuer Bonn : il entraîne les élèves, à pied, à travers la Belgique vers la France ; en février 1814 Fournet arrive au lycée de Rouen où il restera jusqu’à ce que sa famille retrouve sa trace à la fin de l’année. Il rentre à Strasbourg, reprend ses études, et est admis à l’école des Mines de Paris en 1822 comme élève libre. À la sortie de l’école, en 1825, il est appelé à mettre en exploitation les mines de fer de Katzenthal (Haut-Rhin), en vain ; aussi, en 1828, ce sont les mines de plomb argentifère à Pontgibaud (Puy-de-Dôme) qu’il doit remettre en service, ce qui sera un succès car elles comptèrent jusqu’à 800 ouvriers en 1880. Mais Fournet souhaite se consacrer entièrement à la science géologique donc entrer à l’université et, pour cela, il devient bachelier ès Lettres et ès Sciences, licencié en 1833, puis docteur avec une thèse Sur les sulfures métalliques et leur traitement métallurgique. Cette thèse passa relativement inaperçue en France, mais elle fut remarquée en Allemagne, pays de mineurs, et ses conclusions furent même désignées sous le nom de loi de Fournet par Scheerer dans son Traité de métallurgie (1836).

 Dès 1834, lors de la création de l’université de Lyon, on lui propose la chaire de Chimie, mais il l’abandonne à un collègue plus réputé en ce domaine et prend celle de Géologie-Minéralogie. Désormais libre de se consacrer aux sciences de la Terre, il pourra parcourir une grande partie de l’Europe, et même l’Algérie. Bon pédagogue, passionné, il attire à ses cours un public nombreux et suscite des vocations (Chantre*, Dumortier*...).

 Son œuvre est considérable, non seulement en géologie, en minéralogie, en métallurgie, mais aussi en géographie physique ou en météorologie. L’étude des filons métallifères (Vosges, Alpes, Massif Central) le conduit à abandonner les théories sur l’intervention de l’eau (voir la querelle neptunisme-plutonisme), puis l’oriente tout naturellement vers le métamorphisme aux théories duquel il apportera une très large contribution. Il s’intéresse aussi aux terrains houillers, si largement répandus dans les massifs anciens, mais leur donne une extension originelle bien trop grande. Il ne néglige pas pour autant les terrains sédimentaires, et même les plus récents pour lesquels il privilégie l’action de l’eau refusant de voir celle de la glace pour les régions proches des Alpes.

 Il est décédé le 8 janvier 1869 à Lyon, et inhumé au cimetière de Chessy-les-Mines (Rhône) avec ses parents. Lors de ses funérailles, deux discours ont été prononcés, l’un par Claude Jourdan*, l’autre par L. Guillard*, parus dans le Salut Public et le Courrier de Lyon, ils sont reproduits par Chantre* dans sa Notice historique (1870, p. 67-70 et 70-71).

 Il avait épousé le 13 novembre 1828 à Paris Généreuse Godat, née à Courtavon (68) le 8 juillet 1797, fille d’Henri Godat, cultivateur, et de Marianne Hubler.

 Chevalier de la Légion d’honneur (1841). Chevalier puis officier (1863) de l’ordre des Saints Maurice et Lazare (Italie).


Académie

Fournet est élu à l’Académie, le 2 juin 1835, en même temps qu’Alexandre Leymerie. Il occupera à partir de 1847, le fauteuil 4, section 2 Sciences. Membre de l’académie de Savoie (1845). Il a été élu le 13 avril 1853 membre correspondant de l’Académie des sciences pour la section de minéralogie.

Bibliographie

Bonnel. – St. Le Tourneur, DBF. – GDU. – E. Chantre*, « Notice historique sur la vie et les travaux de J. J. Fournet », Ann. Soc. Sci. Indus. Lyon, 1870, p. 5-87 (bibl.). – A. Caillaux, « Notice sur la vie et les travaux de M. Fournet » (lue le 21 avril 1870), Bull. Soc. Géol. France (2) 27, 1871, p. 521-539. – A. Falsan*, « Des progrès de la minéralogie et de la géologie à Lyon et de l’influence de Joseph Fournet sur l’avancement de ces sciences » MEM S 20, 1873, p. 219‑275. – A. Locard* : « Rapport sur les travaux », MEM 1900, Fournet p. 32-36. – A. Chermette*, « Joseph Jean-Baptiste Fournet (1801-1869) », Bull. Soc. Linn. Lyon 52-8, 1983, p. I-X. – A. Chermette, « Fournet, le maître lyonnais », in Minéraux, mines et minéralogistes lyonnais au xixe siècle, 1993, p.16-20. – L. David* et N. Mongereau*, « La place de Joseph Fournet (1801-1869) dans la querelle neptunisme-plutonisme », in La découverte de la Terre, Akademos 30, 2011, p. 41-45.

Manuscrits

Sur vingt manuscrits conservés à l’Académie, deux traitent de problèmes scientifiques : Deux espèces minérales [...] trouvées dans le département du Rhône, 1847, Ac.Ms279-II f°18. – Premier rapport fait à l’académie de Lyon sur les recherches d’un pavé pour la ville de Lyon, AcMs279-III, pièce 158, 3 p.

Publications

Fournet a publié trente-et-une notes de géologie et de météorologie dans les Mémoires de l’Académie entre 1845 et 1867 (liste dans Bonnel, p. 204-205). Sur un total de deux cent soixante publications nous retiendrons :

Région lyonnaise : « Description géologique du bassin houiller des environs de Ternay et Communay, département de l’Isère », Ann. Soc. Agric. Hist. nat. Arts utiles Lyon, 1838, p. 279‑309, pl. 9. – « Discussion sur les blocs erratiques, rapport Fournet », RLY 15, 1842, p. 161‑192. – « Note sur le mont d’Or et sur son système triasique », Bull. Soc. Géol. France (2) 16, 1859, p. 1083‑1094. – « Géologie lyonnaise », Procès verbal de la session extraordinaire de la Société Géologique de France à Lyon, 1-11 septembre 1859, et nombreux ajouts importants. Ann. Soc. Agric. Hist. nat. Arts utiles Lyon (3) 5, 1862, p. 241-488 et 41-536.

Autres régions françaises : « Études sur le terrain jurassique et les minerais de fer de l’Ardèche », Ann. Soc. Agric. Hist. nat. Arts utiles Lyon (1) 6, 1843, p. 1-35. – « De l’action diluvienne sur le sol de France », RLY 17, 1843, p. 89-117. – « Sur l’extension des terrains houillers sous les formations secondaires et tertiaires de diverses parties de la France », MEM S 5, 1855, p. 1-316, 13 pl. – « Appendice aux aperçus concernant l’extension des terrains houillers de la France », MEM S 6, 1856, p. 1-168. – « Les pluies de terre observées depuis quelques années dans le bassin du Rhône », MEM S 13, 1863, p. 185-245. – « Détails concernant l’orographie et la géologie de la partie des Alpes comprise entre la Suisse et le comté de Nice », MEM S 13, 1863, p. 51-154.

Roches anciennes et les minéraux : Sur l’ordre de sulfurabilité des métaux et sur quelques résultats du traitement métallurgique des sulfures métalliques (thèse Paris 1833) ; publication partielle dans Ann. Mines (3) 3, p. 3-36, 225‑246. – « Mémoires divers sur les mélaphyres, les spilites, les basaltes et les trapps » MEM S 9, 1859, p. 230-286.

Ouvrages généraux : « De l’influence du mineur sur les progrès de la civilisation, d’après les données actuelles de l’archéologie et de la géologie », MEM S 11, 1861, p. 217-398 ; 12, 1862, p. 1-282 [discours à la séance de rentrée des facultés 28 novembre 1861, présenté à l’Académie le 7 janvier 1862 : travail de grande érudition abordant tous les progrès liés à l’exploitation des mines depuis l’Antiquité ; table des matières détaillée] ; publié aussi Lyon : Rey et Sézanne.