Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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La recherche est faite par sous chaîne, insensible à la casse et aux accents.

BROS Myriam (1918-2003)

par Isabelle Collon.

 Née à Lyon le 3 juillet 1918, fille de Marie Joseph Isaac Bros (Lyon 1er 5 mai 1879-Sainte-Foy-lès-Lyon 7 janvier 1957), bourgeois lyonnais, et de Marguerite Marie Henriette, dite Maggy, Fraisse (Saint-Étienne 12 novembre 1883-Sainte-Foy-lès-Lyon 26 juillet 1976). Son arrière-grand-père maternel, Antoine Fraisse-Merley né en 1816, avait fondé à Saint-Étienne une importante entreprise de rubannerie, reprise par ses fils : Pierre Paul (né en 1848) père de Maggy, et Henri (Saint-Étienne, 1880-1892), dont les collections, prestigieuses, se retrouvent au musée d’art et d’industrie de Saint-Étienne. La saga familiale raconte que l’entreprise aurait fourni les longs rubans décorant la statue de la Liberté éclairant le monde de Bartholdi lors de son inauguration dans la baie de New York le 28 octobre 1886.

 Myriam est la cinquième enfant de la famille après deux frères, Henri (1910-1986) passementier à Saint-Étienne, et Robert, et deux sœurs, Noëlle (1908), épouse Desgeorge, et Anne.

 Elle fait sa scolarité au cours Belmont à Lyon où elle passe son baccalauréat. Elle se consacre d’abord au chant avec une belle voix de mezzo-soprano, et donne des récitals en particulier avec Ennemond Trillat*. Pendant la guerre, elle passe son diplôme d’infirmière et s’engage dans la défense passive avec sa sœur Noëlle. À la Libération, elle poursuit ses activités et devient infirmière-ambulancière. Elle découvre Buchenwald et donne des soins aux déportés. Elle exerce comme instrumentiste dans un bloc opératoire de campagne, puis à l’hôpital de Sainte-Foy.

 Elle se met à la peinture qui ne la satisfait pas totalement. Le critique Jean-Jacques Lerrant lui conseille d’utiliser une autre technique. En 1948, elle commence à travailler l’émail et la sculpture : entre 1947 et 1950, elle réalise des oiseaux en céramique, car son père avait constitué une collection d’oiseaux qu’elle donnera plus tard au museum de Lyon.

 Influencée par l’œuvre de Gustav Klimt et celle d’Hundertwasser, elle est fascinée par le côté alchimiste de l’émail, matière vivante, et sa complicité avec le feu, son aspect précieux et orfévré. Elle conçoit alors des panneaux d’une grande richesse colorée où la transmutation des poudres d’émail incolore crée chaque fois l’étonnement. Ces panneaux émaillés offrent à la vue des créations se référant à la nature : chant du monde panthéiste d’insectes, de tortues, d’oiseaux, de fleurs et de fruits, des cristaux précieux ; d’autres sont plus abstraites, certaines même sont d’inspiration symboliste. Mais de toutes émanent une joie de vivre et un lyrisme équilibré. Sa technique évolue. Elle émaille d’abord des surfaces de terre cuite ou de grès, puis des panneaux de lave volcanique qui révèlent leurs valeurs à des températures différentes (souvent à 940 C), ce qui accentue la difficulté et demande des cuissons répétées.

 En 1953, elle fait sa première exposition à Paris. En 1954, elle expose à la galerie de Marcel Michaud à Lyon, puis elle est invitée à exposer au Salon du Sud-Est par Pierre Combet-Descombes*. En 1958, elle commence ses réalisations monumentales. Le peintre-architecte Louis Thomas lui confie plusieurs chantiers : elle réalise un grand panneau émaillé de 27 m2 pour l’aéroport de Bron. En 1959, elle est admise à un concours pour décorer les édifices publics et reçoit l’agrément de l’État dans le cadre de la loi du 1%. En 1960, la ville de Lyon fait l’acquisition d’un panneau, aujourd’hui au musée des Beaux-Arts. En 1966, elle réalise un panneau de céramique de 80 m2 sur le barrage de Monteynard sur le Drac, et reçoit le prix du groupe Paris-Lyon. De janvier à février 1977, elle expose ses œuvres au musée des Beaux-arts de Lyon. Jacques Verrière a été son marchand jusqu’à sa mort. En 1982, elle participe à l’exposition de l’ELAC : « Entre création et recréation, 100 ans d’achats de la ville de Lyon ».

 En 1985, elle devient présidente du Salon du Sud-Est. Elle participe au groupe d’Art Monumental fondé par le peintre Camille Niogret.

 Parmi ses autres œuvres monumentales, citons : le monument à Antoine Charial, le Centre Benjamin Delessert, la Cité universitaire de Saint Irénée, la Poste de Villeurbanne, l’immeuble EDF, rue des Cuirassiers à la Part-Dieu, l’Hôpital Debrousse à Sainte-Foy ; mais aussi de nombreux panneaux pour des groupes scolaires (la Duchère), des immeubles, des bibliothèques, des hôpitaux.

 Restée célibataire, elle habitait la maison familiale Puymartin (construite en 1913 par Alphonse Bros pour son fils Joseph) à Sainte-Foy-lès-Lyon. C’était une personnalité anti-conventionnelle.

 Elle est morte le 15 juin 2003, paralysée à la suite d’une chute, après un calvaire de quatre mois. La messe de funérailles a été célébrée en l’église Saint-Luc de Sainte-Foy, devant l’autel qu’elle avait décoré de ses émaux.


Académie

Élue le 1er décembre 1987 au fauteuil 4, section 4 Lettres : elle est l’une des deux premières femmes titulaires reçues à l’Académie de Lyon (voir Danièle Gautheron*). Son discours de réception le 22 mars 1988 est titré : Odilon Redon, en marge de l’émail, analyse fort juste sur la parenté de l’émail avec l’œuvre d’Odilon Redon (MEM 43, 1989). Communications : 24 mars 1992, Manet l’infortuné (MEM 1993, 47) ; 22 octobre 1996, Mes ailes au regard de l’homme (MEM 51, 1997). Elle a offert un panneau en lave émaillée qui se trouve aujourd’hui dans la bibliothèque de l’Académie.

Bibliographie

Yann Le Pichon, Les merveilleux émaux de Myriam Bros, Nîmes : C. Lacour, 1989, 27 p. – Myriam Bros, « l’art comme une alchimie », préface d’Alain Vollerin [contient un entretien de Myriam Bros avec René Deroudille], Rillieux-la-Pape : Mémoire des Arts, 1998, 96 p.

Son éloge funèbre a été prononcé par Claude Lapras* le 20 janvier 2004 (MEM 3, 2005).