Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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La recherche est faite par sous chaîne, insensible à la casse et aux accents.

AUDIN Jean Marie Vincent (1793-1851)

par Dominique Saint-Pierre.

 Jean Marie Audin est né à Lyon, rue de l’Épine (Saint-Paul), avec deux seuls prénoms, le 20 avril 1793, fils de Joseph Audin, demeurant chez le citoyen Brigand, place Saint-Alban, et de Marie Dubanchet. Déclaration faite le 21 en présence de Jean Marie Benoit, chirurgien de l’hôpital général, et d’Étiennette Dubanchet, tante de l’enfant, veuve de Jean Humblot, tailleur place du Petit Collège. Le père ne sait signer.

 Il aurait été le filleul de l’abbé Rozier. Après avoir fréquenté « un modeste pensionnat devenu l’École cléricale ou Manécanterie, sous la direction de l’abbé Ducreux », il est tonsuré des mains du cardinal Fesch, fait ses humanités au petit séminaire d’Alix (Rhône), puis à celui de Saint-Jodard (Loire), suit les cours de logique et de philosophie à l’Argentière (Aveize, Rhône) ; mais il renonce à l’état ecclésiastique en 1810, devient clerc d’avoué à Lyon, passe sa licence en droit à Grenoble et s’inscrit au barreau, mais sans exercer. Il aime écrire : son premier manuscrit serait Souvenirs d’Alix. Auteur de différents opuscules, il est emprisonné brièvement en 1815, non pas pendant les Cent-Jours pour la parution de la Lanterne magique, qui éreinte diverses personnalités dont Napoléon (p. 32), non pas pour avoir collaboré à des vaudevilles un peu légers pour le théâtre des Célestins, mais pour une brochure satirique écrite par un autre et que la police lui attribue à tort. Il collabore au Journal de Lyon, fondé par Ballanche*. Il se rend à Paris et devient libraire et éditeur par brevet du 4 décembre 1815, et épouse la fille d’un employé du Trésor. Installé 25 quai des Augustins, il publie des romans (Michel Morin ou la Ligue. Nouvelle politique, 1818, 323 p. ; Roman d’Amat y trouve des éléments autobiographiques), des vaudevilles (Charles, ou le Parrain : Comédie historique en un acte et en prose, à l’occasion de la fête du Roi, par MM. Martin, Loignon et J.-M.-V. Audin. Théâtre d’Orléans, novembre 1825, Paris : Lebègue, 1825, 42 p.), des opuscules où il ne cache pas son attachement à la monarchie, une tragédie (Virginie ou le Triumvirat), d’ailleurs refusée, et des guides de voyage. Il n’est pas conventionnel, par exemple en éditant en 1830 Le Livre sans titre, dédié aux Jeunes Gens et aux Pères et Mères de Famille, petit manuel de 16 images destiné à lutter contre la masturbation chez les jeunes gens. Il apprend l’allemand, l’anglais, l’espagnol et l’italien, ce qui lui permet de voyager. La collection de ses Guides de voyages est publiée sous le nom de Richard, Ingénieur-Géographe, employé aux Postes, ou de J. B. Richard, qui rappelle les guides de l’allemand Heinrich August Ottokar Reichard (Gotha 1751-1828). Il avait d’ailleurs publié une contrefaçon en 1824, assortie de compléments et de corrections, sous le titre Merveilles et beautés de la nature en Suisse, par J. B. Richard, après avoir visité la Suisse l’année précédente avec le guide de Reichard. Retiré de la librairie en 1836 et d’une production assez facile, il consacre son talent d’écrivain à l’histoire religieuse – devenant un fervent apologiste de la religion – et aux guides, voyageant dans toute l’Europe, notamment à Rome pour fouiller les bibliothèques, et au Moyen Orient (Jérusalem en 1849). Son Histoire de Luther, publiée en 1839, puis celles de Calvin en 1841, de Léon X en 1844, d’Henri VIII en 1847 recueillent beaucoup de succès dans les milieux religieux. Barbey d’Aurevilly écrira : « il a servi l’église sans appartenir à l’église ».

 Résidant quelque temps à Lyon, il y crée un Institut catholique, dont le but est de défendre la religion et la liberté de l’enseignement. Il y reçoit Ravignan et Montalembert.

 Selon les historiens, Audin, de retour d’Italie, serait mort à Orange le 21 février 1851, pour d’autres près de Vienne. Mais on ne trouvera pas son acte de décès dans ces cités. En effet, selon la Bibliographie catholique, il aurait été malade à Rome, où il s’était rendu pour gagner la Palestine, son épouse serait venue le chercher à Civitavecchia qu’il aurait rejoint pour gagner du temps : « il expirait doucement, sans agonie, aux environs d’Orange, entre sa femme et son beau-frère, dans la voiture même qui le ramenait de Marseille à Lyon. Quatorze heures durant, Mme Audin dut contenir l’explosion de sa douleur, voulant ramener jusqu’à la cité natale du défunt, ce cadavre qu’il aurait fallu déposer en route, dans un coin ignoré, si l’on s’était aperçu au dehors de ce décès inattendu ». L’acte de décès se trouve effectivement à Lyon au 22 février, ainsi rédigé : « Nous maire de Lyon, ensuite d’un procès-verbal dressé ce jourd’hui par le commissaire de police de l’arrondissement du palais des Arts, avons constaté le décès de Jean Marie Audin, homme de lettres, chevalier de la Légion d’honneur, demeurant à Paris rue Christine n° 3, époux d’Adélaïde Antoinette Hersant, lequel est décédé dans la journée d’hier dans la voiture des messageries Gaillard venant de Marseille ». Son voyage n’était pas terminé, car il a été inhumé à Paris au Père-Lachaise (59e div., 3e l., AE, 14), après un dépôt à la sacristie paroissiale de Saint-Jean et une inhumation provisoire le 23 février à Loyasse. Son beau-frère pouvait être Jean Charles Gabriel Barretta, né à Bruxelles le 10 mai 1796, aide-chirurgien major à l’hôpital militaire de Lyon, lorsqu’il a épousé à Lyon le 15 février 1820 Benoite Audin, née à Lyon le 8 floréal an 6. Leur fils sera libraire à Lyon. Il peut être aussi Alexandre Martin, qui a traduit pour Audin L’Histoire de Thomas Morus par Stapleton.

 La mort d’Audin eut un grand retentissement dans les milieux catholiques et littéraires, et on reprocha à l’épiscopat lyonnais de n’avoir point fait de cérémonie importante à Lyon lors du passage de sa dépouille à Saint-Jean.

 Chevalier de la Légion d’honneur le 6 mai 1846 (LH/71/78 ; remise le 15 juin à Rome par le comte Rossi, ambassadeur du roi à Rome), chevalier de Saint-Grégoire-le-Grand, chevalier de Saint-Maurice, commandeur de Saint-Sylvestre et du Saint-Sépulcre.


Académie

Jean Marie Vincent Audin fait partie des quinze académiciens qui ont obtenu entre 1841 et 1847 le statut particulier d’ « académicien libre », pouvant participer à toutes les séances particulières et publiques, y faire des rapports et y recevoir un jeton pour leur première lecture, mais sans droit de vote. Il a été élu le 7 juin 1842. Il ne manque pas d’envoyer ses œuvres à l’Académie pour la bibliothèque (Ac.Ms277-III 20 juillet 1844, Ac.Ms277-IV 2 août 1845 et 27 juin 1847).

Membre de la Société littéraire de Lyon en 1839. Membre de l’Académie Tibérine en 1842.

Bibliographie

David 2000. – Feller. – Roman d’Amat, DBF. – Manne, Nouveau dictionnaire des ouvrages anonymes et pseudonymes, 1868. – Claudius Hébrard, Notice biographique, Paris, 1851. – Bibliographie catholique, « Nécrologie. M. Audin, XI, 1851-1852, août 1851, p. 47-59. – F.-Z. Collombet, « Nécrologie, J. M. Audin », p. 151-154 [avec des erreurs]. – Abbé N. Bez, « Notice historique sur J.M.V. Audin », RLY 1851, p. 202-219. – Gilles Bertrand, Le Grand tour revisité : le voyage des Français en Italie, milieu xviiie siècle-début xixe siècle, Coll. École française de Rome, 2008, p. 287, 317, 632, 633. – Notice sur J.M. Audin auteur des histoires de Luther, de Calvin, de Léon X et de Henri VIII, Paris : L. Maison, 1856, 45 p. avec un portait d’Audin gravé par A. Salmon, suivi d’une introduction par Audin de sa traduction de La Réforme contre la Réforme, ou retour à l’unité catholique par la voie du Protestantisme du polémiste allemand, Hoeuninghaus, 48 p.

Iconographie

Une médaille d’or de grand module lui avait été adressée par Charles-Albert, roi de Piémont, sur laquelle sont gravés d’un côté le portrait du roi et de l’autre ces mots « Hommage du roi au célèbre écrivain catholique français ». « Un marbre a sa place marquée dans la galerie spéciale [?] qu’elle [sa ville natale] consacre aux illustrations dont elle est fière de perpétuer le souvenir ».

Publications

Retenons : Lanterne magique lyonnaise ou les petits ridicules d’une grande ville de province, Lyon : chez tous les marchands de nouveautés, 1814, 68 p. – Louis XVIII, la Patrie, l’Honneur, ou la France depuis le mois de mars jusqu’au mois de juillet, Lyon : Chambet, 1815, 54 p. – Tableau historique des événements qui se sont passés à Lyon depuis le retour de Bonaparte jusqu’au rétablissement de Louis XVIII, Lyon : Impr. Boursy, 1815 ; 2e éd., Lyon : Guyot frères, 1815, 201 p. – Blanc, bleu, rouge, Lyon : Chambet, 1815, 16 p. – Notice historique sur la princesse Marie-Caroline, duchesse de Berri, Paris : Audin, Egron, 1816. – Florence ou la Religieuse, Paris : Figoreau, Ponthieu, 1822, vol. 1, 341 p. – Le régicide, Paris : Lemonnier, 1820, 263 p. – L’an 1860 ou Pline le Jeune historien de Charles X, Paris : Audin, Urbain Canel et Ponthieu, [1824], 40 p. – Relation jour par jour heure par heure des derniers momens de S. M. Louis XVIII, Paris : Audin, Canel, Ponthieu, 16 septembre 1824, 79 p. – Guide du voyageur en Suisse, Paris-Audin, Canel, 1824, figures 822 p. – Charles, ou le Parrain, comédie historique en un acte, à l’occasion de la fête du roi, par MM. Manin, Lognon, et *** [Audin], Paris : Le Bogue, 1825. – Guide du voyageur et du promeneur aux environs de Paris, indiquant la description des villes, bourgs, villages et hameaux […] dans un rayon de 15 lieues, par Richard et Saint-Hilaire, Paris : Audin, Canel, Pontheu, Béchet, 1827, plan et gravures d’Hocquart jeune ; 2e éd. Paris : Audin, en 1837. – Essai sur le Romantique, Paris : Canel, 1825 ; autre édition en 1826 ; devenu Essai sur la littérature romantique, Paris : Audin, 1829, 123 p. (Barbey d’Aurevilly cite une édition chez Trouvé en 1822). – Histoire de la Saint-Barthélemy, d’après les chroniques, mémoires et manuscrits du xvie siècle, Paris : Canel, 1826, 498 p. – Guide pratique du voyageur en Europe, 2 vol., Paris : Audin, 1828-1829, 624 x 2 p. – Guide du voyageur en Espagne et en Portugal, Paris : Ponthieu, 1828-1829, 62 p. – Le véritable conducteur aux Cimetières du Père La Chaise, Montmartre, Mont-Parnasse et Vaugirard, par MM. Richard et ***, Paris : Roy-Terry, 1830, 360 p. – Histoire de la vie, des écrits et des doctrines de Martin Luther, Paris : Masson, Vaton, Lyon : Chambet, 2 vol., 1839, 532 p., 7e éd., (critique et extraits in RLY 9, 1839, p. 273-289) – Histoire de la vie, des ouvrages et des doctrines de Calvin, Paris : Masson, 1841, 557 p., 6e éd. – Carte du Cours de la Saône depuis Gray jusqu’à Lyon pour servir à l’Itinéraire Pittoresque de Chalon à Lyon par les Bateaux à Vapeur, dessinée par L. Badré, gravée par V. Bonnet, Richard [Audin] éd., 1842. – Histoire de Léon X et de son siècle, 2 vol., Paris, 1844, 512 p. ; éd. italienne Milan : Presso G. Resnati Librajo, 1845. – Histoire de Henri VIII et du schisme d’Angleterre, 2 vol., Paris : L. Maison, 1847. – Guide du voyageur en Espagne et en Portugal, 2e éd., Paris : L. Maison, 1853, 792 p. – Nouveaux dialogues familiers et progressifs français-allemands (par Richard et Wolters), 2e éd., Paris : L. Maison, 1854, 320 p. – Nouveaux Dialogues familiers et progressifs français et espagnols, par Richard J.-M., V. Audin et Don J. M. de Corona, revus et augmentés par M. Castelar, 1855. – De nombreux guides sur la Grande-Bretagne, la Belgique, Genève, etc.