Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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FALCONNET Camille (1671-1762)

par Dominique Saint-Pierre.

 Encore écrit Falconet. Né le 29 mars 1671, il est baptisé le même jour « dans la chapelle de Monseigneur l’archevêque à Lyon », paroisse Sainte-Croix. Il est fils de Noël Falconet (Lyon, 1644–Paris, 1734), docteur de la faculté de Montpellier, médecin consultant du roi, et de Marguerite Monin (1649-1689). Petit-fils d’André Falconet (Roanne 1611-Lyon 1691), seigneur de Saint-Gervais, docteur de la faculté de Montpellier, agrégé puis doyen, au collège des médecins de Lyon, échevin de Lyon en 1667 et 1668, puis conseiller médecin du roi, premier médecin de Christine de France, duchesse de Savoie, et de Catherine Quinson. André Falconnet, propriétaire de l’hôtel de Gadagne, y a fait d’importants travaux. Par son beau-père, Louis Quinson, il a possédé le château de Fleurieu-sur-Saône, aujourd’hui transformé en appartements. Camille est l’arrière-petit-fils de Charles Falconet, né à Arenthon en Faucigny avant 1585, décédé à Roanne en 1641, seigneur de Saint-Gervais, médecin ordinaire de la reine Marguerite de Valois en 1614 et 1615. Parrain : Camille de Neufville* [de Villeroy, 1605-1693], puissant et seigneur marquis de Neufville, archevêque et comte de Lyon, primat de France, commandeur des Ordres du roi, lieutenant pour sa majesté au gouvernement de la ville de Lyon, Lyonnais, Forez et Beaujolais ; marraine : haute et puissante dame Marie Angélique Turpin [Turpin de Vauredon, tante de Louvois], femme de monseigneur Bagnols [François Dugué de Bagnols], intendant de la province de Lyonnais, Forez, Beaujolais et Dauphiné. Il a épousé Marie Anne Verdun.

 Plus éduqué par son grand-père André que par son père Noël, Camille fait ses études au collège du cardinal Lemoine à Paris, puis à Lyon pour faire sa philosophie et à Montpellier pour sa médecine, où il est l’élève de Chirac. Il termine ses études à Avignon où le cursus de docteur en médecine était plus court. Rentré à Lyon, il acquiert une solide réputation de médecin et d’érudit. C’est alors qu’il débattit durement avec la mystique Madame Guyon. En 1698, Noël, son père, agrégé dans le collège de médecine de Lyon, est appelé à Paris pour occuper une charge de médecin de la Grande-Écurie, à la demande du comte d’Armagnac Louis de Lorraine, avant de devenir médecin consultant pour la personne du roi. Il reviendra d’ailleurs à Lyon lorsque le maréchal de Villeroy y sera nommé gouverneur. Camille remplace alors son père dans son emploi de commissaire de la Santé à Lyon. Puis, il s’établit à son tour à Paris en 1707. Devenu médecin de la maison de Bouillon, il succède en 1709 à Tournefort, décédé, comme médecin de « M. le Chancelier » (Louis II Phélypeaux, 1643-1727, comte de Pontchartrain, chancelier de France de 1699 à 1714), avec une pension de 2000 livres. Cette même année, il soutient une thèse de bachelier sous la présidence de Jacques Fourneau : An totum generationis opus solis mechanicis legibus absolvatur ?, puis en 1710 deux thèses de licence : Utrum mineralibus et metallicis chronicorum morborum certio curatio ? sous la présidence de Claude Berger, et An aer qui temperatissimus videtur perinde omnibus salubris ? sous la présidence de François Goue. Il devient docteur le 27 novembre 1710. Déjà appelé au chevet de Louis XIV en 1714, il devient médecin consultant de Louis XV, et confirme sa réputation en participant à la guérison du roi d’une fièvre en août 1721. « Le cardinal Dubois a fait donner à Falconet, médecin du roi et assistant du premier médecin, la survivance de cette place pour son fils avec la pension de 9 000 livres qui y est attachée, et une pension pour un autre fils qui est ecclésiastique » (Marais, Journal, 27 août 1722). En 1726, Noël et Camille Falconnet, père et fils, médecins du roi, obtiennent une pension viagère de 1 000 livres, réversible sur le fils, pour « les soins extraordinaires qu’ils se sont donnés pendant la dernière et très dangereuse maladie de M. le marquis d’Halincourt, petit-fils de Mgr le maréchal duc de Villeroy, et du succès de leurs attentions et de leur habilité, puisque l’entière guérison leur est due, et que c’est le service le plus important que les dits Falconnet puissent rendre, tant à la maison de Villeroy qu’à cette ville et aux provinces de ce gouvernement ». Selon Buvat, le duc de Bouillon dans son testament alloua 1 500 livres de pension viagère au sieur Falconnet, son médecin. Érudit, ami de Malebranche et de Fontenelle, Camille est dit « être un des savants de l’Europe dont le savoir est le plus étendu et le plus varié» (La Clef du Cabinet des princes de l’Europe ou Recueil historique et politique sur les matières du tems, t. IV, Paris : Ganeau, 1759). Selon Jean François Dreux du Radier : « Ce M. de Falconnet qui savait tant d’anecdotes et qui en avait rassemblé un nombre prodigieux qu’il écrivait sur des cartes, et qu’il mettait ensuite par ordre, se contentait de cette manière de travailler, et toute idée d’ouvrage suivi lui faisait peur. Il est étonnant qu’un homme aussi universel, et qui eût pu écrire sur tant de sujets, qui s’est fait un amas si considérable d’observations, qui avait même beaucoup de facilité à écrire en latin, et en français, n’ait presque rien publié, pendant une vie aussi longue exempte de maladies, et des incommodités de la vieillesse… C’était l’homme du meilleur tempérament qu’on put voir, son humeur était gaie, son caractère prompt, son esprit vif. Il aimait à parler, et parlait fort bien. Comme sa fortune était aisée, il ne s’était point jeté dans la pratique de la médecine, et s’était presque borné à la théorie ; cependant, comme il avait beaucoup de lecture, et une mémoire excellente, il brillait dans la consultation. Les jeunes médecins le trouvaient toujours prêt à leur donner ses conseils et à leur prêter des livres… Il ne se déclarait volontiers que contre les idées nouvelles et hasardées, surtout en médecine. ».

 Le riche cabinet de Falconnet accueillait ses amis de passage à Paris (lettre de Bottu de Saint Fonds* du 19 février 1720). Il possédait une bibliothèque de plus de 50 000 volumes, car Mlle de Bouillon lui avait légué la bibliothèque de son père, le duc, qu’elle avait enrichie. Comme il n’a pas d’héritier survivant, il la propose à Louis XV en décembre 1742. Après son décès, la bibliothèque du roi acquiert 11 000 volumes, devenu le fonds Falconnet. Il a été nommé par le roi, avec l’abbé de Targny, pour expertise pour l’acquisition de la Colbertine.

 Il est mort à Paris le 8 février 1762, célibataire.


Académie

L’un des sept fondateurs de l’académie de Lyon le 30 mai 1700, il prêta son logis pour les premières réunions. Brossette écrit à Boileau le 10 avril 1700 : « Nous avons aussi [à l’Académie]… M. Falconnet, médecin, fils d’échevin : nous n’avons personne qui le dépasse, ni peut-être qui l’égale en esprit, en science, en livres et en mérite : je dis ordinairement de lui, qu’il sait, qu’il possède : Quidquid habet Latium, Graecia quidquid habet. »

En 1716, Falconnet devient membre de l’Académie royale des inscriptions et belles lettres. Selon Maury, Le Beau, secrétaire perpétuel de l’Académie des inscriptions disait de Falconnet et de Fontenelle : « Ce sont deux vieillards aguerris et encore pleins de vigueur, qui s’enferment dans les tourbillons de Descartes, comme dans une place assiégée, la défendant avec courage et intelligence contre les assauts d’une jeunesse impétueuse ». L’éloge de Falconnet a été prononcé à Lyon par Jacques Claret Fleurieu de la Tourette*, et à Paris à l’Académie des inscriptions par Lebeau le 12 novembre 1762. Le Thieullier, doyen de la faculté de médecine de Paris, prononça également son éloge funèbre à la fin de son décanat, en latin.

Bibliographie

Michaud. – Dumas. Quérard, t. 3, 1869. – Article de Saint Le Tourneur, DBF. – Catalogue de la bibliothèque de feu M. Falconnet, Médecin consultant du Roi, et doyen des médecins de la Faculté de Paris, de l’Académie royale des Inscriptions et Belles-Lettres, etc. t. 1, Paris : Barrois, 1763. – Visé dans le catalogue précédent, p. XX-XXIII : l’éloge (« Brevis Laudatio Magistri Camilli Falcone ») du samedi 6 novembre 1762 de Camille Falconet par Jean Le Thieullier, doyen de la faculté de médecine de Paris. – Inventaire-sommaire des archives communales antérieures à 1790, ville de Lyon. Rédigé par F. Rolle, archiviste adjoint (Volume 1), série BB, p. 163, 182, 188. – Jean François Dreux du Radier Récréations historiques, critiques, morales et d’érudition avec l’histoire des fous en titre d’office… vol. 2, p. 86, Paris : Robustel, Vve Dushesne, 1767. – Correspondance littéraire et anecdotique entre Monsieur de Saint Fonds et le Président Dugas, membres de l’Académie de Lyon, 1711-1739 publiée et annotée par William Poidebard, p. XL, Lyon : Paquet, 1900. – Louis Ferdinand Alfred Maury, L’Ancienne Académie des sciences, Paris : Didier, 1864, p. 54. – Jean Buvat, Journal de la régence (1715-1723), t. 2, p. 278, Paris : Plon, 1865.

Iconographie

Son buste, en plâtre patiné terre cuite, modelé en 1747 sur un buste original fait par Étienne Falconet (1716-1791) [sans lien de parenté avec Camille], a été donné le 19 mars 1808 à l’académie de Lyon par son arrière-petit-neveu par sa mère, Camille Hilaire Durand. Le buste original en terre cuite avait été donné par son père à l’École de médecine à Paris. – Il existe aussi un buste en terre cuite au musée des Beaux-Arts de Lyon. Charles Nicolas Cochin a fait son portrait, d’après le modèle de d’E. Falconet, qui se trouve au Service des collections de l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts. – Un tirage, gravé par P. E. Moitte, se trouve à l’académie de Lyon. Il est sous-titré :

Camille Falconet

Médecin consultant du Roy

Il fut, par sa Candeur, digne du siècle d’or :

Il sema de bienfaits son heureuse carrière ;

De son savoir, à tous, il ouvrit le Trésor,

Et mille écrits divers brillent de sa lumière.

Manuscrits

Observations sur le livre de Galien : Methodus […] Galeni in differentiis et causis morborum. – Dumas ajoute que Falconnet avait laissé plus de cinquante mille fiches sur lesquelles il avait porté des extraits de note. Rigoley de Juvigny en a utilisé pour Les bibliothèques françaises de la Croix du Maine et Du Verdier…, Paris : Saillant et Nyon, 1772.

On retrouve les notes de Falconnet un peu partout, ainsi : Catalogue des manuscrits des collections Duchesne et Bréquigny, de René Poupardin : f° 83 – Remarques de M. Falconnet sur la Table de Peutinger.

Dans le Catalogue des manuscrits de la bibliothèque Mazarine, par Auguste Molinier, t. 2, p. 6, Paris : Plon, Nourrit et Cie, 1886 : 1072 (2212) – La béatitude des chrétiens, ou le fleo de la foy », par Geoffroy Vallée, natif d’Orléans… À la suite : Note historique de M. Falconnet, sur le petit ouvrage de Geof. Vallée, écrite de la main de M. Falconnet lui-même, à la fin de la copie figurée de l’ouvrage de Vallée, sur le seul exemplaire imprimé qui soit à Paris dans le cabinet de M. le président de Cotte (vendu par M. de Cotte à M. Gagniat, à la vente duquel M. de la Vallière l’a acheté 851 l.). – Ac.Ms140-II f°4 gravure : portrait de Camille Falconnet. – Ac.Ms140-II f°5 Durand : Lettre de Durand à l’Académie, 19 mars 1808. – Ac.Ms140-II f°8 Lebeau : Notice historique sur Camille Falconnet (extraits). – Ac.Ms.270 f°83 Falconet Tricaud Laisné document relatif à l’Histoire de l’Académie de Dumas. – Ce que l’on doit croire de l’opinion de mener à la mer ceux qui sont mordus d’un chien enragé, lu par M. Chenet* de la part de son ami Falconnet le 22 février 1717, cité dans Ac.Ms301 f°35.

Publications

Académie des Inscriptions, Mém. Acad. Inscriptions : « Dissertation historique et critique de ce que les anciens ont cru de l’aimant », 4, 1723. – « Dissertation sur les Bactyles », 6, 1729. – « Observations sur nos premiers traducteurs français, avec un essai de bibliothèque française », 7, 1733. – « Dissertation sur les Assassins, peuple d’Asie », 17, 1751. – « Dissertation sur Jacques de Dondis, auteur d’une horloge singulière », 20, 1753. – « Dissertation sur les principes de l’étymologie relativement à la langue française », Ibidem, 1753. – « Remarques sur la signification du mot Dunum », Ibidem, 1753. – « Dissertation sur la pierre de la mère des Dieux considérée sous le point de vue d’histoire naturelle », 23, 1756. –

Si l’homme tire son origine d’un ver, thèse ; traduction du latin par Andry, 1705. – Traduction en latin de l’Explication du mouvement des planètes, par Villemot* [Philippe Villemot 1651-1713, astronome, curé de la Guillotière], 1707. – Amours pastorales de Daphnis et Chloé, traduit du grec de Longus, par Amyot, avec les notes d’Antoine Lancelot, publié par Camille Falconnet, Paris : Coustelier, 1731. – Cymbalum mundi, ou dialogues satyriques sur différents sujets, par Bonaventure des Périers, avec une lettre critique par Prosper Marchand ; nouvelle édition revue, corrigée et augmentée de notes et de remarques communiquées par plusieurs savants (Camille Falconnet et Ant. Lancelot), Amsterdam : Prosper Marchand, 1732.

Il a rédigé la longue préface éclairante du livre de Fontenelle, Théorie des tourbillons cartésiens avec des Réflexions sur l’attraction, Paris : Hippolyte-Louis Guérin, 1752. La préface est p. III-XXXI. Dans l’ouvrage, la préface est dite celle de l’éditeur, mais dans le Catalogue de la Bibliothèque de feu M. Falconet, médecin consultant du roi et doyen des médecins de la faculté de Paris, de l’Académie royale des Inscriptions et Belles-Lettres, p. XIX, on trouve le renseignement suivant : « M. Falconet fit la préface qu’on lit à la tête de la Théorie des Tourbillons Cartésiens, par M. de Fontenelle ».

On lui a reproché de ne pas avoir écrit sur les lettres qu’il possédait de Guy Patin, doyen de la faculté de médecine de Paris, à André Falconnet ; Noël Falconnet avait été le pensionnaire de Patin, qui entretenait André des études de son fils.