Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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La recherche est faite par sous chaîne, insensible à la casse et aux accents.

RAYMOND Jean-Michel (1766-1837)

par Georges Boulon.

 Jean-Michel Raymond est né à Saint-Vallier (Drôme) le 24 mars 1766, fils de Jean Baptiste Aimard Raymond, avocat et châtelain de Saint-Vallier, premier échevin de Saint-Vallier et lieutenant de juge à la Révolution, et de Claire Desfrançais. Parrain : Jean Faure, marchand ; marraine : Anne Misery. Appartenant à une famille religieuse, il se destine au sacerdoce et vient à Lyon au Grand-Séminaire. Il abandonne cette voie pour embrasser celle de la médecine, qu’il étudie à Montpellier où il devient docteur et se rend à Paris pour se perfectionner, selon les désirs de son père. Entraîné par son goût pour la chimie, il devient un aide de Fourcroy, de Vauquelin et de Bertholet. Revenu à Saint-Vallier, il y crée une blanchisserie de toiles avec de nouveaux procédés, qui n’aboutiront que partiellement : s’il pouvait blanchir les fils de chanvre au moyen du chlore, selon le procédé Berthollet, il n’arrivera pas à l’appliquer au blanchiment des toiles. Le gouvernement l’envoie dans le Midi, en qualité d’inspecteur général, pour surveiller la fabrication des poudres et des salpêtres, mais il refuse à son retour une place de commissaire des poudres offerte par le comité de Salut Public, pour poursuivre ses vains travaux sur le blanchiment des toiles. En janvier 1795, il étudie la chimie à l’École normale supérieure, créée le 30 octobre 1794, dont il est un des premiers élèves. Cet établissement étant fermé, Fourcroy le fait nommer préparateur et répétiteur de chimie à l’École polytechnique. Il fait paraître dans le Journal des Mines un article sur la nature et les propriétés de l’acide nitreux, et dans les Annales de Chimie « un procédé nouveau pour se procurer promptement et à peu de frais une plus grande quantité de gaz hydrogène phosphoré », qui attirent l’attention sur lui. En 1802 il est nommé à Tournon à l’École centrale de l’Ardèche et en novembre-décembre 1803 il est amené à occuper la chaire de chimie de la ville de Lyon, nouvellement créée. À cette époque, le travail de la soie particulièrement développé à Lyon était une priorité impériale. La teinture était « un art utile ». Depuis 1603, les teinturiers lyonnais ont su devenir une référence dans ce domaine. On a multiplié les concours pour découvrir de nouvelles teintes en particulier de l’indigo toujours associé à la jeunesse et la vie. En 1800 un programme de prix est lancé par la Société d’encouragement pour l’industrie nationale « pour éveiller l’industrie nationale sur la fabrication du bleu de Prusse dont les arts font un usage très étendu et se dispenser de payer à l’industrie étrangère un tribut pour sa fabrication ». Il fallait stimuler le zèle des teinturiers de Lyon en les amenant à décreuser la soie sans altérer ni sa qualité ni son lustre. Jean-Michel Raymond invente les boules de bleu en 1809 et réussit à « fixer une couleur bleue extrêmement riche et foncée, parfaitement insoluble dans l’eau et tellement adhérente à la soie que ni l’eau ni le frottement n’ont plus du tout le pouvoir de l’en séparer ». À la suite du concours lancé par Napoléon le 3 juillet 1810 pour teindre la soie et la laine avec le bleu de Prusse, substitut de l’indigo, Jean-Michel Raymond reçoit à titre d’encouragement le 2 juillet 1811 la somme de 8 000 francs. Le procédé de teinture sera alors répandu dans toutes les teintureries en soie de l’Empire. Le produit, du prussiate de fer, est baptisé tantôt bleu Marie-Louise en hommage à l’impératrice, tantôt bleu Raymond. L’Académie de Lyon déclare « que la mode s’empara avec orgueil de cette belle couleur qui, sous le nom de bleu Raymond, présentait une nuance si distincte et si flatteuse entre bleu céleste et bleu royal ». En 1815, Jean Michel Raymond fonde à Saint-Vallier, dans son château des Rioux, une manufacture de produits chimiques et abandonne sa chaire en 1818 pour la diriger. Il réussit à appliquer le bleu à la laine et au coton. En 1819, en raison du succès de ses produits à l’Exposition parisienne des produits facturés de cette année-là, il obtient une médaille d’or de la Société d’encouragement pour l’industrie nationale ainsi que la Légion d’honneur (LH/3374/50). Il cède sa manufacture à son gendre et à son fils, qui perfectionnent des procédés, notamment la fabrication avec les frères Revol d’ustensiles de cuisines et de chimie hygiéniques avec le sable kaolino-feldspathique de Saint-Barthélemy-de-Vals.

 Il décède à Saint-Vallier le 6 mai 1837. Une rue de la Croix-Rousse porte son nom.

 Il avait épousé le 15 août 1793 Marie Madeleine Goubertier (30 novembre 1768-20 mars 1840). D’où : Adeline Madeleine Claire (Saint-Vallier 27 septembre 1798-5 décembre 1880, épouse de Louis Hector Blanchet) et Pierre.


Académie

Membre de l’Académie le 11 juillet 1809 (sciences), il devient correspondant en 1818. Son discours de réception, en 1809, porte sur La diversité des systèmes de chimie.

Bibliographie

Dumas. – Hénon, « Raymond », suivi de l’article nécrologique de N. Delacroix, Rev. du Dauphiné, juin 1837, et Courrier de la Drôme et de l’Ardèche, RLY, 4 juillet 1837, p. 391-400. – Justin Brun-Durand, Dict. biogr. de la Drôme, 1900. – Charles Weiss, Biographie universelle, 1838. – BML, Une Fabrique de l’innovation : la saga des colorants au 19e siècle, exposition du 5 novembre 2013-1er mars 2014. – Chantal-Marie Agnès, « Soie et Chimie, le creuset de Jean-Michel Raymond : Lyon entre bleu céleste et bleu royal », Bull. municipal, n° 5669, 11 décembre 2006.

Manuscrits

Ac.Ms123bis f°222, Béraud : Rapport sur « Essai sur l’émulation » de M. Raymond, 10 vent an XI. – Ac.Ms219 f°249, Notice sur la décomposition du fromage de Gruyère par les rayons du soleil, 27 novembre 1810. – Ac.Ms219 f°251, Procédé pour faire produire aux aluns de fabrique de médiocre qualité des effets avantageux, 2 juillet 1811. – Ac.Ms219 f°255, Rapport sur une instruction concernant la culture et la préparation du pastel, 2 juin 1812. – Ac.Ms219 f°261, Considérations sur la solidité des teintures. – Ac.Ms219 f°270, Rapport sur l’ouvrage de M. Poutet, concernant le sucre de raisin, 18 décembre 1810. – Ac.Ms219 f°273, Considérations sur le reproche du défaut de solidité des teintures. – Ac.Ms219 f°279, Notice sur une nouvelle propriété du chlore, 28 avril 1818. – Ac.Ms219 f°282, Rapport sur la falsification des esprits de vin pour la perception de l’octroi. – Ac.Ms219 f°288, Notice sur l’emploi du nitrate de fer.

Publications

Examen critique de l’ouvrage de M. Tissier : Essai sur la théorie des trois éléments comparés aux éléments de la chimie pneumatique, Lyon : Impr. J.M. Barret, 1805. – Observations sur le rapport fait par M. Bardel [...] relativement au procédé de décreusage de la Soie propospar M. Roard, directeur des teintures des Gobelins, présentées àla Société des Amis du Commerce et des Arts dans sa séance du 1er décembre 1809, Lyon : impr. Ballanche, 1909. – Essai sur le jeu considéré sous le rapport de la morale et du droit naturel, Lyon : Ané, et Paris : Pesron, 1835 [attribution discutée par Quérard, dans son Dictionnaire]. – Souvenirs d’un oisif, Lyon : impr. Barret. 1836.