Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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LAURENCIN Jean Espérance Blandine de (1740-1812)

par Michel Le Guern.

 (Dans divers actes il est nommé « Jean-Baptiste de Laurencin »). Le comte Jean Espérance Blandine de Laurencin est né et a été baptisé le 18 janvier 1740 à Chabeuil (Drôme). L’acte de baptême signale que son père, Hugues de Laurencin de Chanzé, seigneur de Machy (Chasselay) et Surry-le-Bois (Loire), est chevalier de l’ordre militaire de Saint-Louis et capitaine des grenadiers au régiment de Châlon infanterie (en 1764, il sera brigadier des armées du roi) ; sa mère est Marie Anne de Patin ; les parrain et marraine sont les grands-parents maternels, Jean de Patin, premier capitaine châtelain de la province du Dauphiné, et sa femme Magdeleine du Molard.

 À 7 ans, il était déjà pourvu d’une lieutenance ; il est capitaine à l’âge de 16 ans. À la bataille de Minden, le 1er août 1759, piétiné par des chevaux dans une charge de cavalerie, il est grièvement blessé. Sa bravoure lui vaut la croix de chevalier de Saint-Louis, mais sa blessure met fin à sa carrière militaire, même si, en 1764, il est encore capitaine dans le régiment de Vexin.

 Le 17 janvier 1764, dans l’église Saint-Pierre de Lachassagne, en Beaujolais, il épouse Marie Anne Julienne d’Assier de La Chassagne (Saint-Hippolyte, Alsace, 15 mai 1741-Lyon l4 décembre 1818 ; son acte de décès indique « native de Strasbourg ») ; elle-même est une poétesse publiée dans l’Almanach des Muses, fille de François Aimé d’Assier, baron de La Chassagne (1702-1783), lui aussi brigadier des armées du roi, et de Louise Julienne du Puget. L’acte de mariage énumère ses titres : « chevalier seigneur de Sury-le-Bois, Saint-Cyr, Vareille [Valeille en Forez], et du fief de Machi ; capitaine dans le régiment de Vexin, chevalier de l’ordre royal et militaire de Saint-Louis ». Le 25 octobre 1764, à Lachassagne, naissance du fils aîné, François Aimé*; le 8 octobre 1767, naissance de Catherine Sophie, qui mourra le 3 septembre 1768, peut-être des suites de l’inoculation. En 1769, Laurencin quitte Lachassagne pour habiter au château de Machy, dans la paroisse de Chasselay. C’est là que naissent quatre enfants : Antoine, 30 août 1769 ; Hugues, 28 mars 1772 ; Marie Marguerite Azélie, 21 juin 1777 ; et Aymardine Louise Aglaé, qui préférera se faire appeler Éliza, 9 janvier 1783.

 Vers 1770, Laurencin préside le syndicat du canal de Givors. Le roi de Suède Gustave III lui propose de devenir le gouverneur de son fils, mais il refuse.

 En 1773-1774, il collabore à la Feuille littéraire de Lyon, et fait valoir ses compétences grammaticales. En 1782, Urbain Domergue, dans la Grammaire française simplifiée, ou traité d’orthographe (2e éd., p. 11), remercie le comte de Laurencin et Pierre Morel*, auxquels il doit « infiniment ». Le 22 avril 1782, le comte de Laurencin prend la direction de la Compagnie Perrache. Les destructions provoquées par la crue de janvier 1783 ayant ruiné l’entreprise, il cède au roi les terrains où se construit la voie du Languedoc d’Ainay à La Mulatière (23 septembre 1784). Le 19 janvier 1784, Laurencin est un des passagers de l’aérostat Le Flesselles, qui s’envole des Brotteaux, avec J. de Montgolfier, Pilâtre de Rozier, le prince Charles de Ligne, le comte de la Porte d’Anglefort, le comte de Dampierre et Fontaine. L’atterrissage un peu rude dans les marécages des Charpennes n’empêche pas les intrépides voyageurs, malgré leurs contusions, d’être reçus le lendemain à l’Académie. Une autre ascension a lieu le 4 juin 1784, organisée et financée par Laurencin, qui n’est cependant pas du voyage.

 Au cours de la Révolution, Laurencin évite les troubles de Lyon en allant se réfugier dans son château de Lachassagne. On dit que sa fille Azélie sauva sa tête en déclarant à la Convention qu’il avait permis aux armées de la Convention d’entrer à Lyon, en enlevant les mines qui avaient été placées sous le pont qu’il avait fait construire. Il modifie sa date de naissance –, peut-être pour éviter la guillotine – et se déclare né en 1733, date qui figure encore sur sa demande du grade d’officier de la légion d’honneur, le 11 avril 1810. En 1792, le château de Machy est vendu à Antoine Morand de Jouffrey, le fils de l’architecte et urbaniste Jean Antoine Morand. Ses fils émigrent ; ils sont mis sur la liste des émigrés en mai 1793.

 Le 21 germinal an II [10 avril 1794], il est nommé « commissaire distributeur des secours dus aux parents des défenseurs de la patrie ». Le 21 floréal an VI [10 mai 1798], alors qu’il habite à Lyon, place Grôlier (act. place Gailleton), il assiste au mariage de sa fille Marie Marguerite Azélie avec François Frédéric Plan-Veines, propriétaire à Valence, qui retrouvera son nom complet, Frédéric Du Plan de Veynes, marquis de Siéyès, et sera contre-amiral vers 1810 et président du conseil général de la Drôme de 1811 à 1830. Le 18 prairial an VIII [7 juin 1800], Laurencin est nommé membre du conseil de l’arrondissement de Lyon, et président dudit conseil ; puis, le 9 messidor an IX [28 juin 1801], membre du conseil général du département du Rhône, et président dudit conseil. Le 24 floréal an XI [14 mai 1803], il est un des administrateurs de la bibliothèque de Lyon. Le 19 fructidor an XII [6 septembre 1804], Auguste Gabriel Stanislas de Joannis, né à Carpentras le 27 août 1765, ancien lieutenant de vaisseau, épouse Aymardine Louise Aglaé de Laurencin, qui signe « Éliza ».

 Le 22 germinal an XIII [12 avril 1805], lors de la visite de Napoléon à l’Académie, Laurencin lui parle en faveur des remblais de l’île Perrache. En 1806, il habite encore rue Grôlier et il est directeur général des travaux du midi de Lyon. Président du conseil général du Rhône de 1805 à 1810, il est nommé le 7 septembre 1808 à la commission chargée de l’examen du projet de code rural. Cette même année, il est préposé à la révision des comptes des hôpitaux de Lyon, Saint-Symphorien et Condrieu. Le 23 octobre 1808, Laurencin assiste au banquet célébrant le premier anniversaire de l’Académie grammaticale fondée à Paris par Urbain Domergue.

 Il meurt le 21 janvier 1812 à Lyon. L’acte de décès indique : « âgé de 78 ans [il n’avait en fait que 72 ans], natif de Chabeuil, département de la Drôme, ancien militaire, membre du conseil général du département du Rhône, de l’Académie de Lyon, correspondant de l’Institut, demeurant à Lyon rue du Peyrat [act. rue Antoine-de-Saint-Exupéry] n° 69 ». Il est inhumé au cimetière de Loyasse ; sur sa tombe, surmontée d’une pyramide, est indiquée sa véritable date de naissance, 1740, (Hours, Loyasse, p. 396).


Académie

Associé à l’Académie de Lyon le 24 novembre 1772 ; il habite alors à Machy (dans l’actuelle commune de Chasselay), et il sera membre des académies de Villefranche et de Rouen (1773). Il lit à la séance publique du 2 mai 1775 « une Épître en vers de Mad.e son épouse et à une amie, sur l’obligation que la nature impose aux meres d’allaiter leurs enfants ». Il est élu membre titulaire de l’Académie de Lyon le 30 novembre 1784. Le 5 décembre 1786, il lit à l’Académie le 4e acte d’une tragédie intitulée : Cyaxare, roi des Mèdes (Journal d’Histoire naturelle, 10 mars 1787, p. 274). D’après Dumas, qui ne précise pas la date, il a fait don à l’Académie de vases antiques contenant des cheveux et des fragments d’os. Il est président de l’Académie en 1801, émérite en 1809. La même année, Aimé Martin* lit des vers de Laurencin à l’urne qui renferme le cœur de sa fille (Azélie), cités par Bérenger* (Compte rendu des travaux de l’Académie de Lyon pour l’année 1809 (Lyon, Leroy, 1809, p. 40-41).

À l’Institut de France, il est associé non résidant de la classe de littérature et beaux-arts, 1796-1803, correspondant de la classe d’histoire et de littérature ancienne 1803-1812.

Bibliographie

A. F. Delandine, Couronnes académiques, Paris : Cuchet, 1787. – L. F. Grognier, CR des travaux de la Société d’agriculture […] Lyon, Lyon : Pelzin, 1812, p. 83-87. – Amable Charles Franqueville, Le Premier Siècle de l’Institut de France, Rothschild, 1896, t. 2, n° 4. – S. Ben Messaoud, « Les aéronautes ou les premiers pas de l’homme dans l’espace. Un pionnier : Jean-Baptiste de Laurencin (1740-1812) », BMO Lyon, n° 5732, lundi 3 mars 2008. – H. Blémont, DBF.

Iconographie

Son portait par son confrère Pierre Gogell* (huile sur toile) se trouve à l’Académie ; le peintre et son modèle sont morts le même jour le 21 janvier 1812. Les Archives municipales de Lyon conservent un buste de Laurencin par Joseph Chinard.

Manuscrits

La Mort du juste, idylle qui a remporté le prix à Rouen, 1771, Ac.Ms126 f°133. – Lettre à mon ami sur la perte d’un fils unique, mort à l’âge de dix ans des suites de la petite vérole inoculée, 1772, B.M. de Versailles, MS 11 P, p. 10. – Apologie du mariage, Épître à un ami, décembre 1772, Ac.Ms127 f°196. – Échec et mat, Épître à Mme… qui reprochait à l’auteur d’avoir un jeu de corsaire, 1785, Ac.Ms125 bis f°6 et Ac.Ms126 f°106. – Rapport fait à l’Académie sur quelques fragments de la Jérusalem délivrée traduits par l’abbé Castan, décembre 1785, Ac.Ms126 f°55. – Théorie sommaire du régime le plus convenable à l’homme physique, 18 août 1787, Ac.Ms229 f°175. – Discours (démission de la présidence de l’Académie), 3 thermidor an VIII [22 juillet 1800], Ac.Ms123 bis f°143. – Épître à Mlle Victoire Lallié le jour qu’elle fut reçue à la ci-devant académie de Lyon, 3 frimaire an IX [24 novembre 1800], Ac.Ms125 f°7, 3 p. et Ac.Ms127 f°198. – Rapport sur la pièce de vers précédente : Épître sur l’âme des bêtes du comte de La Rue, 13 floréal an IX [3 mai 1801], Ac.Ms125 bis f°59. – Réponse à Mme de Beauharnais, 13 brumaire an X (4 novembre 1801), Ac.Ms 125 f°15. – Discours à M. Najac au commencement de sa présidence, 13 frimaire an X [3 décembre 1801], Ac.Ms123 bis f°145. – Épître à mon neveu sur l’art de faire des vers, 15 thermidor an X (3 août 1802), Ac.Ms125 f°9, 12 p. – BML Coste 906 : Lyon, 22 septembre 1790 (Lettre de M. Laurencin à MM. les officiers municipaux de la ville de Lyon, au sujet des arbres de la chaussée Perrache). – BML Coste 1127 : Cinq lettres autographes signées. Orléans, 17 août 1787 (Lettre d’amitié adressée au vicomte de Montmorency. Il lui parle de son séjour à Châteaudun, où l’on s’ennuie à s’avaler la langue) ; Lyon, 4 mai 1790 (Lettre à M. le ministre de l’intérieur, pour lui exposer : 1° la situation déplorable qui lui est faite par le Comité de liquidation, qui a décidé que sa dette ne serait pas comprise dans les créances arriérées de l’État ; 2° les malheurs arrivés aux différents membres de sa famille. Éloge du ministre, de ses actes et de ses écrits) ; Commune-Affranchie, 4 vendémiaire an III [25 septembre 1794] (Pétition au Comité révolutionnaire du canton de l’Égalité, au sujet de ses fils, mis sur la liste des émigrés au mois de mai 1793) ; 4 septembre 1802 (Lettre à M. Dumas pour lui rappeler qu’on lui avait promis la destitution de Pierre Fayé, qui vient encore de se rendre coupable d’une coquinerie) ; et Chanzé, 13 juillet 1803 (Lettre à un de ses collègues, en lui envoyant la liste des membres du Conseil municipal de sa commune).

Publications

La Mort du juste, idylle (1771) – Palémon, ou le triomphe de la vertu sur l’amour, autre idylle (1775) – Stances sur La Vie champêtre (1775), Recueil de l’académie de l’Immaculée Conception de Rouen pour les années 1774 à 1776, Rouen : Le Boullanger et Paris : Berton, 1776. – Lettre de M. le comte de Laurencin à M. L. B. D. L. [le baron de Lachassagne], en réponse à des critiques sur les Travaux-Perrache, 1783, 8 p. (BML Coste 113071). – Lettre de M. le comte de Laurencin à M. Joseph de Montgolfier, sur l’expérience aérostatique faite à Lyon le 4 juin 1784, en présence du roi de Suède. À Lyon le 6 juin 1784, 32 p. (BML 340629). – « Le ballon des Brotteaux de Lyon, ou Le Flesselles. Expérience du 19 janvier 1784 », dans le Supplément à L’Art de voyager dans les airs, contenant le précis historique de la grande expérience faite à Lyon le 19 janvier 1784, Paris, 1784 (BML 340629). – « Couplets chantés à M. et Mme… le jour qu’ils ont célébré la cinquantième année de leur mariage », Journal de la langue françoise, soit exacte, soit ornée, 15 mars 1785, p. 502-504. – Observations sur le passage du grade de capitaine à celui de lieutenant-colonel, d’après le nouveau mode d’avancement, Lyon : Vatar de La Roche, 1791, 14 p. – « Épître à Frédéric en lui envoyant le portrait de ma fille », 1799 (BML 353615) et Journal de Lyon, 1er ventôse an X [20 février 1802]. – « Épître aux mânes de ma mère », Journal de Lyon, 11 ventôse an X [2 mars 1802] et BML 361692. - Fables et poésies diverses par Don Juan Laurencin, Paris : Pougens, 1802, 119 p. – L’Almanach des Muses de Lyon et du département du Rhône, Lyon, Chambet, 1810, contient quatre pièces : Épître à mon neveu, Regrets, Plaintes, Aux mânes de ma mère.