Jean Marius [et non Marie comme porté sur l’acte de décès] Aubin Rousset est né le 1er mars 1899 à Meylieu-Montrond (act. Montrond-les-Bains, Loire). Il est le fils d’Adrienne Catherine Pommier (Cuzieu [Loire] 9 octobre 1873-Lyon 11 mars 1971) et de Joseph Christin Rousset (Meylieu-Montrond 17 juillet 1871-30 août 1903). Témoins : Barthélemy Chavot, 35 ans, épicier, et Félix Siveton, 37 ans, instituteur primaire public. Ses grands-parents maternels sont André Pommier et Marie Doyat, de Cuzieu. Jean Rousset et Claudine Chavot, ses grands-parents paternels – anciens agriculteurs de Cuzieu, berceau de la famille – tenaient l’hôtel-restaurant de la gare à Montrond ; mais son père, maître d’hôtel, décèdera prématurément à 32 ans, alors que Jean n’a que 4 ans. En 1906, après le décès du grand-père, sa mère vend l’hôtel et vient s’installer à Lyon, où elle achète l’année suivante une petite mercerie au 278 avenue de Saxe (qui deviendra le 14 avenue Jean-Jaurès en 1916).
Jean est élève des Lazaristes montée Saint-Barthélemy, puis du lycée Ampère. Il obtient son baccalauréat, sciences, langues vivantes, philosophie et s’inscrit à la faculté des sciences ; il réussit la propédeutique SPCN le 28 juin 1918. Mais il a été appelé sous les drapeaux le 15 avril et affecté au 47e régiment d’artillerie à Besançon, qui ne sera pas envoyé au front. En mai 1919, il est affecté comme professeur de sciences naturelles à Saint-Maixent, puis il est muté à Mannheim en Rhénanie, avant d’être libéré le 30 octobre 1919. Il s’inscrit alors en 1re année de médecine à Lyon, travaille l’anatomie avec le Pr Hovelacque de Paris et publie avec lui en juin 1922. Le 23 octobre 1922, Jean Rousset est reçu 20e au concours de l’externat à Lyon ; il suit les services de Gayet à l’Antiquaille, puis Vignard en chirurgie à la Charité, puis Bonnamour (tuberculeux) à la Croix-Rousse, Barjon-Palasse (médecine) à la Croix-Rousse, Favre (médecine) à l’Hôtel-Dieu et Trillat* (obstétrique) à la Croix-Rousse. Il réussit le concours de l’internat le 13 septembre 1926 (en 5e position sur une promotion de 22). Dès la fin de cette année, il devient bibliothécaire de l’internat ; il publie dans la revue de l’internat, le Crocodile. Il sera interne de Trillat (obstétrique) à la Croix-Rousse, Paul Courmont* (tuberculeux) à l’Hôtel-Dieu, Chalier (contagieux) à la Croix-Rousse, Gaté* (dermatologie) à l’Antiquaille, Beriel (neurologie) à l’Antiquaille, Favre (médecine) à l’Hôtel-Dieu, puis Nicolas (dermatologie) à l’Antiquaille. Ce dernier influencera son choix de la dermatologie. Jean Rousset termine ses études médicales par la soutenance à Lyon d’une thèse de doctorat le 25 février 1931 (présidée par Joseph Nicolas) intitulée : Les dyskératinisations épithéliomateuses, énorme travail qui lui vaut la mention « Très bien avec éloge et échange ».
Il s’installe en clientèle privée, 10 rue de la Barre, puis 7 place Antonin-Poncet. Membre de la société française de dermatologie et de la société française d’histoire de la médecine en 1931, il assure aussi les fonctions de chef de clinique dermatologique chez le Pr Joseph Nicolas – titulaire du 1er octobre 1935 au 30 septembre 1937 –, succédant à Charles Pétouraud*. Nommé ensuite « préparateur de cours à la clinique dermatologique », il occupe cette fonction jusqu’en septembre 1956. Il est aussi médecin dermatologiste du dispensaire général (1931-1950), du dispensaire de prophylaxie vénérienne, dès 1931, du service sanitaire (1938-1946 ; fermeture des maisons closes).
Le 23 septembre 1939, Rousset est mobilisé à Fréjus, puis affecté comme médecin capitaine dans les troupes coloniales (Afrique occidentale française) où il entre en contact avec des agents de l’Intelligence Service. Démobilisé le 23 septembre 1940, il revient à Lyon (alors en zone libre) où il reprend ses activités médicales ; il entre dans le réseau Mary, dirigé par une américaine Virginia Hall (1906-1982) surnommée Mary, dont il sera le second en France) ; et il commence une activité clandestine (implantation du S.O.E. [Special Operations Executive] britannique) en zone sud, délivrance de faux-papiers, accueil d’opérateurs radio...). Trop bavard, il est arrêté le 13 novembre 1942 par la Gestapo, qui l’interroge et le torture à la prison Montluc sans réussir à le faire parler. Il reste un an à Fresnes avant d’être envoyé en Allemagne dans plusieurs prisons, puis Neue Bremm (camp de torture de la Gestapo à Saarbrücken), puis Buchenwald le 13 novembre 1943. Il en repartira le 25 avril 1945 très affaibli, amaigri, œdématié avec un début d’artérite due au typhus, des ulcères aux jambes, du scorbut, une polynévrite qui lui laisseront des séquelles. Il publie ses souvenirs sous le titre Chez les Barbares, en livraisons dans les Albums du Crocodile, puis en un recueil en 1948. Jean‑Paul Garin (1922-2014, fils de Charles Garin*) raconte dans son ouvrage La vie dure (1946) sa rencontre inoubliable avec Jean Rousset au camp de Buchenwald. Ce dernier en écrira la préface.
Dès 1946, Rousset reprend son activité libérale. En avril 1947, il est appelé à témoigner à Nuremberg au procès de l’état-major du camp de Buchenwald. Il est médecin de la léproserie de la Propagation de la Foi à Caluire (1948-1972), professeur à l’école Dentaire (1950-1964), médecin de l’hôpital du Calvaire (femmes incurables) à partir de 1951, médecin dermato-vénéréologue des prisons dès 1952. De 1949 à 1952, il est président de la société historique, archéologique et littéraire de Lyon.
De 1956 à 1961, Rousset assure l’intérim du poste de chef de service de dermatologie à l’Antiquaille (sous la responsabilité administrative de Jules Traeger*), après le départ de Jean Gaté* pour l’hôpital Édouard Herriot. Il devient président de la commission de réforme des déportés politiques en 1958 ; néanmoins il ne décidera de se présenter lui-même devant une commission de réforme qu’en 1968, alors très handicapé ! Le 1er octobre 1959, il est promu médecin lieutenant-colonel de réserve des troupes de marine (ex-corps colonial). Chevalier de la Légion d’honneur en 1954, il est promu officier en 1968 au titre de déporté-résistant.
Sa santé va pourtant se dégrader avec l’apparition d’une maladie de Parkinson. Rousset est resté célibataire pour s’occuper de sa mère toujours à ses côtés. Cette dernière décède le 11 mars 1971, à l’âge de 98 ans. Jean Rousset, très affecté, s’éteindra l’année suivante, le 23 décembre 1972, dans son appartement lyonnais. Il est enterré dans sa Loire natale, à Montrond-les-Bains.
Homme assez fort avec une petite moustache sous le nez, bien habillé, exubérant, volubile et bavard, excellent conteur avec beaucoup d’humour, très raffiné, méticuleux, collectionneur (Dr Pellerat). Il était surnommé « le colonel » depuis l’internat ,en raison d’une homonymie avec le lieutenant-colonel Rousset, chroniqueur militaire très connu à l’époque, d’autant que lui-aussi commentait souvent en salle de garde les journaux, les éditoriaux, les problèmes militaires.
À son retour de déportation, son humour et sa verve, associés à sa grande érudition, ne pouvaient que le conduire vers l’académie du Gourguillon et des Pierres Plantées, où il est intronisé le 6 juin 1945 sous le nom de Polycarpe Larogne.
En 1961, devant l’Académie, Jean Tricou* propose la candidature de Jean Rousset dans un rapport manuscrit. Le 5 décembre 1961, il succède à Claude Dalbanne* au fauteuil 2, section 2 Lettres. Son discours de réception est prononcé le 14 mai 1963 : Un chirurgien jacobin : l’infernal Achard (discours absent des mémoires de l’Académie, mais publié dans deux volumes des Albums du Crocodile, 1964). – L’art dentaire à Lyon aux xviie et xviiie siècles (27 mars 1962), MEM 27, 1971, R. – Le choléra à Lyon au xixe siècle (4 février 1964), Ibidem, R. – Le paludisme dans la région lyonnaise (22 juin 1965), Ibidem, R.
Fabienne Mégard, Docteur Jean Rousset (1899-1972), sa vie, son œuvre, thèse de médecine (président J. Coudert), Lyon : ACEML, 1976, 66 p. – A. Latreille*, « Nécrologie Jean Rousset », Hist. des sciences médicales 8, 1974, p. 390. – J.-P. Garin, « Jean Rousset chez les barbares », Lyon Médical, 1973, 229, 6, p. 617-620. – Ch. Pétouraud*, « Jean Rousset 1898 [sic]-1972 », Lyon Médical 229, 1973,10, p. 1031-1033. – Cl. Mondesert*, « Le docteur Jean Rousset » (discours à l’Académie du 12 mars 1974), MEM 1977, et Lyon Médical, 1974, 231, 8, p. 749-758. – Jean-Paul Garin, La vie dure, préface du Dr Jean Rousset, Lyon : Audin, 1946, 188 p. – B. Permezel*, Résistants à Lyon, Villeurbanne et aux alentours, Lyon : éd. BGA Permezel, 2003.
Voir une liste (non exhaustive) de 152 publications médicales 1922-1965 in Mégard 1976 : il s’agit essentiellement d’articles concernant la dermato-vénéréologie. Dans son dossier académique manuscrit, Rousset parle de 535 publications scientifiques ! Citons : Les dyskératinisations épithéliomateuses (thèse de médecine, Lyon, n° 132), Paris : Masson, 1931, 600 p. – Avec Charles Garin* et B. Gonthier L’Ankylostomose, Paris : Masson, 1932, 127 p. – Avec J. Lacassagne et R. Carmer, Le Tatouage thérapeutique, Lyon : J. Desvignes et fils, 1929, 61 p. – Une centaine d’articles d’ordre historique (cf. Mégard 1976) a été publiée dans les revues Le Crocodile, les Albums du Crocodile (Rousset en sera le rédacteur en chef pendant plus de 25 ans), les Cahiers de Marottes et Violons d’Ingres (rédacteur en chef de 1949 à sa mort), les Cahiers lyonnais d’histoire de la médecine, Le fureteur médical ; parmi eux citons Les ex-libris médicaux (Albums du Crocodile, 4 fascicules, 1935-1941, portrait photo de Rousset et une douzaine de ses propres ex-libris). – Chez les Barbares, Lyon, éd. de la Guillotière, 1946-1948 (quatre albums du Crocodile puis un volume, Lyon : impr. réunies, [1948], 116 p.). – Les thèses médicales soutenues à Lyon aux xviie et xviiie siècles et le Collège royal de chirurgie de 1774 à 1792, Lyon : éd. de la Guillotière, 1949-1950 (cinq albums du Crocodile puis un volume, Lyon : impr. réunies, 1950, 142 p.). – Lyon et la médecine, n° spécial de la Rev. lyonnaise de médecine, 1958 : trois articles dont deux en collaboration. – Les hospices civils de Lyon (542-1952). Lyon : M. Audin, 1953, 325 p. (en collaboration avec Varille, Colly, Rodery, Rizard). – Recueil de documents graphiques concernant l’histoire de la médecine à Lyon, Trévoux : impr. J. Patissier, 1959 (extrait des Cahiers lyonnais d’histoire de la médecine, n° 2, 1958, et n° 3, 1959), 88 p., 224 p. d’illustr.