Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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VILLENEUVE Édouard de (1839-1918)

par Nicole Dockès-Lallement.

 Édouard de Villeneuve est né aux environs de Lyon, en 1839, de parents inconnus. Son état civil est établi par un acte de notoriété du 30 mai 1856 délivré par la justice de paix du 1er arr., homologué le 2 août 1856 par le tribunal civil.

 Il fait ses études de droit à Paris et s’inscrit au barreau de Lyon dès 1859. Il est tout de suite apprécié et est chargé du discours de rentrée de la Conférence des avocats en 1861. Il se marie avec Augustine Philomène Truilhier, née à Toulon le 20 mai 1842, dans une famille de fonctionnaires des douanes ; elle est fille de Jean Baptiste François Auguste Marie Truilhier et de Jeanne Thérèse Payan. Le mariage est célébré à Toulon le 22 septembre 1862 ; les quatre témoins habitent Toulon et sont tous des proches de la mariée : Nicolas Hains, chevalier de la Légion d’honneur, directeur des douanes et des contributions indirectes, cousin de l’épouse ; Augustin Jean-Baptiste Joseph Hubert, cousin de l’épouse ; Jean Baptiste Nicolas Lécrivain, capitaine des douanes, chevalier de la Légion d’honneur ; Justin Thruilhier, artiste et frère de l’épouse. De ce mariage naissent cinq enfants. Le premier, Jean Baptiste Louis Marie (Lyon 2e 18 décembre 1863-20 octobre 1865) meurt en bas âge ; Paul, né le 1er septembre 1866 (Lyon 2e), devient magistrat à Monaco et se marie à Nice, le 16 novembre 1897, avec Cécile Guillabert (Nice, 24 avril 1867-11 avril 1949), fille de Georges Hubert, ancien médecin de la marine ; Eugène (Lyon 2e 15 avril 1870-Lyon 7e 12 juillet 1942), avocat, syndic de faillite, épouse à Lyon, le 21 octobre 1893 (Lyon 1er), Berthe Camus (Sainte-Foy-lès-Lyon 1er janvier 1872-Lyon 5e 18 février 1921), d’une famille de propriétaires et d’industriels, puis, après le décès de celle-ci, Yvonne de Clock, le 27 février 1924, à Falaise, (Calvados) ; Joseph (Lyon 2e 22 janvier 1876-Montélimar 13 décembre 1962), directeur d’assurances, épouse le 16 janvier 1904 (Lyon 2e), une savoyarde Madeleine Combe (Chambéry 23 juillet 1876-Lyon 2e 29 mars 1932), fille d’Adrien, inspecteur des forêts, et de Noémie Poncet ; enfin une fille, Marie-Louise, née le 27 mai 1881 à Lyon 2e. Marie-Louise se marie tardivement, le 29 avril 1914 (Lyon 2e), avec le fondateur du premier Cercle d’Action française, Henri Vaugeois, directeur du journal l’Action française ; parmi les témoins, à côté d’Eugène de Villeneuve, frère de la mariée, et de Paul Vaugeois, oncle du marié, le comte Eugène de Lur-Saluces, célèbre pour avoir été impliqué dans le complot de Déroulède, et la marquise de Mac-Mahon. Deux ans plus tard, en avril 1916, son mari meurt d’un accident cardiaque que Charles Maurras attribue à l’anxiété provoquée par les nouvelles qui arrivent du front (Action française, 12 avril 1916). Marie-Louise revient vivre chez son père qui est veuf (sa femme est décédée le 11 avril 1903, Lyon 2e). Après la mort de ce dernier, le 26 février 1920 à Paris (14e), elle épouse en secondes noces, Fernand Maignien de Mersuay, entourée de Madame Léon Daudet et de Charles Maurras.

 É. de Villeneuve acquiert très vite une certaine notoriété en plaidant dans des affaires criminelles devant le jury de l’Ain. La petite revue La Marionnette lui promet un bel avenir (n° 12, 11 août 1867). Lorsque, en 1867-1868, le barreau, avec l’appui d’Alphonse Gilardin*, décide de créer une Petite École de droit – école libre dirigée par Paul Rougier* –, Édouard de Villeneuve, comme Auguste Dubreuil, y assure des cours jusqu’à la création d’une faculté de droit en 1875. Il aime enseigner et assure aussi le cours de droit commercial à l’École de commerce pendant dix ans (1873-1883). Membre du conseil de l’ordre à partir de 1879, il est régulièrement réélu. En 1884, sa plaidoirie dans l’affaire du testament de la veuve d’Antoine Lacène, Louise Magnieunin, belle-sœur de Camille Jordan*, décédée à l’âge de 104 ans, qui avait reçu, dans son salon d’Écully, Madame de Staël et Chateaubriand, est d’une belle qualité littéraire, et est imprimée. Élu bâtonnier en 1894 et 1895, il succède à Auguste Dubreuil*. Pendant son bâtonnat, il prononce l’éloge de l’ancien bâtonnier Brac de La Perrière lors de ses funérailles (novembre 1894). Il encourage la création de l’Association des anciens secrétaires et lauréats de la Conférence des avocats dont il préside la première réunion (18 mai 1895).

 Sous la IIIe République, Villeneuve intervient aussi régulièrement pour défendre la religion catholique et les principes sociaux auxquels il est attaché. Certains de ses discours sont reproduits dans la Semaine religieuse du diocèse de Lyon. En 1879, il fait partie du groupe d’avocats qui défend les Frères des écoles chrétiennes. Mais c’est surtout à partir de son bâtonnat qu’on le voit intervenir. En 1894, lors de la réunion de l’Association des patrons catholiques, il prononce un discours pour encourager la diffusion de la religion dans le monde du travail : « Le travailleur qui n’est pas chrétien est farouche, irrité, dévoré de désirs inassouvis » (La Semaine religieuse, 30 novembre 1894, p. 365). Devant un auditoire nombreux qui remplit le cirque Rancy, lors de la fête en l’honneur de Jeanne d’Arc, il raconte l’histoire de celle-ci. En 1896, il souligne l’intérêt moral, hygiénique, économique et social du repos du dimanche devant la Ligue lyonnaise pour le repos du dimanche. En 1899, à l’Ascension, lors de la fête annuelle de la Société des hospitaliers-veilleurs, il présente les origines et l’histoire de cette institution qui est née à Lyon en 1764. En 1909, au cours de la fête des Cercles catholiques d’ouvriers, il revient sur sa conviction que la foi permet une bonne entente dans le monde du travail. À la messe des juristes, messe du Saint-Esprit à Saint-Jean, Villeneuve, en tant que doyen des avocats, prononce l’allocution destinée à l’archevêque. En 1913, il assiste à Lyon, en l’église Saint-François, à la messe de la Saint-Philippe en l’honneur de Philippe d’Orléans, soutenu par les monarchistes maurassiens comme le roi Philippe VIII, ainsi qu’au banquet qui suit organisé par l’Action française (Action française, 5 mai 1913).

 Villeneuve, parallèlement à son métier d’avocat et à ses engagements politiques et religieux, consacre ses loisirs à la littérature. Très jeune, il écrit un ouvrage sur les Martyrs de Lyon et Epagathus, patron des avocats lyonnais, qui se sacrifia pour assurer la défense des chrétiens, victimes des persécutions à l’époque de Marc-Aurèle (au xixe siècle, la réalité du martyre de ce saint patron des avocats lyonnais n’était pas mise en doute, comme elle l’est parfois actuellement) ; cet ouvrage connaît un réel succès et plusieurs rééditions. Paul Rougier, doyen des avocats, qui lui adresse le discours d’usage lors de son installation dans le bâtonnat, avec de grands éloges, rappelle cette œuvre édifiante. Ensuite, Villeneuve n’écrit plus d’œuvres personnelles, mais il continue à lire et fait paraître un certain nombre de notices ou de comptes rendus de lecture, avec de fort longues citations, souvent sur des œuvres dont il connaît l’auteur.

 E. de Villeneuve décède le 1er juillet 1918 à son domicile, 6 rue Sala, où sont nés tous ses enfants. La déclaration est faite par sa fille Marie-Louise et son fils Joseph. Le 5 juillet, après une célébration à la chapelle de la Charité, l’inhumation a lieu au cimetière de la Guillotière.


Académie

Sur un rapport d’Alexandre Poidebard* lu le 28 mai 1907, Villeneuve est élu le 4 juin suivant sur le fauteuil d’Henri Beaune*, fauteuil 6, section 1 Lettres. Ayant presque perdu la vue à la fin de sa vie, il assiste régulièrement aux séances mais n’intervient guère. Il ne semble pas avoir fait de discours de réception. François-Xavier Lesbre* prononce son éloge le 9 juillet 1918.

Bibliographie

F.-X. Lesbre, « Éloge d’Édouard de Villeneuve », Ac Rapports 1915-1918, p. 319-321, portrait.

Publications

Aperçu historique de la renaissance des études juridiques au seizième siècle, discours prononcé le 25 novembre 1861 à la rentrée de la Conférence, Lyon : Mougin-Rusand, 1861, 56 p. – Epagathus, ou les Martyrs de Lyon : scènes de la vie chrétienne au iie siècle, Paris-Tournai : Casterman, 1858, 219 p. ; 2e éd., 1870, 276 p., ill. A. Mathy ; rééd. 1877 ; 1900 ; éd. espagnole : Barcelona: Empresa Editorial A. Riudor y Cía., 1877. – L’auberge, spectacle en vingt journées, Lyon : Perrin, 1867, xviii-270 p. ; RLY 4 1867, p. 299-311 (sur Georg Temple, pseudonyme de l’un de ses amis lyonnais qui part ensuite comme conseiller à la cour de Montpellier). – « Grégoire et ses écrits », notice sur Jacques François Grégoire, helléniste, enseignant, traducteur de textes sacrés en collaboration avec François Zénon Collombet, RLY 9, 1870, p. 295-308. – Sur Henri Didon, L’homme selon la science et selon la foi (Paris : Didier, 1875, 321 p.), et L’esprit et la méthode. – Lettres de M. Guizot à sa famille et à ses amis, recueillies par Henriette de Witt, née Guizot, Paris : Hachette, 1884, 438 p. – Sur Edmond Rousse (ancien bâtonnier du barreau de Paris), Mirabeau, Paris : Hachette, 1891, RLY 12 1891, p. 258-267. – Sur Théophile Crépon, Pensées d’un chrétien sur la vie morale, Paris : Poussilègue, 1900, 336 p., Revue catholique des institutions et du droit, 1901, p. 163-174 ; 271-276. – Sur A. Vachez, La chartreuse de Sainte-Croix-en-Jarez, Lyon : Brun, 1904, 310 p., id., 1909, p. 323-350.