Jean François Louis La Saussaye (parfois appelé à tort par Quérard, qui a fait des émules, « Petit de La Saussaye ») est né à Blois, sur la levée des Groix, le 16 ventôse an IX [7 mars 1801]. Témoins : Charles Louis Léonard Vallon, officier de santé, Jean Fortin, concierge de la mairie. En marge de l’acte est porté : « Par jugement du 4 novembre 1814, transcrit […], le tribunal civil de Blois a ordonné la rectification de l’acte de naissance ci-contre en ce sens que le nom patronymique sera précédé de la particule de, et que par conséquent le dénommé audit acte s’appellera désormais Jean François Louis de la Saussaye. » Fils unique de François de Paule de La Saussaye (né le 31 août 1738), officier d’infanterie, ancien commandant des troupes françaises de Chandernagor, et d’Anne Louise de La Saussaye (née en 1767, et qui, semble-t-il, a épousé son oncle), descendant d’une vieille famille de l’Orléanais qui vouait depuis longtemps un culte particulier à saint François de Paule, à la famille duquel elle aurait été alliée. Il épouse à Blois, le 26 mai 1828 [avec une erreur sur sa date de naissance] Perrine Amélie Petit (Blois 29 avril 1803–Lyon 2e 6 janvier 1865), fille de François Nicolas Petit, receveur des contributions directes à Blois, et de Marie Madeleine Perrine Pareau. De cette union sont nés Olivier Nicolas Louis (Blois 2 mai 1832), dont descendance ; son jumeau Robert Auguste Dieudonné, décédé le 4 mars 1833 ; Jehan Amédée (Blois 14 août 1834), qui se fera appeler Jean François de Paule Amédée Renaud de La Saussaye, conseiller de préfecture de la Nièvre (5 janvier 1861), puis de la Drôme (4 février 1861), puis démissionnaire le 26 septembre 1863.
Orphelin de père dès la fin de sa scolarité au collège, Louis de La Saussaye est recueilli et adopté par son oncle Christophe de Réméon (1754-1832, époux en 1787 de Marie Marguerite de La Saussaye, 1769-1851, sœur d’Anne-Louise), seigneur de Thorigny, chevalier de Saint-Louis et de Saint-Lazare, dans son château de Troussay près de Cheverny. Après avoir servi dans les gardes du corps du roi, il renonce à suivre les traces de son père et devient percepteur des contributions de la ville de Blois après la cession de cette charge par son beau-père. Révoqué par le gouvernement de Louis-Philippe en 1830, il se consacre à la bibliothèque de Blois, dont il a été nommé bibliothécaire honoraire à titre gratuit en 1832 après avoir surveillé le transfert à la mairie de la bibliothèque de Mgr de Thémines, évêque de Blois. Il est à l’origine de la création, en 1832, de la Société des sciences et lettres de Blois, et publie de nombreux articles et ouvrages sur la région. Passionné par l’archéologie dès sa jeunesse, il commence une collection de vestiges gallo-romains (légués par ses héritiers en 1911, ils constituent une partie du fonds du musée archéologique et dépôt lapidaire du château de Blois). Il étudie les châteaux de la Loire qu’il dessine ou peint à l’aquarelle. Il est nommé membre non résidant des Comités historiques près le ministère de l’Instruction publique en 1832 (il en sera titulaire puis membre honoraire) et devient membre de la Société royale des Antiquaires de France en 1836 qu’il présidera en 1846.
Il se lie avec Étienne Jean-Baptiste Cartier, ancien caissier de la Monnaie de Paris, chargé de mettre en ordre ses collections, lui aussi révoqué après la Révolution de Juillet, qui poursuit sur la Touraine des recherches analogues à celles qu’il mène sur le Blésois. La Saussaye aide son ami à réaliser son projet de Journal numismatique en proposant, au cours du 3e Congrès scientifique de France à Douai (septembre 1835), une souscription accueillie favorablement. En février 1836, le premier fascicule de la Revue numismatique françoise est adressé aux 227 premiers souscripteurs. Les six fascicules de 1836 forment un volume de 475 pages et 11 planches, sur lequel, vis-à-vis de la page de titre, on trouve un dessin de La Saussaye représentant la Tour d’Argent, ancien atelier monétaire de Blois. La revue, dont le siège est à Blois, dirigée à l’origine par Cartier pour la numismatique nationale, et La Saussaye pour la numismatique antique, acquiert une renommée internationale. La Saussaye, nommé recteur de l’académie de Lyon, abandonne la direction de la Revue en 1856. Reprise plus tard par la Société française de Numismatique, elle continue aujourd’hui à paraître. La Saussaye est récompensé pour ses ouvrages sur Chambord (1837) et le château de Blois (1840) par deux prix de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, dont il devient membre correspondant en 1838, puis titulaire en 1845, après la publication de sa Numismatique de la Gaule narbonnaise qui devait être la première partie d’une description complète des monnaies des Gaules. Il constitua une remarquable collection de 1 183 monnaies celtiques, qu’il céda pour la somme de 18 000 francs en 1863 au musée des Beaux-arts de Lyon avant de veiller à son enrichissement. Grâce à lui, Lyon possède l’une des plus importantes collections de monnaies gauloises de France.
La Saussaye poursuit aussi une carrière politique. Conseiller municipal de Blois de 1852 à 1869, il est élu conseiller général du canton de Blois Ouest en 1842 ; il sera régulièrement réélu, sauf de 1848 à 1852. Nommé secrétaire du conseil général de Loir-et-Cher en 1852, il est élu à la vice-présidence en 1860 et à la présidence en 1869. Remarqué par l’administration impériale, il est nommé recteur de l’académie de Poitiers en 1854 puis, de 1856 à 1873, de l’académie de Lyon. Officier de l’Instruction publique, chevalier de la Légion d’honneur après son élection à l’Institut (décret du 24 avril 1845) puis officier, alors qu’il est recteur de l’académie de Poitiers (décret du 29 décembre 1855), il est promu commandeur par décret du 25 août 1869 (LH/2465/44).
Il meurt le 25 février 1878 [avec les prénoms de Jean François de Paule Louis] à Cheverny, au château de Troussay, reçu en donation en 1828, patiemment restauré, avec l’aide de son ami l’architecte Jules de La Morandière, en utilisant des éléments soigneusement répertoriés provenant de bâtiments en ruine.
Il était membre de la Société linnéenne de Lyon (1858, honoraire en 1864).
Peu après sa nomination à Lyon, La Saussaye participe à une séance (13 janvier 1857) de l’Académie au cours de laquelle il « offre un aperçu rapide des divers sujets traités dans les publications » dont il lui fait hommage (Numismatique de la Gaule narbonnaise, Histoire du château de Blois et la Revue de Numismatique de 1855). Il présente sa candidature le 3 mars. Après rapport de la commission littéraire de candidature, il est élu le 9 juin au fauteuil 4, section 1 Lettres, vacant après le passage à l’éméritat de Jean-Baptiste François de Montherot*. Les 12 et 19 janvier et le 1er juin 1858, il expose son étude biographique sur le comte de Lezay-Larmésia, ancien préfet du Rhône. Il lit son discours de réception le 8 juin, avant de le prononcer en séance publique du 29 juin 1858 : 1er chapitre d’une Histoire littéraire de Lyon (MEM L, 1858-59, p. 113-136) et RLY 17, 1858, p. 354-377. Il présente la 2e et la 3e partie lors des séances des 27 juillet 1858 (MEM L, 1858-1859, p. 238-259) et 27 juillet 1859 (MEM L, 1860-1861, p. 181-208). Le 23 novembre 1858, il analyse le 3e volume des Mémoires des Antiquaires de France. Le 12 avril 1859, il présente une biographie de Jules de Pétigny. Il est le rapporteur de la commission chargée d’étudier le projet d’ériger une statue au marquis de Jouffroy d’Abbans et de consacrer des bustes au Dr Viricelle* et au peintre Saint-Jean* (MEM S, 1868-1870, p. 86-93). Il passe à l’éméritat en 1875.
Louis de Magny, Armorial de la France, Paris : Aux archives de la noblesse, 1874, p. 44. – Jean Lafaurie, « La Revue numismatique a 150 ans », Rev. Numismatique, 1986, p. 7-50. – Maurice Vallas, La coutume de Blois, Paris : éd. Fernand Lanore, François Sorlot éditeur, 1987, p. 48-49. – Claude Brenot et Simone Scheers, Catalogue des monnaies massaliètes et monnaies celtiques du musée des beaux-arts de Lyon, Louvain : Peters, 1996, XVIII + 182 p., 44 pl. – Jean Martin-Demézil, « Louis de La Saussaye, la cathédrale de Cologne et le roi de Prusse », Mémoires Soc. sc. et lettres de Loir-et-Cher 54, 1999, p.197-203. – D. Masson, DBF.
Portrait par Leroux de Lincy en 1845, musée du château de Blois (reproduit dans la Revue numismatique, 1986, pl. I). – Médaillon à son effigie de profil en plâtre (reproduit dans les Mémoires de la Société des Sciences et Lettres de Loir-et-Cher 54, 1999, p. 199), par Alfred Halou (original du bronze, daté de 1861, conservé par le musée du château de Blois). La ville de Blois a donné son nom à l’ancien quai du Département.
Fonds Louis de La Saussaye, 104 J, archives départementales du Loir-et-Cher. – La bibliothèque municipale de Blois conserve de nombreux manuscrits.
Ses nombreux articles touchant à la numismatique sont répertoriés dans les tables de la Revue numismatique publiées en 1856 et celles qui couvrent la période 1836-1905 (Adolphe Dieudonné, Paris : Rollin et Feuardent, 1908).
Autres articles : Essai sur l’origine de la ville de Blois et sur ses accroissements jusqu’au xe siècle, Paris : Téchener, 1833, 68 p., pl. et cartes (extrait du t. I des Mémoires de la Société des sciences et des lettres de la ville de Blois. – « Notice biographique sur le comte de Lezay-Marnésia » RLY 16, 1858, p. 216-232, 275-296, 365-382, et 17, 1858, p. 37-50. – « Histoire littéraire de la ville de Lyon » en plusieurs parties publiées dans la RLY 17, 1858 p. 354-377 ; 18, 1859, p. 279-300 ; 22, 1861, p. 91-118 ; 25, 1862, p. 269-293 ; 6, 1868, p. 323-339 et 422-440. – « Étude sur la Table claudienne » (conférence lue à la réunion des Sociétés savantes à la Sorbonne le 20 avril 1870) RLY 10, 1870, p. 193-216. – Allocution prononcée à la rentrée solennelle des facultés de Lyon le 27 novembre 1856, Lyon : Vingtrinier, 1856, 8 p. - Allocution prononcée à la rentrée solennelle des facultés de Lyon le 1er décembre 1857, Lyon : Vingtrinier, 1857, 8 p. – Allocution prononcée à la rentrée solennelle des facultés de Lyon le 17 novembre 1858, Lyon : Vingtrinier, 1858, 12 p.
Livres : Cent bévues de M. Jouy dans trente-quatre pages de « L’Ermite en province », relevées par un Blésois [L. de La Saussaye] et par un Solonais, Paris : les marchands de nouveautés, 1828, 30 p. – Dissertation étymologique, historique et critique sur les diverses origines du mot cocu, avec notes et pièces justificatives, par un membre de l’Académie de Blois [MM. de Pétigny et de La Saussaye], Blois : impr. F. Jahyer, 1835, 52 p. – Histoire du Château de Chambord, Blois : les libraires, 1837, VII-88 p. et pl. (8 éd., dont l’une par l’imprimerie de Louis Perrin* en 1859). – Histoire du château de Blois, Blois, 1840, VII + 234 p. (3 éd.). – Numismatique de la Gaule narbonnaise, Blois : Rev. Numismatique ; Paris : Rollin, 1842, 204 p. – Mémoire sur les antiquités de la Sologne blésoise, Paris : Techener et Blois : E. Dézairs, 1844, 11 pl. lithographiées. – Histoire de la ville de Blois, Blois, 1846, 313 p. – Blois et ses environs, guide artistique et historique dans le Blésois et le nord de la Touraine, Blois, 1867 (4e éd.), 400 p., pl. – Guide historique du voyageur à Blois et aux environs, Blois : Marchand, 1855, 247 p. – Tableau général de la noblesse des bailliages de Blois et de Romorantin en 1789, Paris : A. Aubry, 1863, VII + 19 p. – Dissertation sur le lieu de l’assemblée annuelle des druides, Paris : Impr. impériale, 1864, 17 p. – Mémoire sur des expériences de navigation par la vapeur en 1707, Paris : Impr. impériale, 1865, 29 p. – Mémoire sur l’organisation de l’instruction publique dans l’Empire romain, Paris : Impr. impériale, 1865, 19 p. – Mémoire sur la voie gallo-romaine d’Orléans à Bourges, Paris : Impr. impériale, 1867, 24 p. et carte. – « Monnaies des Éduens », Ann. de l’Institut archéologique 17, p. 98-110. – La vie et les ouvrages de Denis Papin, avec A. Péan, t. I, Paris : Franck, 1869, 266 p. et 11 pl. Publiés après sa mort : Les six premiers siècles littéraires de la ville de Lyon, Lyon : Brun, 1876, X + 258 p. – Quelques-uns de ses dessins et aquarelles ont été publiés sous le titre : Louis de La Saussaye, « Album blésois », dessins et aquarelles, 1820-1830, Blois : Comité départemental et de l’archéologie en Loir-et-Cher ; et Lamotte-Beuvron, Groupe de recherche archéologiques et historiques en Sologne, 1995, 104 p. – Journal historique et archéologique du Blésois et de la Sologne, Saint-Claude-de-Diray : Hesse éditions, 2009, 317 p