Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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La recherche est faite par sous chaîne, insensible à la casse et aux accents.

DUMONT Aristide (1819-1902)

par Michel Dürr.

 François Marcellin Aristide Dumont appartient à une ancienne et importante famille réformée de la Drôme. Il est né à Crest (Drôme) le 2 juin 1819, fils de Jean Dumont, suppléant de justice de paix du canton de Crest (nord), habitant Crest, et de Philippine Amélie Bodin. Le 19 mai 1858, à Lyon 2e, Aristide Dumont, demeurant à Lyon cours d’Herbouville, épouse Émilie Antoinette Marie, dite Emma, Sauzet (Lyon 4 janvier 1838-Cannes 15 décembre 1895), demeurant à Lyon rue du Plat, fille de Romain Sauzet (Lyon 30 janvier 1803-Lyon 4 octobre 1872), trésorier des hospices civils de Lyon, et de Rose Antoinette Marie Sauzay (Villefranche-sur-Saône 15 octobre 1817-Lyon 5 décembre 1871), en présence, de Louis Victor Dumont, 43 ans, avocat à la cour impériale de Paris, frère de l’époux, de Nicolas Bodin, 48 ans, employé à la Banque de France, cousin de l’époux, de Pierre Paul Sauzet*, ancien président de la chambre des députés, place Napoléon, oncle de l’épouse, et d’Antoine Marie Charvériat, notaire, cousin de l’épouse. Aristide Dumont décède le 23 juillet 1908 à Moulins.

 Après des études au lycée de Lyon, il entre à l’École polytechnique en 1836, 43e sur 112 élèves, et en sort dans le corps des Ponts et chaussées. Esprit bouillonnant, convaincu des bienfaits du progrès technique, il est prompt à s’enflammer dans l’élaboration de projets grandioses et souvent utopiques. Il fait une carrière entrecoupée de congés et de détachements pour des missions à l’étranger, dans une administration qui se montre d’une grande bienveillance à son égard. Il fait preuve d’une ténacité admirable pour présenter ses idées sans se laisser décourager par les refus, et c’est ainsi qu’il parvient à faire adopter ses projets d’alimentation en eau de Lyon et de Nîmes et à engager les réflexions sur l’aménagement du Rhône.

 Il commence à Bergerac au service de la navigation de la Dordogne, avant d’être affecté le 1er juin 1840 à l’arrondissement de Tournon et le 1er octobre 1842, d’être attaché à la résidence de Pont-Saint-Esprit, au service de la navigation du Rhône et à celui des études du chemin de fer de Paris à la Méditerranée. Il obtient alors une mission en Lombardie pour étudier si les méthodes et les procédés d’endiguement pouvaient être susceptibles d’application en France. Pour le ministère, après les grandes inondations de 1840, il s’agit surtout de se protéger contre les crues. Aristide Dumont s’intéresse en fait à l’alimentation en eau des villes et à l’irrigation. De retour en France, affecté à la résidence de Lyon le 1er mai 1844, il est autorisé à rédiger un projet de fourniture d’eau potable à la ville de Lyon, et il ne publie qu’en 1846 son rapport sur l’endiguement du Pô. Il soumet – sans être entendu – à Jean François Terme, maire de Lyon, son projet d’alimenter la ville à partir de l’eau du Rhône naturellement filtrée. Il s’installe à Paris, à partir du 1er août 1846, comme répétiteur à l’École des ponts et chaussées. Il écrit de nombreux articles d’économie politique dans La Presse de Girardin, journal d’opposition. Cela n’empêche pas l’ancien préfet et maire de Lyon, Paul Jayr, nommé au ministère des Travaux publics (9 mai 1847 au 24 février 1848), de le prendre à son cabinet et de lui faire obtenir la Légion d’honneur le 13 février 1848. Après la Révolution de 1848, lors des élections à la Constituante, il se présente à la députation dans le département de la Drôme, sans succès au demeurant. Son esprit exubérant lui fait imaginer des projets grandioses de réseaux de communication télégraphique, préfigurant les réseaux téléphoniques modernes, mais avec une technique encore balbutiante. Pour être plus libre de développer ses utopies, il se fait admettre de mai 1850 à novembre 1851 dans la réserve du corps des ponts, sans traitement. Rappelé au service hydraulique du département de l’Indre, il obtient le 1er décembre 1852 un congé avec demi-traitement pour raison de santé, en fait pour mettre au point le plus grand de ses nombreux projets, celui d’un canal de dérivation du Rhône pour l’irrigation des plaines de la Provence et du Languedoc. En 1853, séduit par le projet de Dumont d’alimentation de Lyon par l’eau du Rhône, le préfet Vaïsse fait procéder à des essais de pompage dans un puits creusé à l’emplacement du parc actuel de la Tête d’Or. L’expérience réussit, reste à trouver les fonds pour passer à la réalisation. Vaïsse met en rapport Dumont avec la Compagnie générale des Eaux qui vient de se fonder à Paris et, le 1er novembre 1854, un congé illimité, l’autorise à prendre la direction des travaux à Lyon. Quatre ans plus tard, tous les quartiers de Lyon sont alimentés, et Dumont qui avait été nommé ingénieur ordinaire de 1re classe le 31 janvier 1855, revient dans son administration. En février 1862, il est mis temporairement à la disposition du gouvernement moldo-valaque du prince Couza afin d’organiser le service des ponts et chaussées de ces provinces. Probablement déçu des difficultés politico-administratives rencontrées, il revient bientôt en France, malgré les efforts faits pour le retenir. Il reprend l’élaboration de projets grandioses, comme l’alimentation en eau de Seine de Paris, comme la réalisation d’un canal avec dix-huit écluses, allant jusqu’à Dieppe et faisant de la capitale un port de mer, comme aussi celui d’un chemin de fer reliant la Syrie au golfe Persique. Il passe ingénieur en chef de seconde classe le 16 mai 1863 et, à partir du 1er août 1865, est de nouveau en disponibilité avec demi-traitement pour compléter ses études d’irrigation dans la vallée du Rhône. Puis à partir du 1er octobre 1869, pour diriger les travaux d’alimentation en eau de la ville de Nîmes à partir du Rhône. Nommé ingénieur en chef de 1re classe le 6 juin 1872 et jusqu’en 1878, il suit les études et les tentatives fort embrouillées de réalisation d’un canal de dérivation du Rhône. En juillet 1878, il est autorisé à se rendre en Italie pour y étudier le tracé et la réalisation du canal Cavour. Il est ensuite chargé à la résidence de Valence d’étudier divers ouvrages de retenue d’eau. Détaché en décembre 1881 au ministère de l’Agriculture, il cesse ses fonctions le 19 avril 1883. Il continue à établir des rapports sur l’aménagement du Rhône en utilisant les lacs de Genève, du Bourget et d’Annecy pour réguler le débit, sur l’utilisation du Bas-Rhône pour l’irrigation et sur un pont entre Fourvière et la Croix-Rousse. Retiré dans sa propriété de la Répara (Drôme), il est maire de sa commune en 1881.

 Il meurt le 23 juillet 1902 à Moulins.

 Une rue porte son nom à Crest, ainsi qu’à Nîmes.


Académie

Le 3 juin 1862, le président Paul Sauzet* remet à l’Académie une lettre du mari de sa nièce, Aristide Dumont, accompagnant un mémoire sur Les eaux de Lyon et de Paris. Le 22 juillet, Fournet* présente un rapport sur ce mémoire et demande qu’Aristide Dumont soit inscrit sur la liste de candidature des correspondants : le 2 décembre, il est élu membre correspondant. Le 20 mai 1873, Jules Michel* soutient la candidature de Dumont comme titulaire : il est élu le 3 juin au fauteuil 5, section 3 Lettres ; il adresse une lettre de remerciements le 13 juin, mais ne prononce son discours de réception que lors de la séance publique du 23 décembre 1879, sur le sujet : Fragments biographiques : Perrache, Craponne, de Montrichet. Sur sa demande, il passe à l’éméritat le 22 mars 1895. Son éloge funèbre est prononcé le 31 janvier 1905 par Brun-Durand, membre correspondant.

Bibliographie

Justin Brun-Durand, « L’ingénieur en chef Aristide Dumont », lu à l’Académie le 31 janvier 1904, Ac Rapports 1902-1904, p. 306-340. – Philippe Lamour, Aristide Dumont, promoteur des canaux du Rhône, Paris : Sodirep, 1960, 36 p.

Iconographie

Photographie BNF, FRBNF 40587072.

Publications

Essai sur l’encaissement et la canalisation du Rhône, considérés sous le double rapport de la défense des propriétés riveraines et des besoins de l’industrie, Paris : Carilian Goeury, 1842. – Note sur un projet ayant pour but d’approvisionner Lyon et ses faubourgs à l’aide des eaux du Rhône naturellement clarifiées, Lyon : Dumoulin, 1843, 140 p. – De l’état actuel de la question des eaux potables à Lyon. Mémoire présenté au Conseil municipal à l’appui d’un projet pour l’élévation et la distribution des eaux du Rhône naturellement clarifiées, Lyon : Nigon, 1844, 182 p. – De l’état actuel de la question des eaux potables à Lyon, Lyon : Nigon , 1844, 182 p. – Avec son frère, Adrien Dumont, avocat au Conseil d’État et à la cour de cassation : De l’organisation légale des cours d’eau sous le triple rapport de l’endiguement, de l’irrigation et du desséchement ou Traité des endiguements, des alluvions naturelles et artificielles, des irrigations, avec la jurisprudence, suivi d’un exposé de la législation lombarde, Paris : L. Mathias, 1845, XV + 535p. – Note sur le projet d’un chemin de fer de Lyon à Grenoble, avec embranchement sur Valence par la vallée de l’Isère, Paris : Crapelet, 1845, 12 p. – Note sur le chemin de fer de Charleroi à la frontière de France et sur l’état actuel des travaux de cette ligne, Paris : Claye, 1846, 24 p. – « Sur les causes des inondations », La Presse, 21 novembre 1846.Des travaux publics dans leurs rapports avec l’agriculture [reprend 19 lettres parues en 1846 dans le journal La Presse], Paris : Guillaumin, 1847, 376 p. – Étude sur le bassin du Pô et sur le système d’endiguement de cette vallée, Paris, 1847 [Note VIII extraite de l’ouvrage précédent]. – Note sur les bases de l’avant-projet du canal du Midi, Paris, 1847 [Note IX extraite de l’ouvrage précédent]. – Les associations ouvrières, Propagande populaire, 1re livraison, Paris : Guillaumin, 1849, 6 p. – La réforme administrative et les télégraphes électriques, trois lettres au rédacteur en chef de « La presse », Paris : E. Marc-Aurel, 1849, 67 p. – Lettres aux électeurs de la Drôme, 1re lettre : Ni révolution, ni réaction, Paris, ce 5 avril 1849 ; 2e lettre : La situation, s.d., Paris : Marc-Aurel. – Compte-rendu de l’ouvrage de M. Aristide Dumont intitulé la Réforme administrative, réimprimé en vue de sa candidature à l’Assemblée législative, extr. Journal La Liberté du 27 mars 1849, Paris : Marc-Aurel. – « Article sur la rentabilité des chemins de fer », La Presse, 30 août 1849. – « Lettre-réponse d’Aristide Dumont, insérée dans l’article M. Aristide Dumont et les chemins de fer », Journal des Chemins de fer du samedi 22 septembre 1849, vol 8, p. 643-645.La télégraphie électrique dans l’intérieur de la ville et de la banlieue de Paris, Paris : Chaix, 1850, 32 p. – « Experiments on the application of electro-magnetism as a motive force », Journal Franklin Institute, novembre 1851, p. 332-333.Études sur la Brenne ou petite Sologne, précédées d’une introduction sur les travaux publics en général, Paris : Carilian-Goeury, 1852. – Avec J. Andriveau-Goujon, Louis Antoine et P. Rousset, Carte des travaux publics en France comprenant le réseau complet des chemins de fer et l’ensemble des voies navigables, Paris : J. Andrivon-Goujon, 1853, 1 feuille 78 x 64 cm. – La paix [Italie, guerre de 1859], Paris : Amyot, Paris, 45 p. – Mémoire sur le projet du canal d’irrigation du Midi, pour l’irrigation des plaines de la Provence et du Languedoc et l’approvisionnement en eau potable des villes de Nîmes, Montpellier, Avignon, Beaucaire, Tarascon, Roquemaure, Lunel, Montélimar, Orange, Carpentras, Paris, 1853 ; 2e éd., Paris et Lyon : Guillaumin, 1857, 31 p. ; 3e éd., Paris : Dunod, 1861, 47 p. – Les Eaux de Lyon et de Paris. Description des travaux exécutés à Lyon pour la distribution des eaux du Rhône filtrées et projet pour alimenter Paris en eau de Seine, Paris : Dunod, 1862, XIV + 344 p ; XII + 139 p., atlas 24 pl. – Note sur les canaux d’irrigations du Rhône et le canal projeté par la Compagnie du Midi, Paris : chez l’auteur, 1863, 8 p. – Pratique des distributions d’eau, Paris : Dunod, 1863, VII + 141p. – Avec E. Sabatié et Louis Richard, Paris port de mer : canal maritime de Dieppe à Paris proposé par M. Sabatié, avant-projet et mémoire justificatif par A. Dumont et Louis Richard, suivi du rapport de la commission des ingénieurs anglais, Paris : Plon, 1863, III + 141p. 1 carte. – Avec Louis Richard, Paris port de mer. Note sommaire sur l’étude d’un canal maritime de Paris à la mer, Paris : Librairie centrale, 1864, 16 p. – Paris, port de mer. Conférence populaire de l’association polytechnique, faite le 8 mars 1868 à l’École centrale des arts et manufactures, Paris : Dunod, 34 p. – Paris, port de mer, suivi de « Banquet de Dieppe » du 20 avril 1868, extr. de La vigie de Dieppe du 21 avril 1868, et du CR par L. Figuier, feuilleton de La Presse du 14 mars 1869, Paris : Dunod, 1872, 52 p. – Avec Louis Richard, Études sur le projet d’un canal de Paris à la mer et la création d’un port de commerce à Paris, Paris : Dunod, 1869, III + 199 p. et pl. – Eaux de Nîmes, projet Dumont pour la distribution immédiate de 25 000 mètres cubes d’eau du Rhône à Nîmes, lettre à M. le préfet du Gard, à M. le maire, à MM. les membres du conseil municipal de Nîmes, signé Aristide Dumont, 28 avril 1864, Paris : Dunod, 1864, 18 p. – À M. le maire de la ville de Nîmes, sur le projet d’élever et de distribuer un volume quotidien de 40 000 mètres cubes d’eau du Rhône filtrée, 16 juin 1868, Nîmes : Soustelle, 6 p. – Eaux de Nîmes, réponse d’un vivant à la « Lettre d’un mort», 21 juillet 1868, Nîmes : Clavel-Ballivet, 7 p. – Les chemins de fer en Orient, Paris : Librairie des corps impériaux des ponts et chaussées, 1868, 47 p. – Les irrigations du bassin du Rhône et du département de la Drôme, Paris, 1870. – Les eaux de Crest, Paris : Brière, 1873, 4 p. – Études d’irrigation du bassin du Rhône. Projet du canal d’irrigation du Rhône. Mémoire dressé par l’ingénieur en chef des ponts et chaussées A. Dumont, Conseil général des Ponts et Chaussées, Paris, le 14 février 1874, Paris : P. Dupont, 1874, 8 p. – Carte générale du canal d’irrigation du Rhône, des roches de Condrieu à Béziers, Paris : Dufrénoy, 1876, 1 feuille 54 x 72 cm. – Avec Georges Dumont [son neveu], Les eaux de Nîmes, de Paris et de Londres. Description des travaux exécutés à Nîmes pour la distribution des eaux du Rhône filtrées. Paris 1874. – Réimpression du précédent avec une préface sous le titre : Le canal d’irrigation du Rhône et les eaux de Nîmes, de Paris et de Londres : Paris : Dunod, 1898, XLVI + 310 p., atlas 27 pl. – Fragments biographiques : Perrache, Craponne, de Montrichet. Discours de réception à l’Académie, Lyon, 1880, et MEM S 1879-1880. – Projet d’un canal d’irrigation de la rive gauche du Rhône, avec les eaux tirées de l’Isère, Avignon : Seguin [1881], 21 p. – Mission du Ministre de l’agriculture en Italie, pour l’étude des irrigations, Paris, 1883. – Canal maritime de Dieppe à Paris. Paris port de mer, Paris : Plon, 1883, III+141p. – Avant-projet d’un canal d’assainissement de Paris à la mer par Gisors, Gournay et Neufchâtel, Paris : Barde, 1887, 36 p., carte et plans. – Projet d’un pont entre la Croix-Rousse et Fourvière, Lyon, 1890. – Grand canal français. Le Havre, Paris, Lyon, Marseille, projet de LM. Douhet, s.l., 1891. – Note sur l’état actuel de la question des eaux de Lyon, Lyon 1892. – Note sur mon projet d’élévation et de distribution des eaux naturellement filtrées sur la Koura, pour l’alimentation de la ville de Bakou (Caucase), Cannes, 1894. – La crise viticole et le canal d’irrigation du Rhône, Paris : Dunod, 1901, 23 p. – Avec G. Dumont, ingénieur, professeur à l’École des hautes études commerciales, Électromoteurs et leurs applications, Paris : Gauthier-Villars, 1897, 184 p. ; 1900 ; 1909, 192 p.