Dictionnaire historique des académiciens de Lyon

Préface
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BONNET Amédée (1809-1858)

par Jacques Chevallier.

 Né à Ambérieu-en-Bugey (Ain) le 20 mars 1809 (et non pas le 19 comme il est indiqué dans ses biographies), il est le cadet d’une famille de six enfants. Témoins à la déclaration du 21 : Joseph Lempereur, marchand toilier (1758-1818), Gaspard Bonnet (1760-1815), notaire à Ambérieu, tous deux cousins de l’enfant. Son père Joseph (Ambérieu 1760-Lyon 1839), médecin à Ambérieu, maire de cette cité en 1790, président de la Société des amis de la Constitution, conseiller général, avait épousé en 1790 Jeanne-Marie Lempereur (Tenay 1771-Ambérieu 1856). Son frère, Jean Jacques Bonnet (1795-1869) a été maire d’Ambérieu en 1860.

 Son trisaïeul Antoine (1660-1732), déjà fixé à Ambérieu, était régisseur des revenus du roi de Sicile et duc de Savoie. Son grand-père Antoine (1718-1785), marchand et fermier de rentes, eut quatre enfants : Joseph le père d’Amédée ; Antoinette (1755-1831) ; Isaac (1745-1808) dit l’Américain car il est négociant à Saint-Domingue ; et Jean-Baptiste (1754-1831), commissaire en droits seigneuriaux, maire de Jujurieux (Ain) et chef de la branche des Bonnet de Jujurieux, célèbres fabricants de soieries.

 Amédée Bonnet fait sa scolarité au collège de Belley, puis au séminaire de Sainte-Foy-l’Argentière (baccalauréat ès lettres le 19 août 1825 à Lyon, baccalauréat ès sciences le 11 août 1826 à Grenoble), avant de s’engager dans la voie médicale par tradition paternelle.

 Élève à l’école préparatoire de Lyon, pendant un court séjour à l’Hôtel-Dieu il peut admirer en 1826 la première leçon opératoire de Gensoul : la résection du maxillaire supérieur. Au printemps 1827, il part pour Paris sous la bienveillance de deux autres « enfants illustres du Bugey », professeurs à la faculté de Paris, Joseph Claude Anthelme Récamier et Anthelme Balthazar Richerand. Il est inscrit comme externe de l’hôpital Saint-Louis puis réussit l’internat le 8 novembre 1828 (premier par ordre de mérite sur les dix-neuf reçus). En 1829, il est interne dans le service de Récamier. Lauréat du concours de l’École pratique, il aura la première médaille d’or du grand prix annuel de cette école en 1831. Trousseau le choisit comme collaborateur. Il soutint sa thèse de doctorat le 18 août 1832 sous la présidence de Richerand, avec le sujet : Recherches sur quelques points de physiologie et de pathologie tels que la surdité, les luxations, le mouvement des côtes, etc.

 Il décide alors de retourner à Lyon et de choisir la chirurgie. Il réussit à 24 ans le concours de chirurgien-major de l’Hôtel-Dieu le 28 mai 1833 (il sera aide-major jusqu’au départ de Bajard en 1838, puis major de 1838 à 1843). Lors des événements d’avril 1834, Bonnet porte héroïquement secours aux insurgés. Ses premiers travaux concernent la ténotomie, c’est-à-dire les sections tendineuses et les sections musculaires qu’il applique au globe oculaire, aux pieds bots, aux difformités des genoux, aux torticolis chroniques, etc. Son traité publié en 1841 est considéré comme révolutionnaire.

 Ainsi, dès le début de son majorat, Bonnet va s’orienter essentiellement vers la pathologie articulaire et sera considéré comme le « novateur de la chirurgie des maladies articulaires ». Ces travaux portent sur l’observation des attitudes vicieuses des membres lors des infections articulaires et des fractures ; le traitement des arthrites par les ponctions, cautérisation, injection d’iode et surtout par l’immobilisation avec la création de nouveaux appareils d’immobilisation ; la récupération des mouvements articulaires avec l’invention d’attelles avec articulations métalliques mobiles. Il est aussi un des défenseurs enthousiastes de l’anesthésie naissante, à la différence de son prédécesseur et maître Gensoul.

 En 1838, il est nommé professeur de clinique chirurgicale à l’École préparatoire de Lyon. Son enseignement très méthodique et fondé sur l’expérience est extrêmement suivi. Il est le fondateur de l’École ostéoarticulaire lyonnaise (qui deviendra orthopédique par extension de langage). Son œuvre maîtresse est le Traité des maladies des articulations publié en 1845 (deux volumes de texte et un atlas de 16 planches lithographiées).

 Il épouse à Lyon le 24 janvier 1844 Benoîte Cécile Courajod (née à Lyon le 4 juillet 1821), fille d’Alexis Jean Courajod, négociant, et de Julienne Flachat ; ils auront cinq enfants : Hélène Marie Antoinette (1845-1917), épouse d’Adolphe Mottard (1833-1897), négociant en toilerie ; Jules André (1846-1865) mort alors qu’il était étudiant en médecine, Jean Édouard (1851-1931), ingénieur des arts et manufactures, Amédée Joseph Alexis (1854-1933), avocat, homme de lettres à Nice, qui écrit sous le pseudonyme de Théophile Serretête, et Alfred Jacques Amédée (1859-1903), capitaine d’artillerie à Bourges.

 Chevalier de la Légion d’honneur le 25 avril 1847, membre correspondant de l’Institut pour la section de médecine et chirurgie le 23 avril 1855, il devient membre associé national de l’Académie impériale de médecine le 16 août 1857.

 En 1856, il avait acheté à Ambérieu à quelques pas de sa maison natale, à la sortie du vallon de Vareille, le château des Échelles, qu’il a entièrement rénové. Il voyage beaucoup : Bruges, Anvers, Turin, Heidelberg, mais c’est lors d’un voyage à Naples en 1857 qu’il ressent les premiers signes de la maladie qui va le frapper (apoplexie de la moelle épinière). Il décède le 2 décembre 1858, à son domicile 7 place Bellecour, moins d’un mois après le discours prononcé aux obsèques de Gensoul. Il n’avait que 49 ans. Déclarants : son frère Jean Jacques Bonnet et son beau-frère Alexis Antoine Courajod. On dit que plus de 40 000 personnes suivirent son cercueil. Il est enterré le 4 décembre au cimetière de Loyasse, dans un tombeau conçu par les architectes Jean Marie Sage et P. Perrin, surmonté d’un buste en bronze (« d’une ressemblance problématique »), sculpté en 1866 par François Félix Roubaud (Hours, Loyasse, 247).

 Le 2 juillet 1862, une statue en bronze – sur un piédestal en pierre de Seyssel conçu par l’architecte François Dubuisson de Christot – due à un homonyme le sculpteur Guillaume Bonnet*, fondue par Charnod, est inaugurée dans la cour Saint-Martin de l’Hôtel-Dieu (« Inauguration des monuments de Bonnefond et d’Amédée Bonnet », RLY (2) 25, p. 76-80). Auparavant la direction des hospices avait fait installer son buste en marbre dans le grand dôme, à côté de celui de Petit*.

 Le 1er juillet 1866, la ville d’Ambérieu inaugurait un buste en marbre dû aussi à Guillaume Bonnet (A. Vingtrinier, « Inauguration du buste d’Amédée Bonnet », RLY [3] 2, p. 95) ; il se trouve à la mairie. Une rue de Lyon 6e créée en 1884 porte le nom d’Amédée Bonnet, de même qu’à Ambérieu-en-Bugey. Le 6 juin 1909, une plaque commémorative a été apposée sur sa maison natale à Ambérieu, au 34 de la rue qui porte son nom (Discours prononcés le 6 juin 1909 à l’inauguration d’une plaque commémorative sur la maison où est né Amédée Bonnet, Lyon : A Rey, 1909).

 J. Soulary* a écrit un poème à sa mémoire, Le médecin et le prêtre, RLY (2) 18, 1859, p. 7. Un prix Amédée-Bonnet, dont le montant avait été prélevé sur la souscription faite pour l’érection de la statue de l’Hôtel-Dieu, a été décerné dès le 28 octobre 1862 à l’étudiant reçu premier à l’internat. Il consistait en une trousse munie de ses instruments, portant le nom du lauréat et le titre de cette distinction.


Académie

Élu le 6 juin 1847, il occupe l’année suivante le fauteuil 6, section 3 Sciences. Discours de réception le 29 août 1848 : Des services rendus par la médecine aux sciences naturelles. Il est président en 1856 (Allocution prononcée par M. Bonnet, président de l’Académie dans la séance publique du 24 juin 1856, RLY [2] 13, 1856, p. 92-101) et en 1857. Il présente deux communications d’ordre littéraire : Influence des lettres et des sciences sur l’éducation (25 janvier 1855, RLY [2] 10, 1855, p. 112-142) ; De l’oisiveté de la jeunesse dans les classes riches (26 janvier 1858, RLY [2] 16, p. 92-116) ; ainsi que l’Éloge d’Alphonse Dupasquier * (9 janvier 1849).

Bibliographie

Collectif, Le docteur Bonnet, sa vie, sa mort et ses funérailles, Lyon : Vingtrinier, 1859. – F. Barrier*, Éloge d’Amédée Bonnet (discours de réception, 21 juin 1859). Lyon : Vingtrinier, 1859. – P. Diday, Éloge historique du Dr A. Bonnet. Lyon : Mégret ; Paris : Savy, 1860. – Inauguration de la statue du docteur Bonnet à Lyon, le 2 juillet 1862. Discours prononcés à cette cérémonie. Lyon : Vingtrinier, 1862. – M. Patel*, Les Biographies Médicales, Amédée Bonnet (1809-1858), Paris : Baillière, 1935. – Michel Charotte, Biographie d’Amédée Bonnet, novateur de la chirurgie ostéo-articulaire. Thèse médecine univ. Claude Bernard Lyon, n° 218, 1980. – R. Guillet*, « Amédée Bonnet chirurgien major et humaniste » (discours de réception 14 mars 1989), MEM 44, 1989, p. 73-83. – L.-P. Fischer*, « Amédée Bonnet (1809, Ambérieu-en-Bugey ; 1858, Lyon), Chirurgien major de l’Hôtel-Dieu de Lyon, novateur de la chirurgie ostéo-articulaire et homme de lettres », Histoire Sci. Médic. 30, n° 4, 1996, p. 449-458. – H. Pansu, « Claude-Joseph Bonnet », Soierie et société à Lyon et en Bugey au xixe siècle, Lyon et Jujurieux : chez l’auteur, 2003. – Dossier Amédée Bonnet à l’Académie des sciences de Paris : ce dossier contient en particulier quatre lettres de Bonnet à Bouchacourt* (1838-1840) et une à Flourens (28 avril 1855), diverses correspondances entre le secrétaire de l’Académie et la famille.

Publications

Recherches sur quelques points de physiologie et de pathologie tels que la surdité, les luxations, le mouvement des côtes, etc., thèse de doctorat en médecine n° 181, Paris : Didot le jeune, 1832. – Traité des sections musculaires et tendineuses, suivi d’un mémoire sur la névrotomie sous-cutanée. Lyon : Savy, et Paris : Baillière, 1841. – Traité des maladies des articulations. Paris : Baillière, 1845. – Traité de thérapeutique des maladies articulaires. Paris : Baillière, 1853. – Méthodes nouvelles de traitement des maladies articulaires. Paris : Baillière, 1859. – De la méthode à suivre pour arriver à la connaissance et au perfectionnement de la chirurgie (discours d’installation comme chirurgien en chef de l’Hôtel-Dieu de Lyon, 30 décembre 1837). Paris : Germer Baillière, Lyon : Savy, 1838. – Compte-rendu du service chirurgical de l’Hôtel-Dieu (discours prononcé à la fin de l’exercice de ses fonctions de chirurgien major, 30 décembre 1843). Lyon : Perrin, 1844.

Une quarantaine de publications scientifiques (pour le détail, voir Collectif et Patel). Cinq publications d’ordre littéraire : cf. Patel, Lettre à l’Académie de Lyon, 1854, et Du décret du dix avril dans ses rapports avec l’éducation du médecin : mémoire dont l’Impressionété votée [le 18 mai 1852] par l’Académie des sciences, belles-lettres et arts de Lyon, et par la Société nationale de médecine de la même ville, Lyon : Perrin, 1852, 35 p.